"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Ce roman du terroir est un chant magnifique à la mémoire d'un peuple décimé par la première guerre mondiale : les cimbres qui habitaient au sud des dolomites, les monts de la veneties. Une région frontalière où les italiens et les autrichiens vont se battre âprement et massacrer à coup de canon le paysage et les villages isolés pendant la première guerre mondiale.
Ce conte est un hymne à la montagne où la vie est rude. Les hommes y sont taiseux et solidaires. Personne ne dénonce Tonle quand les carabiniers le recherchent pour le mettre 4 ans en prison. Chacun pense à lui quand les tranches de polenta chauffent sur la braise et que la fête du village bat son plein.
C'est un récit de montagne qui redonne vie aux traditions perdues : les feux de février pour appeler le printemps, la soupe aux tripes mangée à la foire et même les alouettes calandres au dessus des cultures en terrasse soleilleuses qui annoncent le temps de la contrebande, .
C'est enfin un cri contre l'absurdité et l'abomination de la guerre. Les frontières sont un argument décisif pour justifier un conflit sanglant. La vie de Tonle en démontre toute la fatuité.
Le texte est d'une rare beauté. L'auteur, célèbre en Italie, écrit des phrases d'une grande poésie sur la beauté de la nature à chaque saison. Un grand bol d'humanité. L'avez-vous lu ?
J'ai la chance de vivre cette semaine en Italie. Cette lecture s'imposait
Un recueil de la guerre, la détention et tous les malheurs et atrocités vécu par un soldat sur le chemin du retour dans son village natal dans la montagne. Écrire pour ne pas oublier, une très belle œuvre
Le plateau d’Asiago, situé sur les Préalpes de Vénétie, entre Vicence et Trente, est un lieu de mémoire un peu particulier. Au Moyen Age vient s’y installer une minorité ethnique d’origine bavaroise, les Cimbres. D'abord reconnue culturellement autonome par la République de Venise, cette communauté est englobée en 1815 dans le royaume lombard-vénitien, vassal de l’Empire d’Autriche, et, considérée à tort comme pro-allemande pendant la première guerre mondiale – cette petite partie des Alpes est en l’occurrence totalement dévastée en 1916 par la plus grande bataille de montagne de l’Histoire –, fait ensuite les frais de la politique d’italianisation menée par les fascistes. Ainsi s’éteint alors quasiment la langue cimbre, un isolat comme l’est le basque dans les Pyrénées.
C’est en ces lieux au passé si singulier que naît et vit Mario Rigoni Stern. Lui qui grandit dans les ruines de la Grande Guerre se passionne pour les Alpins, dans lesquels il s’engage en 1938. Fait prisonnier par les Allemands, il s’évade, rentre à pied à Asiago et, quelque vingt ans plus tard, se lance dans l’écriture de ce qu’il considérera toujours modestement comme une œuvre mémorialiste, mais qui le classera parmi les auteurs classiques de la littérature contemporaine italienne. Premier volet d’une trilogie, Histoire de Tönle se nourrit de souvenirs rapportés ou vécus, faisant avec nostalgie la part belle à sa montagne d’origine, à la vie rude, pauvre, mais libre, des paysans et bergers habitués à n’y connaître ni maîtres ni frontières, jusqu’à ce que, ne laissant qu’une terre ravagée et pour longtemps inhabitable, la guerre ne vienne en sonner définitivement le glas.
Berger, Tönle mène, en cette seconde moitié du XIXe siècle et comme, avant lui, tant de générations, l’existence rythmée par les saisons, par les travaux agricoles et par les traditions de son village. Pour joindre les deux bouts, mais aussi peut-être un peu parce que cette montagne à la frontière du royaume d'Italie et de l'Empire austro-hongrois appelle à l’aventure, il se fait contrebandier, colporteur, et sillonnant à pied toute l’Europe Centrale, exerce les mille métiers – soldat, mineur, jardinier, gardien de chevaux... – que ses boucles itinérantes mettent sur sa route avant de toujours le ramener auprès des siens et de ses moutons, sur ces alpages ailleurs desquels il ne saurait vivre longtemps. Lorsqu'en 1914 la guerre éclate et commence par lui rogner les ailes en le confinant du côté italien, il ne se doute pas encore qu'en plein sur la ligne de front, il ne restera bientôt plus grand chose des villages bombardés du plateau d'Asiago. Refusant de se joindre à la population déplacée, il restera le plus longtemps possible auprès de son troupeau, avant de connaître un sort fortement calqué sur celui de l’auteur lors du conflit suivant, mais à la conclusion immensément plus tragique. La guerre ne se contente pas de tuer et de détruire : elle accélère aussi les mutations de la société, tournant définitivement certaines pages. Sur le plateau d’Asiago si longtemps préservé, c’est le chant du cygne d’un mode de vie et d'une identité culturelle ancestrale qui mène au désespoir le vieux Tönle…
La narration sans fioritures de Mario Rigoni Stern redonne vie à ces hommes et à ces femmes d’un autre siècle avec un réalisme et une authenticité sans défaut. L’on pense à Frison-Roche pour un certain nombre de points communs entre les deux hommes et leur œuvre. Quand, entre deux récits de montagne et d’aventure saharienne, l’écrivain français nous conte la sédentarisation forcée des Lapons, au même moment de l’autre côté des Alpes, l’auteur italien s‘attache à la mémoire du tout petit peuple cimbre, partageant, au fil de son écriture habitée et au travers d’un personnage clairement son alter ego, la nostalgie d’un homme épris de nature et de liberté pour qui la modernité fait figure de prison. Une bien belle redécouverte que nous permettent les éditions Gallmeister avec cette toute nouvelle traduction.
Une histoire qui se termine à la fin de la seconde guerre mondiale.
C’est celle du berger Tönle et ça se passe sur le plateau d’Asiago, à la frontière de l’Italie et de l’empire austro-hongrois.
Tönle a mené une vie de contrebandier, revenant régulièrement auprès de sa femme et de ses enfants.
Une vie rude et harassante, au milieu des conflits entre pays.
Dépaysement total dans les rudes montagnes, sur fond de guerre et de débrouille.
Même s’il ne fut pas tout rose, ce fut un beau voyage dans le passé en compagnie de Tönle.
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