Le lauréat du Prix Femina 2017 nous accorde une longue interview sur son roman et sa conception plus globale de l'écriture...
Comme le dira plus tard le commissaire Georges Moréas, en d'autres circonstances, Bruno Sulak aurait pu devenir un des meilleurs flics de France. Mais le hasard a fait de lui un braqueur, sans doute le plus audacieux et le plus fascinant de son époque. Après avoir grandi à Marseille et brièvement fréquenté quelques voyous, Bruno intègre l'armée. Doté d'une mémoire prodigieuse, doué dans toutes les disciplines, il est rattrapé par un vol de motocyclette commis à l'adolescence. On le chasse sans le moindre égard. Il rejoint alors la Légion, comme son père. Sportif émérite, il s'entraîne au parachutisme, et bat le record de chute libre. Mais on lui refuse l'homologation de son exploit, à moins de s'engager pour 5 ans de plus. Une injustice qui le pousse à faire le mur pour aller passer le week-end en famille. Pendant son absence, l'ordre est donné à son régiment d'embarquer pour le Zaïre et ce qui n'était qu'une escapade devient une désertion. Il ne peut plus rentrer et bascule alors dans la délinquance.
Avec son fidèle complice Drago, il se lance alors dans le braquage de supermarchés, rencontre la belle Thalie, une jeune fille de bonne famille qui va participer à certains vols à mains armée, au volant de la Simca que Bruno utilise comme une signature à chacun de ses hold-up. Incarcéré une première fois, il étudie l'anglais et le droit, puis s'évade au nez et à la barbe des gardiens. Il s'attaque à des bijouteries, se présente chez Cartier en tenue de tennisman, une raquette à la main, profite d'une visite officielle d'Helmut Khol pour aller cambrioler un joailler parisien dans un quartier truffé de policiers... Adepte de la non-violence, il n'a jamais blessé personne, avait toujours deux balles à blanc dans son revolver au cas où on le forcerait à tirer. Généreux, épris de liberté, révolté par l'injustice, il se tint jusqu'au bout à son code d'honneur et ne dénonça jamais ses complices. Mais sa dernière incarcération à Fleury-Mérogis lui fut fatale : son ultime tentative d'évasion tourna à la tragédie et suscite encore la polémique.
Il fallait toute l'ironie et le second degré de Philippe Jaenada pour trouver la bonne distance vis-à-vis de ce personnage magnifique. Construit sous forme d'anecdotes croisées, son récit nous permet de suivre en simultané l'évolution des personnages clefs qui vont s'associer à Sulak. Avec son humour pince-sans-rire et son style inimitable (usage immodéré des parenthèses, digressions en chaîne...), Jaenada imagine ce que la vie de Sulak aurait pu être si tel ou tel événement ne s'était produit, montrant par là les hasards qui président au destin d'un homme. D'une grande tendresse à l'égard de son personnage, il dresse le portrait d'un homme intègre et retrace avec nostalgie cette époque où les gangsters avaient encore du panache.
Le lauréat du Prix Femina 2017 nous accorde une longue interview sur son roman et sa conception plus globale de l'écriture...
Jaenada use avec talent d'un style de conteur assez similaire à celui d'un chroniqueur judiciaire pour nous narrer ici la trajectoire d'un homme relativement méconnu du grand public : Bruno Sulak.
Homme de son temps ( les années 70 / 80), Sulak est un homme qui réussi ce qu'il entreprend, talentueux, son pouvoir de séduction charme tant les filles que les voyous ou les légionnaires. Mais Sulak est avant tout un homme entier qui ne connait ni la demi- mesure ni la culture du compromis. Il devient vite l'ennemi numéro 1 des années 80 après la mort de Mesrine.
Le lecteur est vite emporté par cette photographie du banditisme des années 80 qui laisse comme un goût de nostalgie culpabilisante.
Jaenada a fait du road movies de ce voyou une séduisante histoire pour les filles.
C’est ce cher Jean-Paul, alias @Fandol, qui, au travers de sa critique, m’a rappelé que je ne l’avais toujours pas lu alors que j’apprécie Philippe Jaenada.
Je dois l’avouer, de ce bourlingueur, falsificateur en tout genre, je suis tombée sous le charme. Je pourrais arrêter ici mon billet, mais la légèreté, les moments poignants de ce livre méritent quelques phrases supplémentaires.
Premier atout de Bruno Sulak, le personnage principal, ne ressemble à aucun autre bandit, si, peut-être un cousin d’Arsène Lupin mais de naissance moins aisé. Des hommes épris de liberté.
Pourquoi suis-je entrain de dire que c’est un livre tel que nous les aimons, nous les filles de peu ? C’est parce que de Bruno Sulak émane finesse et charme, tant d’émoi que nous les filles, nous mettons à rêver… rêver de rencontrer un Sulak et de jouer à Bonnie and Clyde. Eh Oui ! Les mauvais garçons avaient, ont et auront toujours des muses rêveuses à leurs côtés.
Gangster oui, il le fut, mais il n’était pas de ces escrocs minables qui semaient terreur et flaques de sang. Coups de folies et coups de génie alternent dans sa vie. Sa famille en a vu de touts les couleurs ; ne parlons même pas des insomnies des assureurs, bijoutiers, policiers, juges et gardiens de prison. Difficile de cautionner ses agissements.
Philippe Jaenada a étudié son personnage et l’on sent bien que lui aussi est tombé sous son charme. Il rapporte toutes les qualités d’un Sulak intelligent, doué, sportif, gentlemen, amical, généreux, doté de sang-froid et j’en oublie.
Mais à côté de ce décor idyllique il y l’envers du décor. Les risques excessifs qu’il a pris, les arrestations suivies de multiples évasions, les traques qu’il a subies, ou l’emprisonnement malsain qu’il a enduré.
L’adjectif ‘’poignant’’ arrive tout de suite après celui de ‘’charmeur’’. Sa vie n’a finalement pas été facile et de lire ce livre aura été, pour moi, jalonné d’infos concernant l’époque, les différents milieux, les conditions de détention de l’époque, la souffrance d’un homme pourchassé. La touche humoristique apporté par l’auteur tombe souvent à pic pour dédramatiser ce diabolique parcours.
Un jour, quelqu’un avait parlé de lui en disant ‘’ ce prince des monte-en-l'air et de la cambriole doublé d'un virtuose de l’évasion. Bravo l’artiste ’’. Dommage que je ne me rappelle plus qui avait écrit ou dit cela, mais ces qualificatifs convenaient à merveille.
Roman intemporel, lecture mélancolique. A part un début un peu brouillon, le livre file à toute vitesse. Et la fin dans tout ça ?! Je laisse le lecteur la découvrir.
Citations :
« Le temps d'un battement de cœur, de cils, de vie, de mort, tout s'arrête, tout continue, encore, il veut écrire, retenir cette encre qui fuit....Pourquoi ? Il sait, lui, Bic encre perdue, stylo jeté, effacé, oublié, pourtant jusqu'à l'ultime goutte il écrira, te dira, vivra pour moi - que ne suis-je stylo ! - dans un dernier sursaut, dernière transfusion, vivre ou mourir ensemble. »
« Nous sommes le cristallisateur de notre société. L'illusion qu'elle a de notre existence suffit à l’absoudre. »
« Quand on a le nez de travers, comme il dit (et il sait de quoi il parle), on peut pencher la tête pour faire croire qu'il est droit, mais on en a vite marre. »
« Le 21 février Anthony Delon sort libre de la maison d’arrêt de Bois D’Arcy. C’est son père qui est venu le chercher, seul (les oreilles de Bruno, qui chante peut-être ‘’Quand te reverrai-je, pays merveilleux ? Sur un télésiège, doivent siffler un peu en altitude : Alain Delon est fou de rage contre ce clown qui a corrompu , sali son fils, et donc lui-même, Alain Delon l’agonie à distance, le maudit en serrant son volant) - on l’a autorisé à pénétrer avec sa Lancia à l’intérieur de la prison, pour éviter la bousculade et les assauts de la presse à la sortie La star et son fils repartent ensemble en voiture, ça doit discuter pas mal derrière le pare-brise. »
Philippe Jaenada m’a déjà passionné avec La petite femelle, La serpe, Au printemps des monstres et, plus récemment, Sans preuve & sans aveu.
Au hasard d’un désherbage de ma médiathèque, voilà que j’aperçois un livre du même auteur : Sulak. Comme je ne l’ai encore pas lu, je me dépêche de le prendre tout en râlant devant cette élimination d’un tel bouquin des collections…
Je me suis donc lancé goulument dans la lecture de cette autre enquête menée par Philippe Jaenada, un livre publié en 2013. Comme d’habitude, c’est fouillé, émaillé de rencontres, de recherches et, bien sûr, d’anecdotes concertant l’auteur lui-même, en lien avec ses recherches ou avec les dates des faits qu’il relate.
Si Bruno Sulak est né à Sidi Bel Abbès (Algérie), le 6 mars 1955, l’essentiel du livre, le plus palpitant, se passe dans les années 1980. L’auteur n’oublie rien, présente les parents de Bruno et surtout sa fille, Amélie Sulak, qui lui a apporté quantité de détails, d’éléments précieux pour son récit.
Je ne suis jamais déçu par le style Jaenada, sérieux, efficace et souvent teinté d’humour. C’est passionnant et de plus en plus addictif. Avant de plonger dans l’action et de suivre pas à pas Bruno, j’apprends que la famille Sulak est originaire de Pologne. Stanislas, le père de Bruno, a été légionnaire comme son fils le sera plus tard. Par moments, l’auteur délaisse la famille Sulak pour quelques Yougoslaves qui interviendront dans la vie de Bruno… patience.
Au passage, Philippe Jaenada glisse sa date de naissance, le 25 mai 1964, la même année où Krsta Zivkovic arrive à Levallois-Perret, depuis Belgrade. Il deviendra un des plus fidèles amis de Bruno.
Il n’a pas 20 ans quand, à Marseille, il vole une voiture avec trois autres comparses et ça lui vaut quatre mois de prison. Ce n’est donc pas très bien parti et commencent les changements de nom, de métier, de lieu de vie et… la légion étrangère.
C’est un événement malheureux qui l’oblige à déserter et le pousse dans la délinquance. Avec Yves, mari de sa belle-sœur, à court de fric, ils se lancent dans le braquage du Mammouth (hypermarché de l’époque), à Albi, et réussissent. Cela se passe sans faire la moindre victime et ce sera la marque de fabrique de Bruno Sulak, que ce soit dans les supermarchés ou, plus tard, dans les bijouteries, sa grande passion.
Sa vie est très mouvementée. Philippe Jaenada nous le rend très sympathique tout en démontrant l’engrenage fou, une fois lancé, impossible à arrêter. Beau gosse, notre homme séduit les femmes, à commencer par Patricia qu’il épouse et Amélie naît le 23 avril 1979. Il y aura aussi et surtout Thalie et bien d’autres pour lesquelles il n’hésite pas à dépenser sans compter l’argent volé.
L’auteur n’oublie pas les flics et surtout Georges Moréas (OCRB) qui veut absolument l’arrêter, s’attache au personnage mais se retrouve coincé par la rivalité entre les services de police. Par exemple, la BRB (Brigade de Répression du Banditisme) n’informe pas l’OCRB (Office Central pour la Répression du Banditisme) de Georges Moréas sur ce qu’elle vient d’apprendre à propos de Sulak qui en profite pour disparaître... et me fait voyager un peu partout en France et même en Amérique du Nord et au Brésil avant que Philippe Jaenada me fasse vivre ses évasions, en apnée. Je note aussi que la presse, pour aguicher le lecteur, n’hésite pas à titrer, à son sujet « Ennemi public et superstar ».
Comme l’auteur aime la précision, il détaille les conditions de détention inhumaines imposées à Bruno Sulak mais je vous laisse le plaisir de plonger dans ce gros livre afin de vivre jusqu’au bout cette histoire grâce à l’énorme et minutieux travail de Philippe Jaenada qui raconte tout cela si bien.
Chronique illustrée à retrouver ici : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2024/03/philippe-jaenada-sulak.html
J'adore le style de Jaenada et là encore je ne suis pas déçue.
Cette fois-ci, il raconte Sulak, un sorte d'Arsène Lupin qui cambriole supermarchés puis bijouteries sans violence.
Comme tous les personnages contés par Jaenada celui-ci est terriblement attachant avec ses failles mais surtout son grand cœur avec sa famille (surtout ses sœurs), ses amis, Thally, toutes les femmes, ses amis voyous et même le commissaire Moréas.
On sait dès le début que cela va mal finir mais on ne peut s'empêcher d'avoir de l'espoir. Cela se lit d'une traite en retenant son souffle.
C'est raconté à la sauce Philippe Jaenada avec ses digressions, ses propres anecdotes, ses commentaires, et moi cela me plait.
Marie m'avait chaudement recommandé cet auteur il y a déjà quelques années, mais je n'avais pas encore franchi le pas ... mais j'aurais dû !
Je me suis régalée avec cette biographie romancée de Bruno Sulak, le fameux braqueur de supermarchés et de bijouteries des années 70-80, champion de l'évasion et de cavale !
Bien qu'il n'aie jamais fait usage de ses armes (d'ailleurs parfois factices) il a été considéré comme un ennemi public numéro un ... sans doute parce qu'il se jouait des policiers et gendarmes lancés à ses trousses ...
Dans cette biographie bien ficelée, on se prend au jeu et il nous devient très sympathique, enjôleur, séducteur ...
Le style particulier de l'auteur qui mêle ses propres souvenirs autobiographiques (entre parenthèses, lorsqu'il peur se rattacher à l'une des dates mentionnées) au récit de la vie de Bruno Sulak, est déroutant au départ puis devient de plus en plus attachant ...
Un roman qui m'a tant plus que je l'ai savouré, le lisant à petites doses pour le faire durer plus longtemps !
Une belle découverte !
Un auteur à suivre.
Récit fascinant de Philippe Jaenada sur la courte vie de Bruno Sulak.
Comme à l'habitude, le récit de Jaenada est très documenté et donne à penser que nous connaissons vraiment Sulak en refermant le livre.
Jaenada fait un personnage très attachant de celui qui vivait de braquages, en homme libre, généreux et fidèle avec ses amis, très lié à sa famille vers laquelle toujours il revenait, passionné et excessif en tout et en particulier en amour. Et surtout la violence est absente de ses méfaits - si l'on veut bien imaginer qu'il n'est pas violent d'être menacé d'une arme... - dont en effet Sulak ne se servait pas.
Avec l'histoire de ce roi de l'évasion, Jaenada raconte aussi l'histoire du banditisme des années 70-80 : il est question, ici ou là, de Mesrine, de Yougoslaves, d'Anthony Delon...
Et puis, la plume de Jaenada, vive, alerte, son humouren rendent la lecture captivante.
Je ne connaissais pas du tout l'histoire de Bruno Sulak et c'est avec plaisir que j'ai découvert ce braqueur des années 80, grâce à ce roman biographique.
J'apprécie de plus en plus ce genre, et celui ci est très réussi.
Je l'ai trouvé captivant, bien écrit.
Il est amusant de voir comment les choses ont changées en 30 ans !
De tels braquages seraient bien impossibles de nos jours, maintenant que tout le monde est surveillé, connecté...
J'ai beaucoup aimé le personnage de Bruno, il est attachant, surtout que c'est un homme qui braquait sans violence. Il était contre les armes à feu, il en avait mais ne souhaitait pas s'en servir.
Je suis triste d'avoir fini ce roman, je l'ai savouré, le lisant en trois jours pas d'une seule traite.
Je trouve que c'est un bon ouvrage, à découvrir :)
Une lecture vraiment agréable, un style enjoué plein d’entrain et d’humour. Au-delà de l’humour un véritable travail d’enquête minutieux et précis, mené avec sérieux et passion pour son sujet. Les lieux, les époques, les ambiances, tout est clair et précis. Philippe Jaenada parvient à nous transmettre l’admiration qu’il porte à ce gentleman voleur qui sévit dans les années 80, mit toutes les polices de France en émoi, vécut passionnément et mourut finalement tragiquement. Du grand banditisme mais avec une certaine déontologie finalement ! Un homme qui aurait pu suivre une toute autre vie si… Les sentiments sont décrits avec précisions, les références aux événements nous permettent de bien nous situer dans le temps, cette époque où les moyens de communications n’étaient pas ceux d’aujourd’hui, qui peut nous paraître pas si lointaine finalement, bien qu’un peu désuète : les cartes d’identité, les fax… Philippe Jaenada décrit également avec une certaine nostalgie une époque qui semble aujourd’hui révolue où les gangsters avaient du panache, du respect, commettaient des braquages avec classe, les relations avec l’inspecteur Moreas sont également attachantes, on y sent un respect mutuel. Au regard de notre société actuelle et de la violence des braquages ont en vient presque à regretter cette « autre » époque presqu'à se dire que c'était mieux avant et que les bandits avaient du savoir-vivre presque de la classe !
Les références à la vie personnelle de l’auteur sont autant de clins d’œil à son humour et apportent un petit plus amusant à l’histoire.
En résumé un très beau livre, précis, travaillé avec soin, passion et bien documenté qui se lit avec enthousiasme. J’ai regretté que la vie de Bruno Sulak se soit arrêtée si tôt et si tragiquement car je l’aurais bien suivie encore 500 pages tellement le rythme était passionné et passionnant.
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