Il n'est pas trop tard pour les découvrir ou les offrir !
D'abord, il y a la rencontre avec Arden et Jeff - cette grande femme aux mains d'araignée et cet homme à l'oeil de verre -, alors qu'ils tentent de sauver une orignale sur les berges d'un lac gelé de l'Ontario, au Canada. Touchée par cette rencontre, notre narratrice décide de les suivre et de rester avec eux dans le refuge dont ils s'occupent, soignant les animaux blessés.
Au coeur de cette nature marquée par les saisons, où humains et non-humains tentent de cohabiter, notre narratrice, suffisamment énigmatique pour que l'on puisse y trouver une part de nous-même, apprivoisera ses propres fêlures tout en apprenant à soigner les bêtes sauvages, et à écouter et interpréter les sons de la forêt et de la rivière.
Border la bête est un roman magnétique, tant par les impressions fortes que génère l'évocation sensible et incarnée des paysages, que par celles que nous procurent ses personnages aux silences éloquents et aux caractères forgés par l'existence.
Il n'est pas trop tard pour les découvrir ou les offrir !
Meurtrie par un deuil, l'héroïne rencontre Jeff et Arden et va partager leur combat pour sauver des animaux blessés
Le jury de la 16e édition, présidé par Jean-Christophe Rufin, a délibéré
Au cœur de cette rentrée d'hiver, 5 romans étonnants qui racontent la renaissance et la métamorphose
Elle a quitté ses terres, mais on ne sait pas ce qui l'a poussée vers ces terres du nord où le froid et la glace figent hommes et bêtes.
C'est là qu'elle fait la rencontre de Arden et de Jeff, alors qu'ils tentent de sauver une femelle orignal bloquée dans un trou de glace.
Arsen, la femme aux longues jambes et aux doigts d'araignée. Jeff celui qui l'accompagne dans sa mission, sauver et soigner les animaux blessés pour les rendre à la nature dès qu'ils vont mieux, chaque fois que c'est possible.
Alors qu'elle voulait aller jusqu'à l'océan, la narratrice dont on ne saura pas le prénom décide de rester quelque temps auprès d'eux et des bêtes à soigner. Au plus près de la nature, de la rivière Babine, du Petit Lac et du Grand Lac, des castors et des coyotes. À apprivoiser les bêtes, mais pas trop car elles ne doivent jamais perdre leur nature sauvage, à apprivoiser les sons, le chant des oiseaux, le bruissement des arbres, de la forêt, de l'eau, des éléments qui se déchaînent.
Peu à peu, en apprenant à vivre avec la nature, elle nous en dévoile davantage sur elle, sa vie d'avant, ses passions, ses envies, et se confronte chaque jour à ces paysages dans lesquels elle a su se fondre pleinement.
Chacun de trois principaux personnages à une dimension humaine forte, un lien avec son environnement qui façonne sa personnalité et nous les rend vivants et attachants chacun a sa façon, sauvage, secret, perdu, en mal d'amour ou d'amitié.
Un roman magnifique en ce qu'il nous fait découvrir la terre, les animaux, la nature autrement. Presque sensuellement, spirituellement, de façon très poétique aussi parfois, par touches quasi impressionnistes, il nous permet de nous en approcher sans la détériorer, de la comprendre sans vouloir la dompter, de s'y fondre, mais pas trop, car la nature n'a pas besoin de l'homme pour renouveler son cycle de vie, immuable, violent parfois, et toujours aussi beau.
Un jolie découverte poétique et sauvage.
https://domiclire.wordpress.com/2024/06/20/border-la-bete-lune-vuillemin/
L’auteure, dès le début du roman, nous plonge dans la réalité âpre de la nature sauvage de ce coin du Canada. Nous assistons au sauvetage d’une orignale enlisée dans un lac. La narratrice, qui se joint aux sauveteurs, décide de rester dans leur refuge qui a pour mission de soigner les animaux sauvages malades ou blessés.
Secondée par Jeff, Arden, est une femme qui garde ses mystères et qui fascine l’héroïne. Elles ont comme point commun leurs fêlures intimes et la rupture avec leur famille. Le travail est rude et le contact avec les animaux complexe, mais la narratrice se passionne pour cette vie au contact d’une nature sauvage et rude, à l’écart de la civilisation.
« J’ai peur de rester dans un endroit si calme mais l’odeur animale me retient. Les mains d’Arden aussi. Je ne le sais pas encore, mais ses doigts qui sentent la cannelle et l’écorce seront ce que je retiendrai d’elle. »
En même temps que cette nature rude et énigmatique, l’héroïne devra apprivoiser Jeff et Arden, personnages à l’unisson de leur environnement. A leur contact, la jeune femme va apprendre à décrypter les messages de la faune sauvage, de la forêt et de l’imprévisible rivière Babine. Cette nature qui n’a pas été domptée par l’homme peut se montrer hostile, voire cruelle. Mais l’homme l’est aussi quand il pose des pièges qui mutilent les animaux. Ce sont ces bêtes, victimes de la cruauté des hommes, que Arden et Jeff s’efforcent de sauver.
L’héroïne se raconte, elle parle de ce deuil qui n’en finit pas de l’accompagner, elle explore ses émotions, amour, colère, et ses cauchemars, le tout à travers le prisme de la nature qui est personnifiée.
Après la narratrice, c’est cette nature omniprésente et vivante qui est le personnage principal de ce roman. Elle est partout, tout le temps, il faut compter avec elle, suivre les saisons, accueillir le vivant mais accepter aussi la mort qui fait partie du grand cycle de la nature.
Et, pour nous faire sentir cette sauvagerie, pour qu’on sente ses aspérités, sa rudesse mais aussi sa résilience, l’autrice utilise une écriture au grand pouvoir évocateur, une poésie sensuelle qui peut être mordante, emportée et délurée. Le mystère se mêle à la vie, chamanisme, rites, vestiges païens.
Au printemps, c’est la débâcle et tout change très vite.
« Babine aussi change. Elle change de couleur chaque jour. Sa voix mue. Plus assurée et tonitruante, chanteuse d’opéra, gorge déployée, langue musclée, inarrêtable. Cette nuit, elle est sortie de son lit, ravissante mais ingrate »
Plus que l’intrigue, j’ai aimé la description de la nature, précise, intense, abrupte, avec une voix singulière, poétique et inventive. Il y a une vraie pulsion créative qui donne sa force au texte et qui ne peut laisser insensible.
" Jeff dit que le matin, la forêt raconte des histoires du bout des lèvres et que le soir, elle chante de sa voix de tête. Et la nuit ? Il refuse de sortir la nuit. Il dit que l'humain colonise déjà assez l'espace sauvage ou ce qu'il en reste. La forêt a aussi besoin de notre absence. [...] Qu'est-ce qui se tait quand nous sommes là ?"
Une jeune fille endeuillée, cabossée rencontre deux êtres qui ne le sont pas moins, alors qu'ils essaient de sauver une orignale. Elle décide de stopper sa fuite en avant et de s'investir à leurs cotés dans leur refuge pour animaux sauvages. Elle ne le sait pas encore mais au sein d'une forêt profonde et vivante, avec la rivière chantante Babine, au fil des saisons elle va vivre une expérience extraordinaire qui va l'aider à se reconstruire, à "combler les interstices"...
Un roman que l'on peut qualifier de nature writing mais que j'ai trouvé tellement plus riche que tous ceux que j'ai pu lire jusqu'alors. Lune Vuillemin d'une plume douce et poétique emporte son lecteur d'une façon sensorielle inédite et puissante, lui donnant à ressentir le Vivant avec un vocabulaire précis, riche, d'une finesse inouïe...
"Il nous faudrait, en fait , inventer un dialecte du territoire, former un nouveau dictionnaire de cette chose mouvante, changeante et tenace qu'est la nature."
Merci à Lecteurs.com pour ce livre gagné à un concours.
Personnification:
Ce roman est singulier par son écriture. On suit la vision de la narratrice qui décrit, ressent, vibre au contact de la nature et des animaux. La nature est totalement personnifiée, semble vivante, notre égale. Cette poésie et ce renversement de perpective sur notre environnement déroute au début. Avec ces références au bruit, souffle, aux descriptions minutieuses qui font écho aux sentiments de la narratrice. Outre ce fil rouge d'une faune et flore vivante, réelle, personnage à part entière du récit qui est souvent le reflet des ombres, des souvenirs et des épreuves du personnage principal, notre narratrice côtoie 2 personnages singuliers. Arden la taiseuse, à l' allure particulière et Frank qui explique, se prête au jeu de decrire les bruits de la nature pour en faire un herbier sonore.
A la fois réflexion sur la cruauté intrinsèque de la nature avec la scène de l'orignale du début, de celle des hommes vis à vis de la nature avec les castors. Le roman est aussi une quête de redemption, de réparation au contact du froid, des arbres, des animaux sauvages qu'on nourrit, protège, soigne. Le roman a une dimension très sensorielle, olfactive, s' attache à dire le monde à travers les gestes, bruits, lumière et le quotidien des personnages. Parfois on a l'impression d être dans un tableau, un songe, j 'ai aimé ce côte visuel, l'etrangeté au départ des personnages qui se dévoilent au fil des pages comme les animaux et la nature qu'on apprivoise. On s'habitue à cette langue visuelle et basée sur les cinq sens, aux personnages. On les observe évoluer, leurs sentiments, leurs secrets revelés. La manière de decrire et donner une place à la nature m a fait penser à la litterature quebecoise de Michel Jean, Filteau Chiba ou Guay Poliquin. J' ai aimé aussi la sensualité du roman et les liens entre les personnages. Jusqu'au bout, l'auteure tient sa promesse et fait de ce récit un livre à part. Une très belle découverte que ce roman.
Une femme assiste au sauvetage d’un orignal. Elle a l’air perdue et demande si elle peut rester au refuge avec Arden et Jeff. Petit à petit, elle dévoile sa vie avant d’arriver dans cette forêt du Canada. Des crises d’angoisses surgissent régulièrement. Elle sent une boule de tourbe dans sa gorge. Petit à petit, elle semble se reconstruire auprès d’Arden, la femme aux doigts-araignées, pour qui le désir est omniprésent. Jeff, l’homme à l’œil de verre, lui apprend à s’occuper des animaux. Elle fait des rêves étranges. Des coccinelles peuplent l’intérieur de la maison d’Arden.
Ce roman est très poétique. La nature y est un personnage à part entière. D’ailleurs la rivière Babine est souvent nommée comme s’il s’agissait d’une personne. J’ai trouvé le début très prometteur puis je me suis perdue dans les songes du personnage principal. L’évocation de la nature est magnifique. J’ai beaucoup aimé l’écriture, mais ce n’est pas un livre que je défendrai pour faire partie des 5 finalistes du Prix Orange du Livre 2024.
Une jeune femme quitte ses plaines natales pour rejoindre l'océan où elle dispersera les cendres de son père d'adoption.
En chemin, elle fait la connaissance d'Arden, la femme aux doigts araignées.
Aidée de Jeff, celle-ci tient un refuge pour animaux sauvages blessés.
Dans ce grand froid canadien, la jeune femme décide de rester et de s'installer au refuge.
Quel livre magnifique.
La magie de la nature liée à la magie de l'écriture forment une roman somptueux.
Les arbres, la rivière, les animaux, les personnages, la glace, la neige....... toute une harmonie qui vit en osmose.
Le style est très personnel et d'une rare beauté.
On y sent l'amour de la nature et toute la poésie des âmes qui se rencontrent.
La rivière et le gros chêne parlent réellement, mais les mots semblent insuffisants pour traduire leur langage.
Il faut commencer un herbier sonore.
L'auteure crée une écriture rare comme on en rencontre peu souvent
Rien de commun, rien de fade, je me répète, tout est magie.
Lune Vuillemin est jeune, belle et surtout incroyablement talentueuse.
Dès les premières pages, il y a la rencontre avec Arden et Jeff – cette grande femme aux mains d’araignée et cet homme à l’œil de verre –, alors qu’ils tentent de sauver une orignale sur les berges d’un lac gelé du Canada. Émue par cette rencontre, la narratrice décide de les suivre et de rester avec eux dans le refuge, soignant avec eux les animaux blessés. Début d’une immersion dans la pure sensation du vivant où humains et non-humains cohabitent. La narratrice au lourd passé, dont on ne connaîtra jamais le prénom, va chercher à apprivoiser ses fêlures tout en partageant celles de ses nouveaux amis. Au contact de Jeff et Arden elle va écouter les sons de la forêt et les murmures de la rivière Babine, tentant de les interpréter.
Apprendre à voir, à entendre, à ressentir, c’est aussi nommer. Le vocabulaire décrivant la nature, faune et flore, est riche, jamais lassant – noms d’oiseaux, d’arbres, termes précis adaptés au territoire – mais est exposée ici l’idée novatrice que les mots actuels ne sont pas suffisant pour décrire la nature, qu’il faut « ...inventer un dialecte du territoire, former un nouveau dictionnaire de cette chose mouvante, changeante et tenace qu’est la nature. »
Le style m’a plu avec ses métaphores et la personnification continuelle de la nature, incluant l’invisible. Les dialogues sont magnifiques, construits comme si la narratrice s’effaçait pour donner la parole et n’être plus qu’écoute, que ce soit lorsque Jeff lui raconte comment il a connu Arden ou encore quand elle entre en contact avec la foret et la rivière. On a une recherche d’un langage du vrai opposé au langage manipulateur visant à prendre l’ascendant quitte à tordre les mots.
« Jeff ajoute que si on fabrique un dictionnaire pour aller au-delà de la description d’un paysage comme image figée, il faut aussi faire émerger des termes pour les humains, les traces qu’on laisse derrière nous, nos odeurs, perçues par des dizaines d’êtres différents sans qu’on le sache, ou encore la violence qui émane de nous. »
La méditation, le rêve prennent une énorme place, favorisant la résilience, le besoin de paix. L’héroïne est dans la recherche d’une voie pour faire taire ses démons. Elle souhaite laisser partir hors d’elle les images de son ami Franck mort sous ses yeux avant qu’elle entreprenne ce voyage. Elle décrit des sensations intimes de la lutte, tout au long du récit, avec « la lumière ambrée et contre la boule de tourbe au fond de la gorge ». Les personnages, cabossés par la vie, conservent ensemble une force impressionnante, gardent l'espoir au cœur et l’élan des bonheurs d'amour.
J’ai aimé la poésie du texte, rarement un récit n’aura si bien intégré l’homme dans un tout rassemblant l’eau, la terre, les animaux, les arbres… Cela va loin parfois dans un style qui prend des risques avec la norme permettant alors de questionner, de bousculer, de créer…
La nature est un mystère à percer. La démarche est spirituelle, avec une intériorité, une prise de conscience de la souffrance animale, le besoin de réconcilier ce lien qui a été coupé ! L’autrice force le trait, utilisant une écriture envoûtante. La rivière Babine est comme un monstre, voire un dieu païen dangereux. On entre avec la narratrice dans une démarche quasi chamanique, modifiant l’état de conscience.
C’est un très beau roman. Il a du souffle, on sent la jeunesse, l’exaltation, la générosité de Lune Vuillemin (quel prénom approprié !). A-t-elle puisé dans la mythologie autochtone canadienne pour écrire son roman ? Ni soumission à un dieu, au séculaire religieux mais retour à l’incroyable foisonnement de la vie sur terre.
Lune Vuillemin capte le paysage des grands espaces glacés de la forêt canadienne et d’ espaces intérieurs dévastés. Elle possède un talent incroyable pour rendre vivant l’environnement de ces forêts glacées qu’elle connaît, elle qui a suivi des études d’arts avant de partir deux ans au Canada, à proximité du monde sauvage et dans une expérience propice aux rencontres. Elle ne se cache pas derrière les mots. Ce talent et cette sincérité méritent d’être remarqués. Il s’agit de son deuxième roman après Quelque chose de la poussière (2019).
A signaler, la très belle édition réalisée par La Contre Allée précisant que cet ouvrage a été composé en minion pro 10,5 pts sur un papier Clairefontaine bouffant 80 g. La superbe couverture est réalisée sur un papier de création, le Kingdom laid vergé 220 g. Ce soucis de la perfection ajoute au plaisir de lecture, la liseuse (pratique quelquefois) faisant un peu office de fast-food face à la haute gastronomie de la belle édition... Un tel objet participe à l’art de la littérature et a encore beaucoup d’avenir, je n’en doute pas !
J’ai lu ce roman dans le cadre de ma participation au jury Orange du livre 2024. C’est un des 20 livres de la première sélection établie lors des échanges et votes du 26 mars. Sera-t-il dans la sélection des 5 finalistes le 13 mai prochain ? En attendant cette échéance, lisez-le,
Je suis souvent plus attirée par une histoire que par un style, et pourtant cela a été l’inverse avec « Border la bête ».
La narratrice, touchée par la mort d’un homme qui a été très important pour elle, voyage marquée par le deuil lorsqu’elle rencontre par hasard Jeff et Arden, qui tentent de sauver un orignal. Lui a un œil de verre, elle est une grande femme aux mains étranges. La jeune voyageuse décide de rester auprès d’eux, qui mènent une vie libre, au contact de la nature, et qui se consacrent aux animaux.
Tous les trois ont un passé trouble et douloureux qu’ils tentent de conjurer. Au contact de la nature, qui peut être aussi belle que mortifère, mais aussi grâce à une histoire d’amour, la jeune femme tente de se reconstruire.
L’écriture de Lune Vuillemin est magnifique. L’autrice a un réel talent pour créer une ambiance à la fois sauvage et enveloppante et pour ancrer cette histoire dans une tradition de nature writing. Il y a quelque chose de brut, de féral dans ce récit qui oscille entre beauté et souffrance, lumière et obscurité.
La langue est travaillée sans qu’elle n’apparaisse pesante, elle est juste adaptée, dans sa sensualité, sa poésie et sa rugosité, à ce qui nous est raconté.
Un très beau roman et une très belle surprise !
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