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Il aura fallu une petite semaine, à l'occasion de l'insurrection démocratique de Dresde en mai 1849, pour que Richard Wagner, dont la carrière de compositeur officiel commençait juste à décoller, envoie promener ses ambitions et se jette à corps perdu dans la bataille révolutionnaire. Ses amis, qu'il côtoie à l'époque sur les barricades, s'appellent alors Michel Bakounine ou August Rockel. Contrairement à ces derniers - qui seront capturés et condamnés à mort - Wagner parvient à fuir après la défaite, traqué par toutes les polices d'Allemagne. Avant, pendant et après l'échec de la Révolution saxonne, sa pensée politique, parfois radicale quoique souvent confuse et sinueuse, se sera exprimée dans un certain nombre d'articles, de libelles, de pamphlets largement oubliés dont l'Art et la Révolution (1849) constitue certainement l'un des exemples les plus aboutis. Wagner y prononce - au nom d'un Art idéal, social et unificateur droit issu de la Grèce antique - une sentence de mort implacable contre la vieille société bourgeoise, contre sa division du Travail, son amour de l'Argent corrupteur, sa repoussante médiocrité. Étrange destinée que celle de cet homme, promu des décennies plus tard l'idole de cette oligarchie auparavant tant abhorrée, sinon l'inspirateur de sa fraction la plus réactionnaire et obscurantiste. C'est cette contradiction vivante, exceptionnelle, au sein d'une même trajectoire artistique qui se trouve aujourd'hui présentée au lecteur.
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