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Encore un de ces livres frustrants, parce que l’on adorerait les adorer, mais qu’ils nous perdent en route…
Mais essayons de prendre les choses dans l’ordre. Il s’agit d’un bon pavé (612 pages), suivi de près de 40 pages de postface, d’un glossaire, d’une sérieuse bibliographie. Au total, un « appareil critique », pratiquement, comme diraient les scientifiques, de plus de 70 pages qui accompagne le texte du roman. Cela fait beaucoup, et même, si j’osais, cela fait trop !
D’abord parce qu’en réalité, on a l’impression que l’auteur n’a pas voulu choisir entre les différentes pistes qui s’offraient à lui. Et il l’explique tellement bien dans le premier texte qui suit le roman, intitulé « Témoignage »; dans lequel Jean Octeau indique avoir vécu avec ces personnages depuis plus de 12 ans… Mais, en tant que lecteur, je vois en réalité au moins quatre histoires qui auraient pu être écrites, quasi-indépendantes. Et je vais les distinguer dans mon avis.
La première histoire, qui correspond pour l’essentiel aux 250 premières pages, est centrée sur l’histoire d’amour de Karl et Esther, dans laquelle intervient également la « régulière » de Karl à Berlin, Janina. Cette partie là de l’histoire m’a assez fortement agacée, je dois l’avouer. Karl est amoureux d’Esther depuis qu’il l’a vu apparaître au virage d’une route slovaque, dans sa chemise mouillée. Il l’aime, il est payé de retour, mais elle revendique sa liberté. Alors Karl ne fait pas de choix : après l’avoir un temps accompagné à Berlin, elle retourne en Slovaquie, avec un médecin lui aussi amoureux d’elle. Du coup Karl rencontre Janina, qui accepte une sorte de ménage à trois, en se faisant la voix d’Esther – c’est par elle que transitent les nouvelles. Mais Karl ne semble pas se préoccuper de savoir si ce choix convient à Esther, ni à Janina. Et, surtout, il ne veut pas se demander s’il lui convient à lui. Bref, pas ma tasse de thé.
Une deuxième intrigue vient se nouer. Les nazis razzient les musées européens, l’histoire est assez bien connue, Goering amasse dans son château, et pilote un réseau d’informateurs et de voleurs dans toute l’Europe… Que peuvent faire les milieux artistiques en Allemagne pour limiter la catastrophe ? Est-ce bien de plier un peu l’échine pour sauver ce qui peut l’être ? Cette partie là constitue l’essentiel du livre, en gros de la page 250 à la page 350. C’est historiquement intéressant, n’étant pas spécialiste de cette période, l’angle m’a semblé très pertinent. Mais on reste un peu sur sa faim, parce que ce dilemme n’est pas totalement creusé.
Une troisième intrigue serpente dans le livre, autour de ce que font Esther et Janina, ainsi que Karl, pour protéger, comme ils le peuvent, les juifs qui les entourent. La pression augmente, au fil des événements. Et chacun se retrouve confronté à un choix : non seulement celui de s’engager, mais celui de savoir jusqu’où l’on va s’engager. Et, pour certains, se pose la question du départ. Karl, lui, fait longtemps le choix de rester, quitte à ce que cela s’accompagne d’une forme de compromission.
Enfin, une quatrième trame apparaît, à la fin du livre, alors que la guerre est finie. Karl est devenu un réfugié, il n’a plus d’argent, presque plus de perspectives, il a pratiquement tout perdu. Il espère retrouver Esther. Et il hante Vienne. Et là, il croise un groupe composé notamment de déportés revenus des camps. Et on assiste à ce spectacle affreux de ces personnes qui ont survécu, mais qui ne s’en remettent pas, ou si difficilement. Il y a une sorte d’errance dans la Vienne de l’immédiat après-guerre, où tout est difficile… surtout d’apprendre à revivre.
Chacun de ces sujets est intéressant en soi. Mais ils ont du mal à trouver leur place dans ce livre, à s’articuler. On a l’impression que l’auteur n’a pas voulu, su, osé… que sais-je… choisir. Et qu’il se fait promener par ses personnages. Du coup, je regrette presque que ce livre n’ait pas été en réalité découpé en trois ou quatre livres différents.
En fait, le passage le plus émouvant n’est pas dans le livre, mais dans le « Témoignage » qui suit immédiatement sa fin. L’auteur, là, se livre sur la relation qu’il a entretenu avec ses personnages, et, là, il m’a touché. Vraiment. Le souffle que je n’ai pas trouvé dans les 612 pages qui précédaient, je l’ai trouvé là. Du coup, je reste avec l’impression que ce jeune auteur – il s’agit d’un premier roman – de 88 ans a voulu trop en mettre…
Et je ne vous parle même pas de ma frustration. En effet, à plusieurs moments, on est mis en appétit, mais paf ! Une ellipse nous prive du développement qu’aurait pu mériter un sujet. Ainsi, juste un exemple : pages 412-413, on trouve l’extrait suivant :
« Notre action n’aurait pu continuer en vas clos, il nous manquait un certain savoir-faire dans l’art des faux papiers. Les communistes étant débordés, nous étions en rapport avec de mystérieuses entités qui j’imaginais sous forme de puissants réseaux alors qu’il s’agissait le plus souvent de cellules aussi petites que la nôtre. Sans le journal de Ruth Andreas-Friedriech, publié juste après la guerre, je n’aurais jamais su qui se cachait derrière le groupe « Onkel Emil » à Steglitz ».
J’étais là, haletant. Je m’attendais à un développement, bref peut être, mais tout de même, sur ce qu’est ce groupe « Onkel Emil », qui n’est évoqué nulle part dans le livre, ni avant, ni après. Mais non. L’auteur a fait preuve d’érudition, il mobilise tout ce qu’il a pu apprendre en 12 ans de recherches sur le sujet. Mais je ne saurai jamais, sauf à aller creuser par moi-même, ce qu’est ce groupe. Je ne vais pas avoir le temps de lire le journal de Ruth Andreas-Friedriech. Et je reste donc là avec ma frustration.
À la fin du livre, je pense avoir compris pourquoi il y a maldonne. En fait, l’auteur le montre bien dans son traitement du glossaire (regroupé à la fin du livre, un traitement qui ne facilite pas la lecture, et que l’on retrouve souvent dans les ouvrages érudits) et en donnant des pages et des pages de bibliographie. Il a fait œuvre d’historien, et non de romancier. Ce livre est une ouverture sur des mois ou des années de recherche, pour ceux que les sujets abordés intéressent. Mais ce n’est pas dans cette optique que j’ai lu ce livre… Je lisais un essai en croyant lire un roman. J’attendais d’être emporté par un souffle épique alors que c’était un document circonstancié, mais à compléter, qui m’était offert. Alors je ne peux pas dire que ce n’était pas intéressant. Mais ce n’est pas ce que j’attendais…
Tout d'abord j'ai cru à un gag. "Jean Octeau" ? Orphée serait revenu des Enfers en perdant son initiale ? Ensuite j'ai cru à une erreur d'impression. "Né en 1928" ? J'avais tout faux ! Jean Octeau a bien publié ce premier roman à 88 ans après l'avoir mûri pendant douze ans ! Forcément cela inspire un certain respect pour cette première oeuvre, qui ne fait pas partie de la "sélection officielle" des 68 premières fois mais qui voyage malgré tout...
A vrai dire, j'ai eu un peu de mal à me passionner pour cette histoire qui s'étale sur plus de vingt ans et qui englobe la montée du nazisme, la seconde guerre mondiale et le début de la reconstruction des pays comme des êtres. Le point de vue adopté est celui de Karl Schuster, critique d'art d'origine roumaine, qui vit entre Vienne et Berlin, est amené à voyager à travers l'Europe en guerre et à "limiter les dégâts" au risque de se compromettre avec les nazis. Esther et Janina, les femmes qu'il rencontre et avec lesquelles il vit de grandes histoires d'amour, se mettent au service des plus menacés et résistent chacune à leur manière. En protégeant Sarah-Léna et en essayant de lui rendre un souffle vital, à la fin de la guerre, Karl cherche une sorte de rédemption, lui qui n'a pu sauver celles qu'il aimait.
Le souffle... voilà probablement ce qui me semble manquer à ce long, trop long roman. La passion entre Esther et Karl, le danger permanent qui menace les personnages, les alliances pernicieuses à nouer avec les nazis, tout est raconté de manière neutre, sans envolées romanesques, sans que l'on sente véritablement le nerf et les tensions qui devraient irriguer cette histoire. Seule le dernier quart du livre prend une dimension plus vibrante, avec l'évocation du courage des femmes de Berlin et avec le lent retour à la vie de Léna et laisse entrevoir ce qu'aurait pu être ce premier roman, tiraillé entre le besoin d'être exhaustif d'un point de vue documentaire et empoignant d'un point de vue dramatique.
Bon, je m'y risque même si c'est un très mauvais jeu de mots, mais les tilleuls auraient eu grand besoin d'être élagués !
Le roman d’une vie. À plus de 80 ans, Jean Octeau fait paraître son premier roman. Fruit de longues recherches, accompagné d’une bibliographie impressionnante, de notices biographiques et d’un lexique, cet épais volume se lit toutefois sans peine. Car l’auteur a trouvé l’angle idéal pour faire revivre un épisode trop peu exploré de la Seconde Guerre mondiale : le trafic à grande échelle des œuvres d’art.
Il aura aussi trouvé le narrateur idéal en la personne de Karl Schuster, un jeune Roumain qui, dans l’Europe des années folles, donne des conférences dans les musées et commente avec verve autant que par goût de la provocation les œuvres accrochées aux cimaises.
Au début du livre, il quitte Berlin pour retrouver ses parents dans sa Transylvanie natale. Un voyage lui permettant d’évoquer sa jeunesse, d’esquisser le portrait de ses père et mère et de rencontrer Esther, une jeune fille dont il tombe quasi instantanément amoureux.
Seulement voilà, à l’époque de la crise de 1929 et de la montée des périls, s’engager une histoire d’amour dans un pays qui fait l’objet de convoitises, avec une juive de surcroît, n’est pas une sinécure.
Au fur et à mesure que le parti national-socialiste installe son discours nauséabond et que les exactions anti-juives prennent de l’ampleur, Karl va devoir louvoyer pour continuer à voyager à travers l’Europe tout en essayant de protéger Esther.
Avec l’aplomb de sa jeunesse et l’idéalisme qui mène son combat, il va même parvenir à mener double jeu pendant la Seconde Guerre mondiale. Parmi les rencontres qui vont l’aider, une autre femme va jouer un rôle déterminant : Janina.
Fouillant les dossiers, recoupant les informations et secouant son protégé, elle va jouer le rôle alors assez répandu d’agent double, et offrir à Karl les renseignements lui permettant de pister les tableaux volés. Un sorte de Monuments Men à lui tout seul.
Mais là où le film de George Clooney adapte la réalité à la sauce hollywoodienne, Jean Octeau fait œuvre d’historien et replace le combat pour les œuvres d’art dans le vrai contexte. S’il confirme le rôle de Rose Valland, cette employée du musée parisien du Jeu de Paume qui a tenu au péril de sa vie le registre des œuvres volées en France, et qu’il rencontre à Paris, il ne fait pas grand cas des autres protagonistes.
En revanche, sa visite dans la mine proche du lac d’Altaussee lui apportera l’éclatante confirmation que son combat n’aura pas été vain. Des découvertes qui sont pourtant loin de le sauver. Quand la tenaille se resserre, il comprend que d’une part l’armée soviétique ne lui fera pas de cadeaux, que son père qui fournissait l’armée allemande en vin, et sa famille sont également menacés. De l’autre côté, les alliés le suspecteront également d’être à la solde des nazis. Il lui faudra alors tenter de justifier son action, ses voyages, ses relations.
«En trois jours, tout allait chavirer. Dimanche Hambourg était bombardée. La ville subissait le même sort que Cologne et Essen, la guerre continuait, rien de nouveau sauf une obscure appréhension. Mercredi, d’un seul coup, l’horreur frappe là-bas, un ouragan de feu dévaste tout sur son passage, aspire l’oxygène des abris, fait fondre l’asphalte des rues, laissant des dizaines de milliers de morts.»
Autour de lui, tout s’effondre. La mort rôde. L’issue fatale est proche. Doit-il croire le cynisme des nazis et leurs mauvais augures : «Réjouissez-vous de la guerre, car la paix sera épouvantable.» Une fois encore, avec l’aide des femmes, il va pourtant réussir à s’en sortir, alors que le crépuscule des dieux recouvre l’Allemagne.
Aussi poignant que documenté, ce récit éclaire d’un jour nouveau cette sombre période de l’Histoire. Un moment où faire un choix n’était pas chose aisée. Un premier roman qui est aussi un grand livre !
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