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En consacrant un volume de ses Cahiers au thème de l'aventure coloniale, la SIELEC a choisi une fois de plus la difficulté car, à l'évidence, la rencontre de ces deux mots dans le titre même n'est pas sans soulever de nombreux problèmes. Une première contradiction était connue des auteurs coloniaux eux-mêmes, d'Ernest Psichari à Robert Delavignette. Si le désir de nouveaux mondes et d'étrangeté exotique fut à l'origine de bien de vocations de jeunesse, l'entreprise coloniale mobilise quant à elle ses administrateurs, ses militaires, ses savants pour " reconnaître " le mieux possible des territoires dont on dresse les cartes, où l'on construit des routes en même temps que l'on classe coutumes et croyances dans une évidente intention de contrôle et d'efficacité. L'aventure peut-elle longtemps résister face à une entreprise au fond rationaliste, scientifique, parfois même encyclopédique si l'on pense à la masse impressionnante d'informations réunies par les orientalistes et africanistes de l'âge des Empires ? D'autre part, comme le souligne Sylvain Venayre dans son article introductif, l'aventure a une riche histoire dans l'imaginaire culturel européen. Elle fut d'abord dépréciée, avant de conquérir une place centrale dans la sensibilité de l'entre-deux-guerres. On vit alors foisonner les romans d'aventures pour la jeunesse en même temps que l'Outre-mer se voyait paré de toutes les vertus devant une civilisation européenne agonisante que tentaient tous les démons du nihilisme. Une fois de plus, l'Afrique et l'Asie permettaient de répondre, de manière certes largement imaginaire, aux inquiétudes et aux interrogations de la vieille Europe. La littérature, comme nous l'avons souvent constaté lors des Congrès de la SIELEC, est une formidable caisse de résonance des mythes, rêveries, idéologies que nourrissent les tumultes de l'histoire.
Le présent volume réunit les Actes d'un Colloque international qui s'est tenu à Montpellier et à Nice en mai 2008. Il multiplie les éclairages pour essayer de mieux comprendre cet imaginaire de l'aventure de l'Outre-mer dont on mesure désormais toute la richesse et la complexité. Après avoir évoqué quelques grandes figures de découvreurs, missionnaires, savants, mais aussi de femmes de pionniers et d' " aventurières ", il aborde la grande question de l'aventure aux colonies, avec ses ambiguïtés et ses " avatars ", ses enthousiasmes et ses déconvenues. Le lien étroit entre l'aventure et l'histoire coloniale est abordé dans un chapitre spécifique. La dimension esthétique n'est bien sûr pas oubliée : elle est essentielle, puisque l'Afrique comme le monde arabe ou l'Asie nourrirent l'imagination des romanciers, des peintres et des voyageurs. Sous sa forme populaire, le récit d'aventure connut même (grâce aussi à la presse et au récit de reportage) un considérable succès. Un prochain volume des Cahiers approfondira quelques-uns de ces thèmes et abordera la question sous un angle particulier : celui des nouveaux mondes, au coeur des littératures de l'ère coloniale.
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