"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
« Un roman brillant sur l'amitié, l'art et son pouvoir de guérison et la nécessité de poursuivre ses rêves. » Douglas Stuart, auteur de Shuggie Bain
412 avant notre ère, au lendemain de la victoire de Syracuse lors des guerres du Péloponnèse. Alors que des milliers de prisonniers athéniens croupissent dans des carrières, deux jeunes potiers sans le sou, Gélon et Lampo, offrent du vin et des olives à qui voudra bien réciter des vers d'Euripide. Parmi les hommesaffamés, les candidats ne manquent pas. Bientôt, naît le projet fou de monter Médée et Les Troyennes au beau milieu de cette prison à ciel ouvert.
Mêlant une parfaite connaissance du monde antique au parler savoureux des pubs irlandais, Ferdia Lennon signe un roman à cadre historique résolument moderne, embarquant le lecteur dans une aventure tragi-comique inoubliable. D'une actualité brûlante, Un acte de gloire est une puissante réflexion sur le pouvoir de l'art et sur les interstices où renaît l'humanité après la guerre.
Direct dans l'action dès la première phrase du narrateur Lampo qui relate une proposition de son meilleur ami : « Alors, Gélon me dit, Allons nourrir les Athéniens. C'est un temps idéal pour nourrir les Athéniens. » Aussitôt, les deux compères débarquent avec leurs outres d'eau et de vin, leur pot d'olives et leur fromage dans une carrière de calcaire qui sert de prison à des centaines d'Athéniens. Nous sommes à Syracuse en 412 av.J.-C, à la fin de la guerre antique du Péloponnèse. Athènes qui a tenté de prendre la cité sicilienne a été défaite.
Direct dans l'absurde aussi puisque Gélon assaille d'une question des prisonniers décharnés et décimés par la faim : « tu peux citer Euripide ?», si oui, il les nourrit. Gélon, obsédé par ce dramaturge athénien, a ainsi l'idée improbable de monter une représentation théâtrale dans la carrière avec des Athéniens connaissant par coeur Médée et Les Troyennes.
Même si on sent que l'auteur est très documenté, on est très très loin des codes puristes du roman historique cherchant à restituer de façon vraisemblable une ambiance et une langue de l'époque. Là, on a plutôt l'impression d'être dans un pub irlandais, avec des personnages qui s'apostrophent à coup de « tu déconnes, Apollon », « Périclès est un connard », « on emmerde Sophocle », et une flopée de « la ferme ». Cela surprend, dérange au départ, puis on s'y fait et on peut se concentrer sur l'intrigue.
Les premières parties sont très réussies, très vivantes dans la description des préparatifs de la pièce : organiser le casting des prisonniers athéniens, les faire répéter, trouver le budget pour réaliser les décors et les costumes. le duo comique Lampo / Gélon joue sur les ressorts du binôme mal assorti, ça fonctionne, on rigole.
Ferdia Lennon maitrise le registre de la farce avec énergie et culot, mais j'ai trouvé que son humour noir n'allait pas assez loin pour creuser le malaise moral née de la confrontation entre les nobles aspirations artistiques et le recours voire l'usage à des comédiens régulièrement maltraités qui n'ont d'autre choix que d'accepter de jouer pour peut-être survivre.
On comprend bien que les intentions de l'auteur sont de doubler cette farce d'une lecture plus contemporaine sur la guerre et ses conséquences désastreuses sur des individus dont les droits ne sont pas respectés, quasiment une parabole qui résonne avec la triste actualité. Mais le dernier chapitre enchaîne les événements de façon trop précipitée, ce qui fait que le passage de la farce légère à la gravité de la tragédie n'est pas aussi incisif et convaincant qu'elle aurait pu l'être.
Au final, ce que je retiens de cette drôle d'histoire, c'est l'espoir ou l'utopie que l'art serve de pont entre les peuples comme ciment à une meilleur compréhension de l'Autre, comme dit Gélon en s'adressant à ses ennemis vaincus athéniens :
« J'adore Athènes. Et je crois que j'aimerai éternellement la ville qui a engendré cette pièce ( Médée ) (...) Je ne vous hais pas. Comment le pourrais-je ? Même si je sais que vous êtes venus dans le but de nous réduire en esclavage, je ne peux pas vous haïr. Je pense qu'il y a forcément quelque chose à sauver dans une ville qui nous a offert ces pièces. »
412 avant J.-C., à Syracuse. Les troupes de l’arrogante Athènes, qui voulait conquérir la Sicile, essuient une lourde défaite. Des milliers de prisonniers athéniens sont enfermés dans les carrières de calcaire aux abords de la ville, le seul endroit suffisamment grand pour « accueillir » autant de personnes. Les Grecs y sont abandonnés à leur sort, à peine nourris, exposés au soleil et aux intempéries avec pour seul abri possible les anfractuosités de la roche. Autant dire que leur espérance de vie est infime. Jusqu’au jour où deux jeunes Syracusains, Gélon et Lampo, potiers au chômage et sans le sou, décident de nourrir ceux parmi les prisonniers qui sauront réciter des vers d’Euripide. De là, naît dans la tête de Gélon l’idée un peu folle de monter non pas une, mais deux pièces de théâtre, Médée et Les Troyennes.
Théâtre contre nourriture, c’est le deal. Est-ce là l’acte de gloire du titre ? On peut en douter : donner à manger à des prisonniers affamés à condition qu’ils acceptent de monter sur les planches, voilà qui n’est guère équitable. L’acte de gloire sera plutôt à chercher dans le comportement de nos deux metteurs en scène improvisés, après la débâcle de la représentation.
Ce roman se lit sans déplaisir, mais il me laisse perplexe : quelle était l’intention de l’auteur ? D’une part, il utilise le ressort de la farce avec ce duo des contraires : l’un sérieux, sombre, intelligent, obsédé par le théâtre, le second clown maladroit et naïf au cœur tendre. L’auteur crée aussi un décalage censément humoristique en adoptant un langage moderne, familier et grossier, aux antipodes de celui des textes d’Euripide. D’autre part, l’action relève littéralement d’une tragédie grecque, avec ces prisonniers qui se prêtent au jeu pour un bout de pain et une outre de vin, pour s’assurer quelques jours de survie tout en sachant qu’il n’y a d’espoir de liberté que dans la mort.
Un curieux mélange tragi-comique, donc, et s’il est question de la puissance de l’art, capable de transcender les anciennes rivalités pour nous ramener à notre commune humanité, le message m’a paru un peu confus, parce qu’ici il ne me semble pas poussé au bout de sa logique.
En partenariat avec les Editions Buchet-Chastel via NetGalley.
#Unactedegloire #NetGalleyFrance
Tout d'abord, j'ai été happée par la couverture, entre bleu et sable, avec des personnages grecs (amphore, masque, tunique...). J'adore l'Histoire et ces détails m'ont plu.
Ensuite l'intrigue : un hommage à l'art, en plein milieu d'une zone de désolation, rongée par les ravages de la guerre. Un mélange qui peut être très riche, s'il est bien dosé.
Je me suis donc lancée dans cette lecture avec curiosité. Mais j'ai eu un peu de mal au début. On entre de suite dans l'histoire, sans préambule. C'est un peu déstabilisant.
On rencontre Lampo (personnage au travers de qui on suit l'histoire) et Gélon, deux Syracusains sans le sou qui veulent monter une pièce de théâtre dans les carrières de Syracuse, avec des prisonniers Athéniens.
En effet, les carrières servent de prison à ciel ouvert pour les soldats qui sont laissés à leur triste sort. Ils attendent la mort, au milieu des rats, sous un soleil de plomb le jour et dans un froid piquant la nuit.
La situation des locaux n'est guère plus facile : certes ils sont vainqueurs, mais ils sont ruinées par l'effort de guerre. La plupart nourrissent de la haine contre les Athéniens, responsables de la mort d'un ou de plusieurs de leurs proches.
L'idée de Gélon, littéralement obsédé par Euripide et de Lampo est donc un peu folle. Et c'est là la magie de ce roman : il est addictif car j'ai eu envie de savoir si le projet de monter Médée et Les Troyennes allait réellement voir le jour, malgré ce contexte plus que défavorable. Je n'en dirai rien, pour le pas spoiler le livre, mais sachez que l'on suit pas à pas leurs questionnements et le montage de ces pièces. Ils vont faire entrer de la nourriture, des boissons pour les Athéniens, pauvres hommes décharnés. Ces petites attentions vont leur permettre de "revivre" un peu, pour devenir des comédiens.
En parallèle de leur nouveau travail de metteur en scène, on suit des moment de vie : Lampo tombe amoureux d'une esclave, on rencontre des enfants attachants qui jouent avec des casques et des armures, on flâne dans les allées du marché pour acheter du vin, on va au bar avec les pécheurs... J'adore l'ambiance du roman, qui décrit de façon habile la société de Syracuse.
La plume est surprenante. Elle est à la fois riche, avec des termes parfois très recherché, et les dialogues sont directs et francs, du "parlé vrai", comme entre deux copains au bar. Il y a parfois des touches d'humour (humour souvent le plus souvent).
Les chapitres sont assez courts, et donnent du rythme.
Je pense que le roman est très bien documenté, l'auteur a du faire beaucoup de recherches sur la cité et ses habitants.
Remarque : j'aurai apprécié au début du roman un petit focus historique, sur cette période où Athènes a voulu attaquer Syracuse, et sur les poètes et pièces de tragédie Grecque. J'ai quelques bases, mais j'ai été parfois un peu perdue. Cela apporterait un réel plus pour la compréhension du contexte.
Une belle découverte, surprenante. Les aspects humains sont bien décrits (la haine, le mépris, la violence quand on croit que tout est fini)... mais également l'amour et l'amitié. Où comment voir de l'humanité dans un tombeau à ciel ouvert.
Le style est direct et moderne, et cela permet d'être dans l'action.
Enfin, ce roman n'a donné envie de me replonger dans l'histoire grecque Antique.
L'espoir fait vivre, et ce roman en est une belle définition.
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