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Alors que les femmes ont toujours travaillé, la question de la reconnaissance de leur activité professionnelle se pose au XIXe siècle, et avec elle celle de leur formation. Marianne Thivend nous raconte ici quand, où et par qui ont été mises en place les premières formations professionnelles pour femmes en France. En suivant les pionnières de l'enseignement comptable et commercial, elle propose d'entrer dans la fabrique scolaire, genrée, des métiers.
On trouve les pionnières de l'enseignement comptable et commercial pour femmes à Lyon d'abord, avec le cours public mis en place par Élise Luquin dès la fin du Second Empire, et à Paris, avec les cours créés par Marguerite Malmanche sous la Troisième République. Ces formations sont destinées aux filles des classes moyennes commerçantes qui se préparent à travailler dans l'entreprise familiale, mais également aux femmes adultes indépendantes qui travaillent, commerçantes, tisseuses ou couturières.
Pour les deux fondatrices, l'objectif est d'arrimer l'enseignement commercial pour femmes à l'enseignement technique que la République est en train d'organiser, mais cela ne va pas sans provoquer l'hostilité des milieux professionnels comptables masculins. Car ce qui est en jeu ici, c'est bien l'autonomie économique et sociale des femmes.
Je découvre un ouvrage très intéressant, extrêmement bien fourni et documenté, sur l’histoire de l’éducation des femmes en comptabilité, économie et commerce.
A travers deux figures pionnières de l’enseignement commercial, l’autrice Marianne Thivend, maitre de conférences à l’Université Lyon 2, nous décrit par le menu l’historique des formations pour femmes en comptabilité, métier reconnu comme masculin jusqu’en 1807.
Elise Luquin, lyonnaise, issue du milieu de la soierie, est sensibilisée très jeune aux « affaires ». Après la faillite familiale du négoce de son père et de son oncle, comme elle connaît déjà la tenue des livres en comptabilité, elle décide de se tourner vers l’enseignement, voie quasi unique d’accès au travail salarié pour les jeunes filles des classes moyennes. Après 5 ans en tant qu’institutrice, elle réclame à la Ville la création d’un cours de comptabilité pour femmes. Elle parcourra ensuite la France pour convaincre les villes de développer leur enseignement commercial à destination des filles.
Marguerite Malmanche, ancienne élève diplômée (brevet spécial de tenue des livres puis brevet supérieur) d’Elise Luquin obtient à 23 ans la direction d’un premier cours commercial du soir à Paris. Elle gardera ce poste pendant plus de 40 ans, à son décès en 1913. Son parcours sera exceptionnel et d’une grande avancée pour la formation des femmes.
Impossible de résumer plus cet ouvrage très spécifique qui regorge d’informations. Il est complexe, parfois difficile d’accès, avec de longs chapitres pas faciles à enchainer en lecture continue, avec quelques redites suivant les chapitres, mais il m’a fortement intéressé pour ce qu’il m’a appris du XIXe siècle et du début de la formation comptable des femmes, sur le genre de la profession, l’accession des femmes à cet enseignement spécialisé ; étant moi-même une comptable de formation universitaire. Cela restera pour moi une bible sur le sujet, un livre éducatif remarquablement bien écrit (par une femme, maitre de conférences, pas moins !).
Je remercie les Editions « Presses universitaires de Lyon » pour l’envoi de ce livre. J’ai été ravie de découvrir cet ouvrage, le sujet m’intéressait beaucoup. Je le conseille à tous ceux et toutes celles qui veulent découvrir comment s’est créée au XIXe siècle l’histoire du genre, l’histoire de l’éducation et l’histoire du travail des femmes. De plus, dans les derniers chapitres, Marianne Thivend démontre que l’enseignement professionnel a permis à ces dernières de s’adapter aux mutations des marchés du travail et de développer leur capacité économique, un pan d’histoire méconnu de nos jours et qu’il est bon de remettre au goût du jour.
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