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Je ne connaissais pas du tout cette auteure avant de découvrir ce roman , et pourtant, j'ai déjà entendu parler de son précédent roman, Le club des veuves qui aimaient la littérature érotique. Il faut dire qu’il est difficile de ne pas se souvenir d'un tel titre ou au moins de ne pas avoir été marquée par lui. Je la découvre donc totalement avec ce second roman, le résumé m'a tout de suite intéressée, j'aime beaucoup les histoires de famille, de générations, de transmission, et surtout lorsqu'il s'agit de femmes. En plus, le résumé présage un voyage en Inde et j'aime beaucoup être dépaysée par mes lectures.
Pour ce qui est dépaysement, j'ai vraiment été servie ici, à ma plus grande joie. Tout commence avec une vieille femme, sur son lit d’hôpital. Elle sait que la fin est proche et elle veut laisser des directives à ses trois filles. Elle rédige donc une lettre qu'elle lira à ses filles où elle leur demande de partir sur les traces de leurs familles en Inde et disperser ses cendres à un endroit précis. Sita, c’est le nom de cette mère, espère ainsi renouer les liens qui devraient unir ses trois filles qui sont pour l'instant fort distendus.
Les trois sœurs vont devoir mettre de l'eau dans leur vin, comme on dit, accepter de faire ce long voyage ensemble et respecter les dernières volontés de leur mère. Bien qu'elles soient sœurs, elles sont très différentes les unes des autres. L’aînée, Rajni, est mariée et a un fils de dix-huit ans, qui lui pose bien des soucis puisqu’il veut arrêter ses études pour s'installer avec la femme qu’il aime. Déjà ça, ça pose un énorme souci à Rajni et son mari, mais en plus, cette femme a le double d’âge de son fils, ce qui peut être délicat. Rajni a déjà voyagé en Inde avec sa mère, au moment du décès de son père. Elle en est revenue toute chamboulée, et est donc réticente à ce pèlerinage à effectuer,, mais par respect pour sa mère, elle ne se voit pas ne pas le faire. Sa sœur, la deuxième née, Jezmeen, est célibataire, elle vit à Londres, comme Rajni, mais se côtoient très peu. Elle est actrice, mais ne trouve que des petits rôles, et au moment de la mort de sa mère, une vidéo d'elle fait le buzz sur les réseaux, anéantissant ses espoirs de carrière. Elle n'est pas enchantée de faire ce voyage en Inde, mais sa curiosité la pousse à en savoir plus sur ses origines et sa famille. La dernière des sœurs, Shirina, vit loin des deux autres, puisqu’elle habite en Australie, où elle est mariée. Elle a rencontré son mari via un site pour trouver l’âme sœur et s’est mariée rapidement avec lui. Son mari est un Indou très traditionaliste, la mère de celui-ci habite avec le jeune couple et fait régner sa loi. Shirina obéit, elle ne se donne pas d’autre choix. Elle voit ce voyage en Inde comme une nouvelle façon d’obéir à sa belle-mère.
Les trois sœurs ne sont pas au bout de leurs surprises avec ce voyage, et surtout avec toutes les consignes que leur a donné leur mère. Elles ont une liste d'endroits où aller, de choses à faire, comme aller voir le lever de soleil à la Porte de l’Inde, ou se baigner dans des bains purificateurs. Mais certaines des sœurs ne l'entendent pas de cette oreille, je pense notamment à Jezmeen, qui n'en fait un peu qu'à sa tête, préférant aller faire des achats ou des balades. C’est celle qui est la moins traditionaliste, Rajni essaie toujours de la remettre dans le chemin tracé par leur mère. C’est celle qui suit le plus à la lettre les dernières volontés de sa mère. Elle prend ça comme un mauvais moment à passer et qu’elle sera tranquille une fois rentrée à Londres. Par contre, on sent chez Shirina un malaise, un problème elle cache quelque chose, son mari lui a demandé de faire quelque chose pendant ce voyage qui la rend mal à l'aise. Elle cherche donc tout le temps a s’éloigner des sœurs. Ce séjour ne va donc pas être simple pour chacune des sœurs, elles vont devoir faire avec leurs problèmes personnels, leurs soucis, et en même temps se réhabituer à vivre entre elles, à s'adapter à leurs personnalités, à faire avec leurs différences de caractère. Et surtout, elles veulent toutes respecter les vœux de leur mère, essayer de mener au mieux ce pèlerinage, et ça ne va pas être simple, les secrets et les non-dits vont refaire surface, il va falloir qu'elles apprennent à se confier et à ne pas se juger pour percer les abcès et redevenir les sœurs qu’elles étaient dans leur enfance.
Je me suis très vite attachée à cette histoire et à chacune des trois sœurs. Elles sont différentes les unes des autres, mais leurs vécus et leurs cicatrices montrent de belles personnalités. La vie et ses aléas les ont transformées, elles ne sont plus celles qui jouaient pendant leurs jeunes années. Mais ce sont des moments qui ne s'oublient pas et construisent des personnes, et ces bases sont toujours là, ce sont leurs fondations. Alors même si elles ont cherché à s’éloigner de leurs racines, elles y reviennent, surtout avec un tel pèlerinage. J'ai vraiment beaucoup aimé ces trois femmes, et les suivre. Quelle mère ne rêve pas de voir ses enfants réunis et bien s'entendre. Moi-même, mère de quatre enfants, je rêve de les voir tous ensemble, unis et se rappelant de bons souvenirs de leur enfance, où vivre à quatre n’était pas une option. L’idée de voyage qu'a eu leur mère est plutôt ingénieuse. Vivre ainsi les trois pendant une semaine va forcément les rapprocher, crever les abcès, les non-dits.
Il y a un quatrième personnage très important, bon, ce n'est pas un personnage comme on l'entend, mais il prend autant de place, c’est l'Inde. Ce pays qui fait rêver plus d'un, avec ses traditions, ses rites, ses couleurs. J'ai longtemps eu envie de le visiter, je ne pense pas que je le ferais un jour, je le fais donc avec mes lectures. Et dans ce roman, l'auteure qui connait bien le sujet en parle sans fards et sans fioritures. Elle ne cache rien, ni n’embellit. Elle dit ce qui est, ce qui existe, et je ne sais pas si j'ai encore envie de m'y rendre. Je ne supporterais pas la foule qu’elle décrit, faire la queue pour voir une statue comme on le fait pour un manège dans un parc d’attractions, supporter la pauvreté des gens sans avoir envie d'aider chacun d'eux. C’est tout de même un pays assez déroutant, entre toutes les beautés qu'il peut avoir mais aussi tous les problèmes de vie. La façon dont en parle l'auteure est très réaliste et j'ai beaucoup apprécié ce point. Elle ne cache rien et montre tout.
Pareil, elle est aussi très transparente pour parler de ses personnages, et notamment de la condition de la femme en Inde et dans certaines familles. On se croirait retourner un à deux siècles en arrière pour nous occidentales. Beaucoup de femmes n'ont pas le droit à la parole, sont surtout prises pour des reproductrices, il est d'ailleurs plutôt souhaitable d’être enceinte d'un garçon, au risque de subir un avortement tardif si c’est une fille. Mais certaines jeunes femmes se soulèvent, manifestent et font entendre leur voix pour changer la société très patriarcale. C’est vraiment très appréciable d'aborder ce sujet dans une telle histoire, de montrer ce qu'il se passe encore de nos jours dans certains pays. Car on aurait trop tendance à croire que c’est toujours tout beau tout rose chez les autres, des romans comme celui-ci permettent d'ouvrir les yeux, et c’est très bien. Les hommes sont tout de même présents dans ce livre peuplé de beaucoup de femmes. Certains n'ont pas un très bon rôle, je pense au mari de Shirina, mais l’auteure montre aussi avec beaucoup de justesse ce que d'autres ont changé dans leur façon de regarder les femmes et de vivre avec elles.
L'attachement aux trois filles se fait très facilement et rapidement et ce malgré le choix narratif de l'auteure qui n'est pas celui que je préfère. Elle emploie la troisième personne et je trouve ce choix judicieux. Il est bon, dans une histoire où les émotions sont fortes, de garder une certaine distance avec les personnages, de les regarder évoluer avec un petit retrait afin de ne pas trop s'immerger dans leur pensées. En plus, l'auteure décrit très bien les sentiments et les sensations, j’ai vraiment tout pu ressentir, le moindre bonheur, sourire, la joie, mais aussi la peine, la colère, la tristesse. Toutes les émotions sont bien retranscrites.
La lecture se fait très facilement et avec une certaine addiction, le style de l’auteure est très bon, très fluide, la traduction est parfaite. J'avais tellement envie de savoir ce qui allait pouvoir se passer, si la situation entre les trois sœurs allait s’arranger , si elles allaient arriver à mener à bien leur voyage, et tout simplement, si tout irait mieux pour elles, que je me dépêchais de lire pour savoir. Et en même temps, je ralentissais de temps en temps car j'avais envie de rester dans ce livre, je m'y sentais bien et je n'avais pas envie de le quitter. Le final est à la hauteur du reste, très fort émotionnellement parlant, plein d'espoir et porteur de beaux messages sur la condition féminine.
Pour conclure, je pense que vous l’aurez deviné, mais j'ai beaucoup aimé ce livre et la découverte de cette auteure. Je note son précédent roman dans ma liste d'envies, j'aimerais beaucoup le lire et la retrouver dans une autre histoire. Le titre est une histoire à lui tout seul, et après lecture du résumé, je suis curieuse de lire à nouveau l'histoire de ces femmes orientales.
En tout cas, si vous ne connaissez pas ce roman ou cette auteure, je vous les recommande vivement. Vous allez partir dans un beau voyage, avec de belles valeurs et avec des thèmes qui ne vous laisseront pas indifférents.
Balli Kaur Jaswal avec beaucoup d’humour et un talent fou nous embarque avec les sœurs Shergill dans un périple assez rocambolesque de New Delhi jusqu’au Pendjab. Les trois jeunes femmes nées et élevées en Grande-Bretagne mais d’origine Sikh accomplissent une sorte de pèlerinage pour ré-pondre au vœu de leur mère qui voudrait les inciter à se rapprocher et à mieux comprendre leur ori-gine. Une lettre écrite juste avant son décès leur donne toutes ses injonctions par un programme détaillé auquel il n’est pas question de déroger. Mais les sœurs ont des caractères très différents, chacune a des soucis qui la minent mais qu’elle cache aux autres. Et comme on s’en doute le voyage ne va pas être de tout repos!
Mais au-delà du caractère universel de cet ouvrage sur les problèmes de la sororité et du secret de famille l’auteure traite de nombreux thèmes liés aux traditions sikhes. L’immigration, l’adaptation à un nouveau pays, la spiritualité, le poids de la religion, et plus important que tout le qu’en-dira-t-on… Balli Kaur Jaswal nous parle de femmes qu’elle connaît bien, qui, comme elle, se retrouve entre deux civilisations. Elle raconte de manière humoristique les rapports entre les immigrées de la pre-mière génération et leurs filles occidentalisées, même si certaines se laissent tenter par un mariage arrangé.
Souvent burlesque mais réaliste ce roman dépaysant m’a enchanté. J’y ai retrouvé, mais d’une ma-nière différente, un certain nombre des thèmes abordés dans Le Club des veuves qui aimaient la littérature érotique, roman que j’avais aussi beaucoup apprécié. J’espère que les autres romans de Balli Kaur Jaswal seront bientôt traduit en français.
https://ffloladilettante.wordpress.com/2020/04/20/les-incroyables-aventures-des-soeurs-shergill-de-balli-kaur-jaswal/
Les sœurs Shergill sont au nombre de trois. Rajni, l’ainée, est mariée et mère d’un fils de dix-huit ans qui vient de lui annoncer une nouvelle fracassante. Jezmeen, la cadette, se rêve en star de cinéma mais peine à décrocher ne serait-ce qu’un petit rôle. Shirina, la benjamine, se sent à l’étroit dans un mariage arrangé qu’elle a pourtant souhaité.
Si les trois sœurs se retrouvent en plein voyage au cœur de l’Inde, ce n’est pas par choix ni pour le plaisir d’être ensemble mais pour honorer une promesse faite à leur mère qui vient de mourir. Celle-ci leur a laissé une lettre avec un trajet et des directives à suivre. Mais tout ne va pas exactement se dérouler sans difficultés.
Je m’attendais à un livre léger, et par certains aspects il l’est ne serait-ce qu’à travers l’humour qui se dégage de certaines situations vécues par les trois sœurs durant leur périple.
Mais c’est un livre qui renferme aussi une grande profondeur par les sujets qui sont abordés.
Il y a bien sur le rapport entre les trois sœurs. Rijna qui se comporte un peu comme une seconde maman compte-tenu de sa position d’aînée. Jezmeen, confondante d’égoïsme. Et enfin Shirina, la dernière des sœurs, celle qui veut toujours bien faire, qui veut éviter les conflits. Il est intéressant de voir comment chacune interprète et revisite leur enfance. Rijna, parce qu’elle est plus âgée que ses sœurs, n’a pas tout à fait les mêmes souvenirs avec leur mère mais aussi avec leur père qui est mort très tôt. Elles n’ont pas non plus le même rapport avec l’Inde qui est le pays de leurs ancêtres mais où elles n’ont pas été élevées et donc pas le même rapport à leur héritage et à la culture sikh dont elles sont issues. Ce pèlerinage se trouve alors être l’occasion de grands moments d’introspection pour chacune d’elle mais aussi de confrontation.
Le voyage est aussi pour elles, et pour le lecteur, l’occasion de plonger au cœur d’un pays fait de contradictions et qui peut se montrer parfois d’une grande violence.
Ainsi, les sœurs Shergill vont vivre de grands moments de ferveur et de partage mais aussi être confrontées à leur statut de femmes dans un pays qui peut s’avérer dangereux et à tout le moins très inégalitaire.
Ce livre est une intéressante auscultation des relations familiales et un voyage passionnant dans l’Inde contemporaine.
Avant de mourir Sita, dans une lettre, demande à ses filles de se rendre en Inde pour un pèlerinage qu'elle n'a pas pu faire elle même. Le but est de leur faire découvrir un pays, elle qui ont grandi à Londres, mais également de les rapprocher et ca .. au départ ce n’est pas gagné.
Car les trois filles sont très différentes. Rajni l'ainée est mère de famille, directrice d'école, toujours très raisonnable et carrée, Jezmeen, sulfureuse voit s'envoler ses espoirs d'une carrière en tant qu'actrice à cause d’une vidéo qui circule la montrant un peu énervée, Sherina, l'épouse dévouée et discrète cache les malheurs de son mariage et de sa vie commune avec sa belle-mère. Le moment est mal choisi pour les trois pour abandonner leur vie à Londres ou en Australie pour Shirina. Mais orchestrée par l’autoritaire Rajni, le pèlerinage commence et le parcours doit être suivi malgré les mésaventures rencontrées. Aucune n’est ravie, elles se sentent un peu étrangères dans ce pays dont leur parent sont pourtant originaires; c’est une Inde qui grouille qui se révèle, généreuse, superstitieuse, croyante mais si violente avec les femmes. Derrière la mise en scène déjantée , l'auteure revient sur le poids de la tradition, de la famille qui pèse sur ces femmes de manières différentes, en Inde où elles ne peuvent sortir sans être remarquées ou interpellées par des hommes au point de devoir être mise dans des wagons différents, le poids de l'opinion familiale, de la réputation des filles qui a pesé sur Sita, cette peur des regards qu'elle transmet à sa fille aîné mais également à sa cadette à qui elle donne pour consigne de se soumettre à sa belle famille.
Le destin s’acharne un peu sur ces soeurs chacune enfermée dans son malheur mais le souvenir de leur mère les rapproche, ainsi que la douleur de la perte jusqu’à ce qu’elles fassent attention les unes aux autres.
Suivre ces délicieuses soeurs et leurs mésaventures en Inde m’a offert un petit bol de fraîcheur (façon de parler car il fait plutôt chaud dans le coin), dépaysement garanti, fou rire mais aussi indignation et tristesse dans ce qui est révélé sur la condition féminine.
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