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L'insolente de Kaboul de Chékéba Hachemi
Une femme regarde par le hublot un paysage ou serpente une rivière. Son regard est triste et sa bouche fermée. C'est la première image que j'ai vu lorsque j'ai trouvé ce livre à la bibliothèque de mon petit village et que j'ai découvert l'histoire de Chékéba Hachemi qui depuis 1996 a réveillé les consciences sur les conditions difficiles de vie des femmes afghanes. Ce livre édité en 2011, prend un autre relief aux regards de l'actualité brûlante de ce pays.
C'est avec une carte géographique que nous découvrons l’Afghanistan entouré par le Pakistan, le Tadjikistan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan, et l'Iran et ses provinces. Puis il nous est donné la chronologie de son histoire contemporaine de 1919 à 2007.
Comme le dit Chékéba Hachemi ce livre retrace son parcours. Il s'agit d'un témoignage. Celle d'une petite fille qui a onze ans, en février 1986 se retrouve en train de marcher dans des tongs ridicules dans la passe de Khaibar , un long défilé de 58 km appartenant au massif de l'Hindou-Kouch séparant l'Afghanistan du Pakistan jusqu'au statut de diplomate. Nous la suivons lors de son périple et sa pugnacité à ne pas montrer aux passeurs qu'elle souffre nous faisant entrer dans l'hospitalité de la famille Afghane accueillante, disponible pour celui qui arrive. Puis c'est la France, Chatenay-Malabry, l'intégration dans une école, son apprentissage de la lecture. En 1992 Chékéba Hachemi obtient son bac avec les meilleures notes en français de toute la promotion du lycée Mounier et intègre une école de commerce privée. Une journée nous est disséquée du lever à 5h45 jusqu'à l'extinction des feux à 1h du matin. nous la suivrons toute la journée pendant ses cours, puis rejoignant la Sofres qu'elle quitte à 21h30,h pour rejoindre le domicile de sa mère malade et ses frères impatients. A 22 h elle fait le dîner, 22h30 prise du repas en commun, 23 h lancement de la machine à laver, puis toute la paperasse de la maison gestion du compte bancaire commun, minuit étendre du linge, une heure pour lire ses cours voir un roman, elle se passionne pour Maupassant, Sarte, Duras et Colette. 1 heure du matin extinction des feux.
A 25 ans, elle ne travaille plus pour la Sofres, mais pour un papetier international. En Afghanistan l'ennemi n'est plus les Russes, mais les talibans. Notre champion dit-elle est toujours le même il s'appelle Massoud du nom de la vallée ou il a installé sa base arrière. « C'est pour les femmes réfugiées dans cette vallée que la petite association Afghanistan Libre que j'ai créée en 1996 avec Marie Laure Gauvin et Claire Ladon » récolte des fonds. Lever des fonds c'est bien mais ce n'est pas suffisant pour Chékéba, qui veut revenir en Afghanistan . Ce voyage se fera en 2000, 45 occidentales partent à la rencontre de 100 femmes Afghanes de la communauté de réfugiées. Après bien des péripéties, elle rencontrera Massoud . Puis en mars 2001, deux statues monumentales des boudhas qui surplombent la vallée de Bamyan tombent . L'heure est à la prise de conscience internationale que les talibans sont une menace. « Les boudhas font partie du patrimoine de l'humanité. Cette notion de patrimoine commun est-elle donc si forte ? Les femmes lapidées dans le stade de Kaboul le sont-elles moins ? Il aurait fallut classer la femme au patrimoine de l'Unesco ! » Massoud viendra en Europe en avril 2001. pas plus d'invitation au 20 h qu'une rencontre avec Jacques Chirac. « Massoud a choisi la France, mais seul le ministre des Affaires étangères Hubert Védrine aura le courage de lui accorder un rendez-vous. » Le 15 septembre Massoud est mort à l'issue d'un attentat kamikaze. Puis, nous suivrons Chékéba à Bruxelles comme diplomate et lors de sa rencontre avec Sediqa Massoud dont les paroles feront l'objet d'un livre ; En 2005 elle sera très près avec le président Karzaï lors du vote du budget quinquennal d'aide à la reconstruction de l'Afghanistan, avec un chapitre éloquent « sur les organisations internationales et les études de faisabilités d'aides et de toutes les parties perdues par l'amateurisme des intervenants. »
L'on découvrira cette société patriarcale ou la femme doit se battre pour prendre place et avoir des responsabilités qui sont prépositionnées pour les hommes. De ces allers et retours en Afghanistan Chékéba se forge un caractère et ne s'en laisse absolument pas compter quelque soit la qualité du supérieur ou de l'intervenant, troquant ses habits de diplomate pour un poste auprès du vice-président Assad, gouverneur de Kandahar. En avril 2007 alors que des menaces contre elle sont de plus en plus précises elle voit un poste qu'elle convoitée à Genève confiée « à un homme qui n'a mis les pieds en Afghanistan qu'une fois pendant 25 ans et c'est ainsi dit-elle que se conclue ma carrière politique et diplomatique. »
« Où va l'Afghanistan aujourd'hui ? » dit Chékéba, « au moment ou je finis l'écriture de ce livre mon pays est à feu et à sang, dans un état catastrophique sur tous les tableaux ; Dès le début des interventions il n'y a jamais eu de véritable accord, de la stratégie concertée de la part de la communauté internationale. On a jamais su ce que celle-ci voulait pour mon pays ! Mais le monde entier doit savoir ce que va entraîner le retrait des troupes étrangères. Comment ne pas penser que la situation va empirer ! » Lisez ce livre l'insolente de Kaboul de Chékéba Hachemi, celui d'une femme de terrain, d'action, de générosité et de solidarité envers ses compatriotes ses sœurs Afghanes. Bien à vous.
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