La revue de presse livres vous dit tout ce qu’il faut savoir — et emporter — avant l’été !
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La Revue de Presse littéraire de mars 2016
Voilà un livre qui n'a laissé personne indifférent. Il y a ceux qui en ont abandonné la lecture, ceux qui ont eu le courage d'aller jusqu'au bout comme s'ils avaient réalisé un exploit sportif (le livre est imposant) et enfin ceux dont je fus ("Femmes" fut publié dans les années 80) qui n'en sortirent pas indemnes, marqués pour la vie par un auteur hors catégorie.
Philippe, on vous aime (vous le saviez) comme un auteur de génie, un libre penseur, un libertaire, un libertin, un amoureux des arts, de la Renaissance, du XVIII°, de Casanova, de Venise, de la Fenice, de New-York, de Florence et des femmes.
« Contrairement aux apparences, je suis plutôt un homme sauvage, fleurs, papillons, arbres, îles. »
Ainsi débute cette autobiographie souriante et érudite. Sollers, agent secret d’un genre très spécial, nous dévoile son enfance, ses amours et ses amitiés avec des écrivains.
Dans ce monde de mensonges, Sollers tient à garder une certaine clandestinité., mais le ton est léger, spirituel et intime. Mais sans doute ne dit-il pas tout. Souvent passionné, parfois poseur, on sent qu’il prend plaisir à l’exercice de l’autobiographie.
Enfance heureuse dans la bourgeoisie bordelaise, auprès d’une mère aimante et drôle et d’un père charmant.
Philippe Joyaux choisit le pseudonyme de Sollers lorsqu’il publie son premier livre alors qu’il n’est pas encore majeur.
De ses amours, on retiendra Dominique Rollin, écrivaine avec laquelle il entretient une longue correspondance. Puis ce sera son mariage avec Julia Kristeva.
Avec Dominique, il partage sa passion pour Venise. Avec Julia, il aura un fil, un enfant différent, « cet innocent qu’il aime ». L’évocation de son fils est émouvante.
Ses nombreuses amitiés qu’il évoque avec sincérité m’ont touchées. Il nous régale d’anecdotes sur Malraux, Ponge, Barthes, Bataille ou encore Breton.
Ici et là, quelques photos parsèment cette vie bien remplie
Philippe Sollers, dans son grand âge, se retourne sur sa vie et partage ses bonheurs avec le lecteur. Parmi tous ses souvenirs, ces citations, ces lettres, on s’y perd un peu parfois, mais on finit par arriver à bon port, avec la vision de l’auteur sur « ce monde coupable ».
Philippe Sollers présente "L'étoiles des amants" comme une musique (p. 165), le nom d'un lieu symbolique : un bateau des plaisirs charnels (p.162) à l'image de Cléopâtre et d'Antoine et de bien d'autres. Les étoiles désignent aussi les quelques femmes intéressantes à ses yeux c'est-à-dire celles capables de le faire jouir sans lui prendre la tête :"Je repense à elle ["la ravissante grosse poissonnière" / sic page juste avant], dans le soir doré, en mangeant une daurade au sel avec Maud. A elle, et à bien d'autres, lumières et libertés du coeur. Etoiles dans l'immense nuit conformiste" (p.110).
Les femmes en prennent pour leur grade dans un paradoxe qui ne semble aucunement gêner l'auteur : il a besoin des femmes et de leurs énergies sexuelles mais elles sont d'un ennui mortel car "on doit compter avec le poids des milliards de femmes frigides utilisées pendant des millénaires pour la reproduction de l'espèce, et avec celui des milliards de névroses, de psychoses et de perversions qui ont proliféré tout autour" (p. 149). Cette citation est douce comparée à la charge qu'il met parfois dans ce livre pour se plaindre d'elles en mode litanie et kyrielles d'adjectifs méprisants.
L'amour serait pour lui fugace car "toute existence est une offense à l'autre, chacun veut plus ou moins la mort de l'autre, mais voilà, je te pardonne d'exister, je t'aime. Et toi, aime-moi, c'est-à-dire pardonne-moi d'exister. Mieux : je te remercie d'exister" (p. 161).
Il est bien sûr l'écrivain inspiré et inspirant, le poète (sic), le fou incompris voire rejeté de la société moralisatrice, alors qu'il est un jouisseur incomparable, initié aux grands secrets des bordels et autres joies (le protagoniste rencontre Maud lors d'une soirée codée pour coucherie si j'ai bien compris) et que ce livre, que nous tenons dans nos mains, est "un livre entier sur la jouissance d'exister" (p.53) que les bégueules ne comprendront pas bien évidemment. Cerise sur le gâteau : l'auto-compliment et l'auto-citation étalés à la queue leu leu (cette expression doit lui plaire. A non, pardon, il n'aime pas non plus l'homosexualité au vu du livre) jusqu'à l'écœurement de la lassitude.
Et j'oublie tous les possibles jeux de mots qu'il aurait semé dans ce livre que seuls les initiés ou les personnes aptes à jouir pourront décoder là où d'autres les jetterons au chien comme des crétins (c'est aussi quelque part dans le livre).
Ce livre est pénible en plus d'être méprisant.
Un très court texte qui aura probablement été écourté du fait de l’échéance très proche de la mort. Sollers reste Sollers dans ses digressions, ses envolées sur l’actualité, ses coups de gueule, ses appréciations sur la vie d’aujourd’hui et certains extrêmes, de la difficulté d’être un homme aujourd’hui pouvant donner lieu à un apparent machisme.
Ce n’est pas un témoignage, juste quelques soubresauts ; encore et toujours la pensée en action. Et même si ces quelques pages peuvent paraitre un peu fouillis (… comme la vie) ; elles sont (probablement) comme les pensées lorsque la camarde arrive et qu’on sait qu’elle est là.
Et comme précise Sollers :
« La première vie est contradictoire, la Deuxième nucléaire, à cause de l'atomisation du temps. La première vie est très romanesque, elle a des milliers de choses à raconter. La Deuxième Vie se tait, elle a appris que la pensée est un acte.
Chez certains écrivains, la Deuxième Vie et toujours en vue dans la première, mais peu en ont conscience, a moins d'une initiation. » p 21
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