Il n'est pas trop tard pour les découvrir... ou les offrir !
Entre une mère dépressive, un père qui veut retourner en 1978 et un meilleur ami agoraphobe, Lisa s'ennuie. Elle rêve d'aventures et de liberté. Grâce à son don pour le bricolage et les talents de pirate informatique de son meilleur ami, elle monte un projet fou pour quitter Montréal sans laisser de traces... Ou presque, puisque Jay, une policière en liberté conditionnelle, se lance à sa poursuite...
Un récit très original, une écriture fluide et incisive, une thématique essentielle dans notre monde de plus en plus contrôlé : la liberté. La liberté sous toutes ses formes puisque chaque personnage, à sa façon, selon ses besoins et ses possibilités, essaie de gagner quelques degrés de liberté ! Les personnages principaux bien sûr : en particulier Lisa qui prend son « envol » et défie toutes les lois possibles afin d’atteindre une sorte de liberté (ironiquement, mais je n’en dis pas plus… Spoiler alert !), son ami Eric, qui n’hésite pas à vivre ses passions librement (encore une autre liberté : celle de ne pas avoir à rencontrer les autres puisqu’il est agoraphobe), celle que Jay tente aussi de conquérir de diverses façons, etc. Ces deux récits parallèles qui finissent par se croiser à travers justement cette notion de liberté (puisque Jay donne un coup de pouce à Lisa et Eric) est un vrai bijou ! Il fait d’ailleurs partir de la sélection 2018 du Prix du Meilleur Roman des lecteurs de POINTS.
***
Ce livre nous a donné envie de relire le merveilleux poème de Paul Eluard écrit pendant la guerre.
Nous ne résistons pas à l'envie de le partager avec vous ici :
Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom
Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J’écris ton nom
Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
J’écris ton nom
Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J’écris ton nom
Sur tous mes chiffons d’azur
Sur l’étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J’écris ton nom
Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J’écris ton nom
Sur chaque bouffée d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J’écris ton nom
Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
J’écris ton nom
Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J’écris ton nom
Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J’écris ton nom
Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes maisons réunies
J’écris ton nom
Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J’écris ton nom
Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J’écris ton nom
Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J’écris ton nom
Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom
Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J’écris ton nom
Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J’écris ton nom
Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J’écris ton nom
Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom
Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer
Liberté.
Paul Eluard
Poésie et vérité 1942 (recueil clandestin)
Au rendez-vous allemand (1945, Les Editions de Minuit)
Deux femmes. Deux vies. Deux destins incertains. Et pourtant un point commun, et non des moindres : un conteneur.
L'histoire prend sa source au Québeq, dont l'auteur Nicolas Dickner est originaire.
Lisa est une jeune femme avide de liberté et d'aventures avec un grand A. Mais la vie semble en avoir décidé autrement. Tiraillée entre des parents divorcés et névrosés, et un meilleur ami agoraphobe.
"Certaines personnes ont des plans de vol. Lisa doit se contenter de cercles vicieux."
Jay, la quarantaine, est une policière en liberté conditionnelle, suite à une condamnation.
"Elle se demande parfois si son emploi n'est pas une manière sophistiquée de la convaincre qu'elle ne vaut pas mieux. Nouvelle saveur de la réhabilitation : l'amoindrissement."
Le compte à rebours qui la rapproche chaque jour un peu plus de sa liberté est enclenché.
Afin de combler l'ennui qui lui pèse alors qu'elle s'envase dans les bureaux de la GRC, elle va se lancer corps et âme dans une enquête incroyable : retrouver la trace d'un conteneur disparu.
Mais en quoi ce conteneur va être le point de rencontre du destin de ces deux femmes ?
"Chaque fois que tu me parles des conteneurs... j'ai l'impression que tu décris une grande réalisation de l'espèce humaine. Comme les routes de l'Empire romain, mais en plus gros. Un peu comme si notre civilisation avait créé un continent artificiel mais invisible, caché dans les murs."
Malgré un démarrage un peu lent, on se retrouve embarqué dans ces vies parallèles, chacune motivée par un pressent désir de liberté. Entre thriller et science-fiction - voire dystopie - on explore à travers l'univers du transport maritime, la complexité des nouveaux outils technologiques.
Nicolas Dickner ponctue son roman de passages franchement hilarants, notamment celui sur les magasins IKEA.
C'est donc un roman pittoresque, qui frôle la science-fiction - quoique - profondément contemporain et qui questionne sur les notions de liberté et d'identité.
Se passionner pour les pérégrinations d'un container à travers les mers et océans du globe, seule la littérature permet ce genre d'incongruité ! J'ai découvert un roman qui m'a embarquée dans des eaux inconnues !
Je me suis d'emblée attachée aux deux personnages principaux, deux personnages féminins. Elles ont des profils bien différents, mais se ressemblent par leur recherche de liberté, leur créativité et leur pugnacité !
La première, adolescente à la vie trop étriquée, se retrouve bien seule quand son meilleur ami (agoraphobe et crack en informatique) déménage sur un autre continent.
La seconde purge une peine hors les murs de la prison, en travaillant incognito pour la Gendarmerie Royale du Canada. Elle y fait de la triangulation.
Ce terme, comme de nombreux autres, n'évoque pas grand chose pour moi. Le roman est ainsi émaillé de propos informatiques, commerciaux, légaux, mondialistes...qui m'ont échappés, mais ne m'ont pas empêchée de suivre avec intérêt les aventures et choix des protagonistes, et le "voyage" de Papa Zoulou, ce container dont la trace disparaît.
L'ensemble finit sur une note positive, ce qui n'était pas pour me déplaire !
Un livre lu dans le cadre du jury du Meilleur Roman Points 2018.
A 15 ans, Lisa a des rêves que le manque d'argent l'empêche de réaliser. Coincée dans une petite ville canadienne sur la frontière avec les États-Unis, coincée dans l'obsession immobilière de son père, coincée dans l'instabilité psychologique de sa mère, coincée dans son âge alors que sa maturité la tire vers d'ambitieux projets, Lisa ne trouve sa place qu'auprès d'Eric, informaticien de génie, que son agoraphobie enferme continuellement dans sa chambre. A mesure que les années passent l'ennui se fait toujours plus dévorant. Surtout lorsqu'Eric prend son envol en déménageant vers le Danemark et en devenant millionnaire. Les deux amis élaborent un stratagème magistral pour permettre à Lisa de quitter son pays sans laisser aucune trace. Mais même les plans les plus astucieux recèlent une faille et c'est un infime détail qui met Jay, une policière atypique, sur la piste des comploteurs.
Quel délice, ce roman ! le schéma narratif s'amuse à brouiller les repères temporels et spatiaux et se place ainsi en reflet du projet de Lisa et Eric. Mais ce n'est pas tout ! Les personnages sont attachants et gardent une part secrète sur laquelle le lecteur peut projeter ses propres images. le ton oscille sans cesse entre comique et drame, entre précisions techniques et poésie, entre l'intime et le social, et l'intrigue est menée à train d'enfer sur plusieurs années si bien que j'ai tourné les pages jusqu' à la fin sans reprendre mon souffle. Et - cerise sur ce délicieux gâteau - l'histoire entre en résonnance avec le tragique de l'actualité et stimule une réflexion passionnante sur la notion de géographie, sur l'idée de frontières et d'espaces clos, ouverts, infinis, interdits... et sur les différents degrés de liberté qu'ils permettent de conquérir.
"Six degrés de liberté" et au moins autant de strates de lecture qui m'ont fait jubiler !
Un livre inclassable et assez déstabilisant.
J’ai terminé ma lecture il y a quelques jours et même avec un peu de recul, je suis bien incapable de vous dire si nous sommes face à un roman pour ado, un policier, un roman engagé, un conte moderne. Sans doute un peu de tout ça à la fois.
Sur fond de piratage informatique, de consommation de masse, de géographie planétaire, de transport maritime moderne, de logistique internationale, Nicolas Dickner a inventé une intrigue originale, une enquête singulière sur la disparition mystérieuse d'un conteneur.
Très objectivement ce texte est excessivement malin, très bien écrit, non dénué d’humour et il faut reconnaitre le talent de l’auteur pour sortir le lecteur de sa zone de confort mais malheureusement je n’y ai pas pris de plaisir.
Perdue entre la chronologie des évènements et le vocabulaire informatique, j’ai dû m’accrocher pour suivre ce qui a vraiment rendu la lecture laborieuse.
Par contre, c’est indéniablement un potentiel scénario de film !
Lisa et Erik sont amis depuis l’enfance. Tandis qu’Erik, agoraphobe, s’enferme chez lui avec son ordinateur et se passionne pour la programmation, Lisa aide son père à rénover de vieilles maisons et s’avère habile de ses mains. Les deux complices cherchent à se faire de l’argent et à réaliser leur projet durant l’été.
Jay travaille pour la Division C de la Gendarmerie royale du Québec. Elle a été condamnée quelques années auparavant et sert son pays pour payer sa dette. Ancien hacker, elle traque les fraudes bancaires mais s’ennuie. Un jour, son collègue Mahesh lui parle d’un conteneur fantôme, Papa Zoulou, qu’il traque depuis quelques semaines. Ce mystère va bientôt occuper Jay à plein temps.
Ce roman se distingue par sa construction savante qui se dévoile peu à peu au lecteur en même temps que l’intrigue. Nicolas Dikner signe un livre décalé aux personnages attachants mais aussi engagé puisqu’il y dénonce les effets pervers de la mondialisation.
Un container qui erre à travers le monde, un petit génie de l’informatique agoraphobe, sa copine d’enfance férue d’expériences en tous genres, une employée de sécurité qui compte les jours, tout ce petit beau monde (et d’autres personnages!) se retrouvent dans ce roman de Nicolas Dickner.
Beaucoup de plaisir pris à lire ce livre qui pourrait être un polar avec deux histoires en parallèle dont en pressent qu’elles vont se rejoindre pour livrer la clé de l’énigme. Mais qu’y a-t-il donc dans ce container? Que fomentent nos protagonistes? Mais au final est-ce vraiment un polar ? Nos personnages ne cherchent-ils pas la beauté du geste ?
Allez-y les yeux fermés pour passer un bon moment de lecture.
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