"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
À la fin des années 1970, un jeune Américain, fils d'un Haïtien et d'une Portoricaine, recouvre les murs de Manhattan de phrases énigmatiques qu'il signe du nom de SAMO. Quatre ans plus tard, riche et célèbre, il invente un langage pictural d'une puissance inégalée, fait de corps, de mots, de rage. Jean-Michel Basquiat, aujourd'hui considéré comme l'un des plus grands peintres du XXe siècle, devient ici, pour la première fois, un personnage de roman. Pierre Ducrozet suit le parcours d'un garçon qui se rêve héroïque dans un monde qui ne l'est pas.
Rock, hip-hop, clubs de l'East Village et galeries de SoHo ; dans ce New York en pleine renaissance émerge une nouvelle scène artistique autour de lui, de Keith Haring et d'Andy Warhol. Basquiat danse, peint, cavale, et devient, malgré lui, le symbole des années 80. Au-delà de la légende, Eroica raconte le combat d'un artiste contre le monde, contre ses passions destructrices, contre son succès même, le dangereux succès. Il a le génie, il a la grâce. Aura-t-il le courage ?
Un personnage fascinant dans une ville en ébullition ; une épopée contemporaine.
Sans être fan du peintre, voire sans le connaitre, on plonge sans difficulté dans cette biographie romancée du peintre qui semble incarner les années 80 dans tout ce que l’on peut fantasmer du New York de cette époque, non aseptisé, rugueux et créatif, provocant.
On a l’impression que le peintre est le medium de cette époque, qu’il la cristallise.
Au-delà des personnages secondaires qui défilent, Andy Warhol évidemment, Keith Haring, Madonna… Il y a des scènes de galeries drôles et féroces où sa peinture et l’homme sont jugés.
« ses tableaux s’offraient à tous et résistaient à l’interprétation »
L’auteur s’est emparé avec brio de sa vie et en a dressé un portrait vif mais aussi un véritable chemin de croix….on assiste à un véritable combat avec la peinture. Le peintre est hanté par son art, parfois on est proche du vaudou.
« Le monde il faut déjà que j’essaie de lui donner une forme. Et ça me prend toutes mes journées ». « Il pensait créer, il combattait »
Pas de demi-mesure possible dans cette vie, jusqu’à en crever.
« Les héros paient pour les autres. Ils font ce que les gens n’osent pas faire. Ils vont jusqu’au bout et meurent pour que nous puissions tranquillement vivre nos vies de merde (…) nous restons assis et vivons par leur intermédiaire. N’ayant ni courage, ni talent, nous regardons par le judas. Leur vie aventureuse ils en crèvent. Nous avons joui, nous survivons ».
On a tous un ou une amie aux enthousiasmes communicatifs.
La mienne, c'est Catherine. Parfois, je cède et jamais je ne regrette.
Après Somerset Maugham, me voilà à lire Pierre Ducrozet (oui parce que ses enthousiasmes sont diversifiés, c'est pour mieux m'attraper ça).
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Pierre Ducrozet donc.
Pour une découverte dans les meilleures conditions, partons sur une lecture commune avec ladite amie. Et donc, partons sur un titre qu'elle n'a pas encore lu. Et tant qu'à maximiser les chances de succès, partons sur la biographie d'un artiste tourmenté et fascinant.
Ce sera Eroica, biographie romancée de Jean-Michel Basquiat.
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Alors, ne faisons pas durer le suspense, j'ai adoré (Catherine aussi au fait).
Presque chaque phrase m'a cueillie, il y a un souffle, une intensité, un rythme, qui m'ont totalement accrochée. Le chapitre Intermède (#Masterpiece) en est un exemple parfait, trois pages que j'ai dû relire bien trois ou quatre fois avant de passer à la suite du roman (et quelques fois de plus depuis que j'ai terminé ma lecture, un peu comme un morceau qui vous trotte dans la tête).
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Et Basquiat, donc ? Mais oui, Basquiat, car c’est de lui dont il est question ici.
Basquiat, c'est un astre qui est passé, a accroché la lumière, l'attention et l'affection de tous ceux qui l'ont croisé (d'Andy Warhol à Madonna, en passant par Keith Haring), et est reparti aussi vite. Son charisme, sa présence brûlent les pages d'Eroica.
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Une telle association, Basquiat-Ducrozet, ne pouvait donner qu'une lecture explosive que je suis ravie d'avoir partagé avec mon amie aux enthousiasmes communicatifs.
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Et je pressens que je n'en ai pas fini avec Pierre Ducrozet.
Nul besoin de présenter Jean-Michel Basquiat, grand peintre du XXème siècle. Dans son roman, Pierre Ducrozet en fait un personnage dont nous suivons le parcours.
Jean-Michel Basquiat alias Jay, jeune homme révolté dès son enfance, recouvre les murs de la ville de graffitis étranges, signé du nom de SAMO. Ses dessins grouillent et fourmillent de partout. Des mots, des couleurs, de la rage. Jay explose. Et voilà qu’un jour, les projecteurs lui tombent dessus. Qui est cet homme à la peinture significative?
« Il peint à toute allure. Il leur donne du nègre en cage, de l’artiste sauvage, du génie fulgurant, tout ce qu’ils aiment, or il sait parfaitement ce qu’il fait : il mêle le jaillissement et son contraire. Il sait composer une toile et l’équilibrer avec une finesse inouïe, il sait comment poser cet élément là et ce noir ici pour la balance là aussi, il sait (mais comment ?) mêler la puissance torrentielle (masques, cris, effroi, tout ce que vous voudrez) à la post-modernité dans une virtuosité insensée. Ses tableaux sont un vrai bordel parfaitement pensé. »
Jay bouillonne. Jay peint. Le génie passe de l’ombre à la lumière si vite qu’il n’en maîtrise pas les rouages. Et pour cela Jay sombre dans la drogue. Consommant de multiples drogues et conscient de se briser à petit feu mais il peint, le principal pour lui. Jean-Michel Basquiat décède à l’âge de 27 ans, laissant une trace de lui dans l’Histoire de l’art.
« Son option à lui c’est tout, en quantité.
Il s’agit d’avaler tout ce qu’il peut pour combler le creux.
Il s’agit
de peindre plus de tableaux que Picasso
de faire de meilleurs croquis que Léonard de Vinci
de baiser plus de filles que Mick Jagger (ça va être compliqué mais il faut être confiant)
de sniffer plus de coke que Bowie en 1974 devant son saladier auto-alimenté par un réacteur ou est-ce un groom
de battre Matisse en couleur et en grâce
de battre Bacon en torsion et en horreur
de battre Twombly en foutoir
d’être plus rock que Lou Reed
d’être plus célèbre que John Lennon
d’être plus cool que Steve McQueen
de battre Van Gogh en vertige
Son plan, c’est ça. »
Pierre Ducrozet nous dépeint la vie éclair de Jean-Michel Basquiat avec beaucoup d’intérêt et de fascination. Je connaissais les œuvres du peintre mais finalement très peu de sa vie. Eroica est un roman riche et intense, nous donnant envie d’en lire encore plus sur Jean-Michel Basquiat. Une rencontre savoureuse de l’art.
http://www.mesecritsdunjour.com/archives/2021/05/29/38992191.html
Peintre génial, artiste plus trop connu du grand public, Jean-Michel Basquiat est un jeune Newyorkais passé en quelques mois de la rue où il graffait avec des potes et vendait des cartes postales décorées par lui-même, à la célébrité ravageuse, avec beaucoup d'argent lui permettant les caprices les plus fous.
Pierre Ducrozet, un écrivain né à Lyon que je découvre pour l'occasion, a bien fait de redonner vie à celui qui se faisait appeler Jay. Fils d'un père haïtien et d'une mère portoricaine, né en 1960, il a failli mourir des suites d'un grave accident alors qu'il était enfant. Renversé dans la rue par une voiture, il a subi une ablation de la rate. Une impressionnante cicatrice marque son corps du pubis au sternum.
Sûrement pour coller à la personnalité de son personnage et à sa vie assez folle, Pierre Ducrozet a réussi un récit haché, découpé en tranches de vie, en flashs, en échos, en phases d'existence jetées à la face du lecteur. Ceci m'a souvent désorienté et n'a pas facilité ma lecture.
En rupture familiale - « C'est mon père fantôme. C'est ma mère aliénée » - Jay ne se refuse rien, plonge dans toutes les drogues possibles, en abuse et, grâce ou à cause de ces substances, illicites parce que dangereuses, se révèle être un génie.
Inspiré par les bandes dessinées, les comics, de son enfance, il est torturé aussi par les organes du corps humain, corps qui a été ouvert complètement afin de le soigner, comme je l'ai signalé auparavant. Cela transparaît dans la majorité de ses tableaux, plus de huit cents, ainsi que dans ses mille cinq cents dessins. Jay ne fait pas que peindre, il aime la musique et cette symphonie de Ludwig van Beethoven, Eroica, dont l'auteur a repris le titre pour son livre, l'impressionne beaucoup. Composée en 1804, elle avait d'abord été dédiée à Napoléon mais lorsque Beethoven apprit que Bonaparte s'était fait sacrer empereur, il changea d'avis parce qu'il réalisa que l'homme devenait un tyran, et nomma sa Troisième symphonie : Sinfonia Eroica, la Symphonie héroïque.
Avec les nombreuses femmes qui ont partagé un temps sa courte existence, comme Sarah et Leslie, j'ai retenu sa rencontre avec Andy Warhol, le roi du pop-art. Celui-ci est sur le déclin mais il fascine Jay. Tous les deux, en juillet 1968, sont sortis de l'hôpital après une ablation de la rate. Jay avait 8 ans, Andy 40. Ils se lient d'une profonde et tumultueuse amitié, après leur rencontre en 1982, et créent ensemble.
Eroica est un livre pas très facile à lire, bien dans le style de son héros, mais c'est important de ne pas oublier ce que furent ces années 1980 dans l'euphorie newyorkaise avec cocaïne, héroïne, LSD… pour créer ? Pour se détruire aussi à une vitesse folle. Jean-Michel Basquiat est mort le 12 août 1988. Il n'avait pas 28 ans !
C'est bien que Pierre Ducrozet l'ait fait revivre et connaître à des gens qui, comme moi, ne sont pas spécialistes en peinture.
Merci à Simon pour ce livre.
Chronique à retrouver sur : http://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
La visite de l'exposition sur Jean-Michel Basquiat à la Fondation Louis Vuitton a été pour moi l'occasion de lire Eroica, que Pierre Ducrozet a écrit en 2015 en mémoire à ce peintre.
Et en effet, j'ai trouvé dans ce récit l'énergie, la rage, la vie empoignée et brûlée de Basquiat, son combat contre ses passions et contre le monde dans lequel il vécût; autant de facettes qui transpirent des toiles de Basquiat.
Eroica relate également très bien l'univers artistique new-yorkais des années 80, un univers qui gravitait autour d'Andy Warhol, avec des artistes adulés mais souvent aussi associés à la société de consommation, des artistes passés trop vite de l'ombre à la lumière, de la rue à la gloire.
Quant à la plume de Pierre Ducrozet, j'avais découvert en 2017 avec L'invention du corps, une plume précise, taillée au cordeau, fouillant son sujet. Même constat ici : ce qui signe donc probablement la marque de fabrique de cet auteur! En outre, de courts chapitres aux titres percutants apportent du souffle à cette vie si vite enfuie...
Au total, un beau livre, sur l'art, sur la vie, et, un bel hommage à Basquiat.
https://accrochelivres.wordpress.com/2019/02/01/eroica-pierre-ducrozet/
Jean-Michel Basquiat, qui n'a pas rêvé de rentrer dans l'esprit de ce jeune peintre brillant? Voir un Basquiat est toujours source de plaisir chez moi, essayer de comprendre comment ce génie qui avait su s'entourer des meilleurs de l'époque Warhol, Haring entre autre a pu décéder si jeune. IL fait partie des partis trot tôt à 27 ans. L'auteur s'inspire de l'oeuvre et de la vie de l'artiste en passant rapidement sur ses débuts dans la rue comme le faisait Keith. IL est profondément réaliste sur les décadences de l'époque, la drogue, l'alcool... Il nous présente un Manhattan différent de ce que l'on voit aujourd'hui.
Entre épisodes amoureux déchus, Sarah, Madonna, Basquiat se donne corps et âme dans son travail jusqu'à ce que celui-ci le tue. Ce livre est émouvant, très bien écrit et rend hommage à un artiste de renom, sans oublier de montrer les travers de cet engrenage malheureux qu'est la drogue.
Jean-Michel Basquiat, qui n'a pas rêvé de rentrer dans l'esprit de ce jeune peintre brillant? Voir un Basquiat est toujours source de plaisir chez moi, essayer de comprendre comment ce génie qui avait su s'entourer des meilleurs de l'époque Warhol, Haring entre autre a pu décéder si jeune. IL fait partie des partis trot tôt à 27 ans. L'auteur s'inspire de l'oeuvre et de la vie de l'artiste en passant rapidement sur ses débuts dans la rue comme le faisait Keith. IL est profondément réaliste sur les décadences de l'époque, la drogue, l'alcool... Il nous présente un Manhattan différent de ce que l'on voit aujourd'hui.
Entre épisodes amoureux déchus, Sarah, Madonna, Basquiat se donne corps et âme dans son travail jusqu'à ce que celui-ci le tue. Ce livre est émouvant, très bien écrit et rend hommage à un artiste de renom, sans oublier de montrer les travers de cet engrenage malheureux qu'est la drogue.
Eroica est un roman autour de la vie du peintre américain Jean-Michel Basquiat, foudroyé par le génie et la drogue, à 27 ans, en 1988. Cette fiction biographique rassemble de courts chapitres autour de cette légende de l'art, avec une écriture très particulière, virevoltante, nerveuse, à l'image de son personnage central. La plupart des chapitres ont des titres évocateurs : sous-sols, le creux, Pégase, intermède…
Au départ, je me suis un peu perdue dans une sorte de dédale : pas de chemin clairement défini, des personnages flous. L'auteur, Pierre Ducrozet, n'a pas voulu approcher de trop près le peintre et son ombre magnifique. C'est pourquoi il a préféré le surnommer « Jay », le surprenant et très ressemblant double littéraire de Jean-Michel Basquiat. Mais il s'agit bien du peintre, de son génie et de sa chute.
A mi-parcours du livre, alors que je m'apprêtais à abandonner, je me surprends à m'attacher au style, qui semble parfois comme sous l'emprise des substances nocives dont Jay ne peut se passer. L'énergie qui ressort du livre s'attache à retracer la vie d'un homme puissant, mais fragile et qui se révèle un frêle roseau face à son entourage, lassé de sa personnalité difficile. Heureusement, quelques amitiés viendront adoucir son existence : Wharol, Keith Haring… Quant à ses amours, si elles furent nombreuses (la chanteuse Madonna, Sarah, Phoebe), malheureusement elles ne furent pas durables…
Pierre Ducrozet s'approprie la figure de l'artiste, exorcise ses démons dans sa prose, brasse sa richesse pour mieux en faire ressortir les faux clinquants. Il s'amuse parfois à narrer quelques anecdotes véridiques, comme le repas préparé par Jay pour deux marchands : dans leur assiette, des serpents vivants ! Les passages qui me semblent les plus réussis sont ceux qui décrivent le travail du peintre, et l'originalité de sa peinture :
Eroica s'offre au lecteur avide de musiques jazz, aimant les trajectoires originales. Il prolonge la légende de Basquiat, décrit avec force tableaux, paysages urbains, moments d'accalmie. Ducrozet attrape son énergie et la ressert dans ce livre, en restitue l'ardeur et la vitalité folle avant que la drogue ne recouvre tout. Sans tristesse ni regret. Il peint Basquiat avec justesse et force, de son point de vue, c'est à dire par la littérature. Ne me reste plus qu'à contempler dans un livre d'art la peinture de Basquiat pour continuer sur cette belle lancée.
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