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C'est presque totalement désemparé que l'on approche les étonnants travaux de Thilo Droste - jusqu'à ce qu'il vous prenne par la main et vous guide dans son univers au jargon en fin de compte pas si incompréhensible que ça. Le premier catalogue d'exposition complet de l'artiste originaire du Sud de l'Allemagne et installé à Berlin ouvre sur la photo d'une plaque de granit : À L'ARTISTE INCONNU. Un beau contraste avec la médaille commémorative de Hans Holbein l'Ancien à l'entrée du Kunstverein d'Augsbourg où Thilo Droste fait l'objet d'une exposition individuelle. À l'ouverture, seuls peuvent y pénétrer ceux qui ont l'audace de marcher sur une surface de miroir de 25 m² simplement posée ; il ne reste sinon que l'entrée de derrière, car les miroirs sont fragiles. Derrière le miroir, une table porte de la vieille porcelaine dépareillée, instrument classique de veille de noces (soirée au cours de laquelle on casse de la vaisselle pour porter bonheur aux jeunes mariés). Dans le catalogue, Thilo Droste explique le parcours d'images par une belle citation d'Ambroce Bierce : « les calamités sont de deux sortes : le malheur qui nous atteint et le coup de chance qui arrive aux autres. » Le court trajet « OMEN EST NOMEN » ou « Wallpaper » montre la photographie d'un graffiti :
+ \ O, à partir desquels Thilo Droste inscrit en ajoutant un H, un .
Sur le \ et un L son prénom en travers du graffiti et viole ainsi le code d'honneur des bombeurs. Le lendemain, le H, le . et le L sont recouverts de peinture. Thilo Droste colle sur la portion de mur un papier peint à motif : briques. Encore un jour plus tard, le papier peint est arraché et doté du message : IT FELT LIKE A KISS ; le décollage est aujourd'hui accroché dans la salle d'exposition. Depuis que les affichistes, « pop artistes », minimalistes et conceptualistes ont bousculé chacun les significations initiales des choses traitées ou utilisées, les malmenant au point de parfois les bosseler, l'affaire de l'appropriation se poursuit en silence. Thilo Droste est alors parfaitement détendu et garde toute prête la citation suivante :
« Un instant de bonheur pèse autant que cent ans de gloire posthume » - Frédéric II.
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