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Tout m'était familier et pourtant je ne reconnaissais rien ou presque. Tellement de choses avaient changé : les pubs, les emballages, les voitures, la mode, les kiosques, les expressions courantes, les journaux, les magazines, les chaînes de télévision, les partis politiques, jusqu'à la monnaie. Et pourtant tout respirait la France.
J'étais en France. Le pays où j'étais né et personne ne me demandait d'où j'étais originaire parce qu'ici, je n'avais pas d'accent. Pas d'histoires.
Trente ans d'Amérique ou pas, je restais immuablement français. « I am back », ai-je murmuré à voix basse en anglais, sans faire attention, comme ça, bêtement, par habitude...
« I am back. Je suis de retour...»
Pierre Gautier s’est installé aux USA il y a déjà trente ans.
« J’ai tout de suite aimé Key West, le point le plus méridional des Etats-Unis à 86 milles nautiques de Cuba, plus proche de la Havane que de Miami loin au nord à quatre heures de voiture. »
Un appel téléphonique, son père lui annonce que pour lui c’est la fin.
Le fils va prendre immédiatement ses dispositions pour regagner la France.
Il fera le voyage seul sans sa femme ni leurs deux enfants.
A la cinquantaine, il fait l’expérience de revisiter son passé.
L’auteur a partagé son livre en trois grandes parties, mais en fait c’est une multitude de compartiments qui s’ouvrent devant lui, devant nous.
Le ton est juste, il y a de la précision et l’écriture minimale dit les choses avec profondeur.
C’est cette profondeur qui va chercher le lecteur au cœur.
Dominique Falkner fait une radioscopie de la France et de lui-même en un mouvement identique.
« La tête comme un flipper où des choses lointaines s’entrechoquaient entre elles : mon père, ma mère, mon frère Jacques, ma sœur Sylvie et cette fameuse Françoise qui avait retrouvé ma trace à l’autre bout de la terre, le tout comme une lourde chape pesant son poids de non-dits. »
C’est cette sobriété qui retient le lecteur et l’implique, comme si celui ou celle qui lit, tendait la main pour accompagner ce voyage au « dépays ».
Voyage que nous faisons tous un jour ou l’autre, car pour appréhender sa vie pleinement il faut savoir faire des bilans avec une grande sagesse. C’est encore plus vrai lorsque la vie nous a bousculé.
C’est le charme de ce livre dans l’écriture et la construction.
C’est une nostalgie qui passe par tous les sentiments des plus violents aux plus doux. Ce retour sur le passé n’est pas du goût de tous les protagonistes, certains ont tourné la page, d’autres ont des raisons plus obscures et cette analyse est dans la vérité.
L’humanité qui se dégage de l’ensemble fait que nous connaissons des Pierre Gautier à commencer par nous-mêmes.
Il y a ce qui a existé, ce qui existe et ce qui aurait pu exister avec des si…
Une vérité aux multiples visages.
« C’est un beau roman, c’est une belle histoire »
Je remercie l’auteur et les éditions La Trace pour leur confiance.
©Chantal Lafon
Bien au-delà des secrets enfouis, Dominique Falkner lève le voile sur sa vie, sans pathos, en altérité. Confiant, en cela, il encercle la modestie des grands de ce monde. La première de couverture est percutante, elle signe d’emblée ce récit. Le miroir face à nous est boussole et invitation. Ouvrez ce livre ! Lisez au coin du feu, en cet hiver flouté par La Covid, cette histoire qui tourbillonne. C’est un « Retour au Dépays » café chaud, thé et musique. On aime le phrasé simple, le double-je (jeu) de l’auteur. « Je m’appelle Pierre Gautier. » Il lance les dés sur le tapis, la nostalgie est absente et c’est bien. Case blanche, case noire, peu importe, tout est confortable ici. Une couverture remontée jusqu’au cou. On se délecte. Un homme d’un âge certain, un couple bancal, deux enfants, malgré tout, il doit de suite, partir seul des États-Unis où il vit depuis 1986 à Key West suite à un appel téléphonique. Son père est malade. Dans cet espace d’un Dépays (lequel ?) Pierre Gautier (Dominique Falkner) jongle entre sa vie de ce jour, celle passée, de l’enfance, de son adolescence. L’âge adulte cornélien, écrasé de doutes et de questionnements. Il ose le parler-franc. Parfois acide, lorsque la politique insiste sur les lignes. Les diktats sociétaux, ballon de baudruche qui éclate. Bien au-delà de ses opinions, ses impressions et ressentis on pressent un auteur en mimétisme avec le narrateur, en plein questionnement existentialise. L’ubiquité en porte-voix, perte de vitesse. L’Amérique était une bulle, un lâcher-prise avec la France. Pierre Gautier semble ravagé par ce qu’il retrouve au cœur de la France. « I am back. Je suis de retour. » Il va se heurter aux falaises des non-dits. Sa famille déchirée, ce qu’il faut taire à l’infini. Et pourtant ! il va rassembler l’épars, renouer avec les siens. Le Père, sa liste d’amis, puis sa mère. Ce livre est émouvant. Il interpelle, tant il est notre somme à tous. La quête originelle dans son ampleur. Relier la gerbe générationnelle, regain, avant les regrets infinis d’un pas de côté hésitant. Envers et contre tout, Pierre Gautier renaîtra peut-être de ses cendres tel Le Phénix. « Retour au Dépays » est un journal précieux. Une photo en noir et blanc qui devient la couleur d’un Carpe Diem. Un livre confidence, les larmes et les sourires comme dans la vraie vie. Un récit salvateur. Publié par les majeures Éditions La Trace.
Ma lecture d’un ouvrage publié par les Editions La Trace commence toujours par la couverture. Elles sont belles, recherchées, artistiques et intrigantes. C’est le cas de la première du dernier roman de Dominique Falkner "Retour au Dépays". Sur un fond flou bleuté se dégage un visage moitié homme, moitié enfant. L’auteur et son double plus jeune ?
La réponse, je ne l’ai pas. Est-ce lui ou un autre ? Un jumeau trop tôt disparu ? Je le découvrirai peut-être plus tard. "Je m’appelle Pierre Gauthier. Domicilié aux Etats-Unis depuis 1986, je vis à Key West où je suis chef de cuisine d’un établissement réputé." Ainsi commence l’histoire et, je dois l’avouer, ce ne fut pas un coup de foudre. Ce récit ne fut pas de ceux qui, dès la première phrase, "love at first sight", m’emportent au septième ciel. Est-ce l’écriture d’une grande, trop grande simplicité ? Est-ce la familiarité avec laquelle l’auteur s’exprime ? Est-ce l’impression de lire plus une autobiographie qu’un roman tel qu’annoncé sur la couverture ? Je ne sais pas. Le premier chapitre lu, je me suis avancée sur la pointe des pieds, tranquillement. J’ai pris le petit déjeuner "devant un bol de céréales et un livre de classe" avec la fille de Pierre, et puis j’ai assisté à l’appel téléphonique fatidique : "Allô ? – Pierre ? – Oui – C’est Papa... – Je suis malade." Et c’est là que tout a commencé. Au moment où Pierre, le narrateur, décide de retourner en France, son pays, son "Dépays ?" au chevet de son père mourant.
Tel l’ouragan qui menace les côtes américaines qu’il a quittées – laissant femme et enfants – Pierre vit un grand orage intérieur. Au fil des pages, au fil de ses réflexions, je me suis laissée prendre dans les mailles de son filet. Je me suis laissée emporter par la nostalgie, des mots, des souvenirs, des histoires de famille, des ruptures et des deuils. Au fur et à mesure, l’écriture s’est effacée au profit des sentiments véhiculés, de la tristesse, des regrets. Trente ans d’absence, c’est long et pourtant tout est là : le départ de la mère, le père peu aimant, le frère jumeau trop tôt disparu, la petite amie qu’ils se partageaient, la sœur. A force de petits, tout petits chapitres, à force de titres de chansons, de références littéraires, de listes de vocabulaire, l’auteur fait de ce récit un moment à la fois triste et doux. Et l’homme, juste venu enterrer son père, découvre une multitude de raisons pour rester et tenter de remonter une vie qu’il croyait oubliée.
Ce ne fut certes pas un coup de foudre, mais ce fut tellement plus. J’ai aimé ce texte touchant, émouvant, troublant. Un vrai beau texte que j’ai envie de relire.
Je remercie chaleureusement les Editions La Trace pour cette belle lecture en avant-première.
https://memo-emoi.fr
Pierre Gautier est un français installé aux USA depuis 1986. Marié à Linda, père de deux adolescents, il vit à Key West (Floride) dans un house-boat et exerce la profession de chef de cuisine dans un restaurant réputé. La France, il l'a quittée sans regret il y a une trentaine d'années (l'année de la mort de Coluche, de Daniel Balavoine, de Simone de Beauvoir et de Thierry Le Luron : toute un symbole !...) Jusqu'à ses cinquante-six ans, moment fatidique où sonne l'heure des retrouvailles, auprès d'un père mourant ...
Le narrateur va s'imposer un retour en arrière, sur les traces de ses deux géniteurs démissionnaires et dépourvus d'instinct parental. Sur celles de sa fratrie qu'il a évitée depuis des décennies (Sylvie, une soeur qu'il n'aime pas vraiment et Jacques, son jumeau qui n'avait pas un goût très prononcé pour la vie) De ses ami(e)s de jeunesse, à qui il n'a finalement plus rien à dire (à Françoise peut-être encore un peu ...) Le temps n'y a malheureusement pas changé grand-chose.
Un texte sobre et percutant à la fois, qui m'a séduite et profondément interpellée. J'ai été touchée à l'âme, par le ton très juste et la pertinence des propos de l'auteur. "Familles, je vous hais - familles, je vous aime !" Je ne saurais préciser exactement pour quelle raison, j'éprouve cet immense coup de coeur, ce sublime coup de foudre pour ce roman, petit par le nombre de pages, et pourtant si grand par sa qualité littéraire !
« I am back » murmure Pierre lorsqu’il revient en France pour l’enterrement de son père. Trente ans qu’il vit aux Etats-Unis, il y a fait sa vie avec femme et enfants. Oui mais voilà, à cinquante ans passés, les questions affluent.
Ce père, il était peu aimant, c’est le moins qu’on puisse dire. Tout comme la mère, partie alors qu’il n’était qu’un petit garçon. Elevé par ses grands-parents, Pierre a grandi entre une grande sœur distante et son frère jumeau, Jacques, un rebelle.
Tandis qu’un ouragan se rapproche de Key West où il a laissé sa famille, Pierre va vivre une tempête intérieure en retrouvant son passé qu’il croyait pourtant avoir laissé derrière lui. A commencer par Françoise, cette ancienne petite amies qu’il a partagé avec Jacques. Et puis il y a Sylvie, sa sœur, qui ne veut plus le voir, et les anciens copains, du moins ceux qui sont encore vivants. Sans oublier la France, ce pays, son pays, qu’il reconnait tout en le trouvant changé, comme si l’urbanisme à outrance avait effacé cet art de vivre dont il a la nostalgie.
Pierre n’était venu que pour enterrer son père et, de fil en aiguille, il va s’attarder et tenter de remonter le chemin de sa jeunesse enfuie. On assiste aux atermoiements de Pierre et on fait ce chemin inverse à ses côtés.
Les liens familiaux distendus, les deuils, pèsent lourd dans la vie de Pierre qui se perd dans ses hésitations et ses contradictions mais l’auteur a su nous le rendre attachant, tout comme il rend palpable la nostalgie.
Ce roman est aussi musical, avec le souvenir des chansons que l’on fredonnait dans les années 80 : Michel Delpech, Mike Brandt ou Gainsbourg, Higelin qu’on allait voir en concert.
L’écriture est fluide, les chapitres sont courts, voire très brefs, et les changements de style créent une rupture bienvenue qui donne du rythme. Ainsi j’ai apprécié l’alternance de dialogues avec des passages plus intimistes.
Un bon roman, celui d’un fragment de vie, écrit sans affèteries et qui m’a touchée.
Je remercie les éditions La Trace pour cette découverte littéraire.
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