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Quand Vita sexualis parut au Japon, en 1909, Mori Ogai occupait une place exceptionnelle dans la médecine de son pays. Né en 1862, sa précocité l'avait fait médecin à dix-neuf ans ! On l'envoya donc se perfectionner en Europe ; il y apprit l'allemand, l'anglais et le français, dont il truffe souvent son récit. Quand il revint au pays natal, les écrivains, marqués par le naturalisme, exposaient sans complaisance la vraie vie. D'où maint et maint scandale : en 1906 avec La rupture de l'interdit, de Shimazaki Tôson ; en 1907 avec Le matelas, de Tayama Katai ; en 1909, avec cette Vita sexualis. Dans le mois qui en suivit la publication, l'ouvrage fut interdit : ni vente ni même distribution gratuite ! Or, si le titre est provocant, avec son allure médicale, ce récit d'un apprentissage amoureux, entre six et vingt et un ans, frappe aujourd'hui par sa pudeur. Il dit tout : sans outrance ni complaisance. Mais sans faiblesse pour l'idéologie dominante. D'où l'éclatante disgrâce du savant qui avait osé proférer ces paroles impies : ce n'est guère «que parmi les individus vêtus de vestes d'ouvrier» qu'on trouve l'homme idéal, du point de vue physique et charnel.Par chance, la traductrice de ce roman correspond au traducteur idéal, tel que je l'avais naguère défini. Égyptienne, aussi habile en arabe qu'en français, elle étudia le japonais, devint japonaise par son mariage. Vita sexualis, cette chimère, ce beau monstre de la vie intérieure, nous est restitué ici de façon exemplaire. Avec ses mines de ne pas y toucher, il nous atteint d'autant plus vivement, grâce à Amina Okada.
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