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Si ce désert était une mère, elle serait du genre à dévorer ses petits. " Pomoc, petite bourgade poussiéreuse du désert du Nevada. Cale Lamb y a grandi entourée de livres et de chiens, sous l'oeil protecteur d'un grand-père aimant. C'est l'été, Cale trouve un petit boulot de serveuse dans un diner où elle renoue avec Penelope Reyes, une ancienne connaissance de lycée, autrefois charismatique et populaire.
Les filles deviennent vite inséparables, jusqu'à ce qu'un drame d'une terrible violence fasse voler leur monde en éclats. Peu après, Penny disparaît, et Cale n'a d'autre choix que de se lancer seule au coeur du désert pour retrouver son amie dont l'absence ne semble inquiéter personne... Au fil de courts chapitres à la chronologie désorientée, Prière pour les voyageurs dit la brutalité du désert, la vulnérabilité des femmes.
Les errances de Cale dessinent les contours d'une mémoire assiégée, le portrait d'une fille dévastée et pourtant bien déterminée à reconquérir sa vie.
Laissez-moi vous parler des gens du désert
Voici la phrase unique du premier chapitre de ce roman déconcertant à plus d'un titre !
Premier chapitre oui, mais il est situé à la page…180… Et ce n'est pas fini, le bouquin commence par le chapitre 31 ! Evidemment, la numérotation des dits chapitres et la chronologie de l'histoire ne sont pas les seuls arguments qui plaident en faveur d'un roman atypique.
L'intrigue en elle-même n'est pas d'une originalité extraordinaire : il est question de la disparition d'une jeune fille, Penny, serveuse dans un diner comme il existe tant dans l'ouest américain. Sa copine Cale semble être la seule à se soucier d'elle… Pourtant, Cale a ses problèmes… Egalement serveuse dans le fameux diner (il n'y en a qu'un à Pomoc, Nevada), Cale vit avec Lamb, son grand-père qui l'a recueillie lorsque sa mère l'a abandonnée, tout bébé. Lamb se meurt d'un cancer, et Cale n'a que lui au monde, hormis ses deux chiens…
Tout le talent de l'auteure est de faire de cette histoire battue et rebattue un roman pétri d'humanité, de violences aussi (je mets sciemment le pluriel)...
En recherchant Penny, Cale va se découvrir, devenir une adulte aussi.
Le destin de ces deux jeunes filles (elles n'ont pas vingt ans) accroche le lecteur comme le ferait un cactus si l'on passait trop près, autant que la couverture magnifique et magnétique…
J'ai beaucoup aimé parcourir le désert du Nevada sur les traces de Cale et de Penny, goûter la poussière, croiser quelques serpents (pas seulement des reptiles), me rafraichir dans les casinos sur-climatisés de Reno…
Vous commencez votre lecture au chapitre 31, puis vous passez au chapitre 3, vous terminez par le chapitre 76 et vous rencontrerez le chapitre 1 en plein milieu du livre. Ce chapitre tient en une seule phrase : "Laisse- moi vous parler des gens du désert".
Au coeur de ce désordre habilement orchestré, vous allez visiter une petite ville poussiéreuse du Nevada et par petites touches, façon puzzle, découvrir l'histoire d'amitié de deux jeunes femmes très différentes.
Cale est la solitaire, la blessée. Penny est l'insaisissable, la fille populaire.
Cale a été élevé par Lamb, son grand-père, suite à l'abandon de sa mère. A la fin du lycée, la santé de Lamb se détériore. À la dérive, elle devient serveuse dans le bar restaurant où travaille également Penny. Cette ancienne camarade de classe charismatique mène de mystérieuses manoeuvres parallèles pour financer ses rêves. Penny montre à Cale la réalité qui existe au-delà de leur petite ville, et les filles deviennent inséparables jusqu'à ce qu'un évènement traumatisant vienne briser leur monde. Penny disparaît sans laisser de trace. Cale se lance dans une dangereuse quête à travers le désert pour retrouver son amie.
Servi par une narration non linéaire permettant au lecteur d'être complètement immergé dans le chaos et la confusion que vit Cale lorsque Penny disparaît, Ruchika Tomar réussit un très beau premier roman. Cette déconstruction tient le lecteur en haleine, qui cherche à reconstituer le fil chronologique. C'est gonflé mais ça marche.
Il y est question de loyauté, de sacrifice, mais surtout de la résilience des femmes et de leur refus farouche d'être brisées par leur situation. Dans un Nevada, personnage à part entière de son récit, l'autrice mélange subtilement la beauté et la brutalité, cartographie le coeur de ses habitantes et les traumatismes de l'expérience féminine.
Traduit par Christine Barbaste
Merci beaucoup à Léa de Picabo river Book et aux éditions La croisée de m'avoir permis de découvrir ce texte.
Ce texte, d'après le titre (français et anglais), devrait nous mener vers le voyage, sur les routes. Il y a en effet des pages sur les routes du Nevada mais il s'agit plus d'un voyage et d'une prière personnelle, d'un voyage intérieure d'une jeune femme.
Cale est cette jeune femme, qui a eu une enfance difficile, abandonnée dès sa naissance à la maternité par se jeune, très jeune mère mais recueillie par son grand père, Lamb. Veuf, il va élever cette enfant, dans une maison-ferme isolée de la petite ville. Ella va aller à l'école mais sera toujours une petit fille isolée, solitaire et qui regarde de loin les autres, avec envie, peur.
Son grand père, homme taiseux, va veiller sur elle et elle va s'occuper de lui quand il va tomber malade.
Plus grande, elle va trouver un emploi de serveuse dans un petit dinner et retrouver une fille de son école. Penny était alors une jeune fille avec un groupe d'amies et qui était l'objet de désirs de la petite fille isolée. Elles vont devenir collègues, copines et passer quelques moments libres ensemble, des soirées à boire, à fumer et à papoter. Un soir, elles partent chercher un chiot mais au retour elles vont subir un drame. Elles en échappent mais le lendemain Penny n'est pas venue travailler et Cale va alors décider de retrouver son amie.
Le livre devient alors une sorte de policier, une enquête;
l'auteure nous décrit très bien par les paroles de la narratrice les sentiments, les ressentis de cette jeune femme mais elle parle aussi très bien les paysages de cette région, avec des petites villes, leurs stations de services, leurs dinners, leurs petits casinos, les champs de bungalows, de camping cars où survivent des border lines, d' habitants qui survivent de petits boulots, de trafics. D'ailleurs, j'ai retrouvé le même climat que j'avais lu dans "de l'autre côté des rails" de Renea Winchester.
Nous sommes au plus proche de la narratrice et de sa quête, quête pour retrouver son aie mais aussi une quête plus personnelle.
Des personnages touchants, troublants, marquants : un beau portrait de ce grand père taiseux, d'un inspecteur de police, père d'une amie d'école de Cale, Penny cette "amie" qui aurait pu devenir un modèle pour Cale.
L'auteure parle très de l'adolescence, de la vie difficile dans des petites villes américaines, presqu'abandonnées, dans des régions perdues, dures par la nature et le climat (désert du Nevada), la vie de petits casinos, qui sont les seuls lieux de vie, de rencontre des habitants. de belles pages sur la nature, sur les parcours sur des routes longilignes, sur les rapports humains, souvent malheureusement très dures et où la tendresse, l'amour sont très rares.
Mais ce texte n'est pas tout de même si sombre : un beau portrait de jeune femme qui se cherche dans une société difficile, dans une nature hostile et qui va essayer de rester debout et aller de l'avant avec des prières pour les voyageurs...
Quand Cale (18 ans) tente en vain de joindre Penny (Penelope, 19 ans) qui n’est pas venue travailler, elle va se rendre aux Crossroads (Pomoc) jusqu’au mobile home de son amie. Elle devra se rendre à l’évidence : Penny s’est volatilisée, en compagnie de son chiot …
Cale, dont la mère (une junkie) l’a abandonnée toute petite dans le service d’urgence d’un hôpital, a été élevée par son grand-père maternel, Lamb (Lambert) qui ignorait alors jusqu’à son existence. Penny, elle, reste très « discrète » sur sa propre famille …
Cale aime son grand-père, les livres et les chiens. Penny a un côté plus sombre que sa cadette : Luz, Flaca, Lourdes ou Clara, de « mauvaises fréquentations » depuis ses années d’école, sauraient-elles quelque chose sur cette soudaine disparition ?…
Entre souvenirs de leur enfance et anecdotes plus récentes (elles travaillent toutes deux dans le même diner) Cale – la narratrice – s’ouvre lentement aux lecteurs, curieux eux aussi de découvrir la vérité sur l’absence inquiétante de Penny. N’obtenant pas une attention suffisante de la part de la police ou de Lamb, elle va partir à sa recherche, rencontrer des inconnus, poursuivre inlassablement sa quête … Un récit qui oscille entre le songe et la réalité (on s’y perd un peu par moments …)
Une belle écriture et une énigme qui accroche jusqu’à la dernière page – quand bien même le périple est parfois un peu « brumeux » … Si ce n’est pas un réel coup de coeur, c’est – en tout cas – une agréable lecture ! Ce premier roman (primé) est d’ailleurs fort prometteur !
Merci au Picabo River Book Club et aux Éditions La Croisée (Delcourt) pour ce beau partenariat !
J'ai commencé ce roman, ma toute première lecture de cette rentrée littéraire d'hiver, publié aux Éditions de la Croisée, sans aucune idée préconçue, curieuse de découvrir ce que cette couverture aux couleurs flamboyantes allait me réserver. C'est le premier roman de Ruchika Tomar, jeune auteure californienne, qui a été récompensée par le Prix Pen Hemingway en 2020, destiné à un auteur américain qui publie une fiction pour la première fois. Aux prémices de ma lecture de l'histoire de Cale, très jeune femme d'une petite ville du désert, je me suis rappelé les précédents titres lus des Éditions de La Croisée, Créatures et Se cacher pour l'hiver, et j'y ai retrouvé de troublantes ressemblances : les trois romans ont pour cadre un coin reculé des Etats-Unis et ont pour protagoniste principale, une jeune femme, un peu perdue dans sa vie, marquée par les stigmates de lourds traumatismes, totalement par un environnement démesuré, telle la Sierra Nevada. Cale vit en plein désert aride, luttant, elle aussi, contre une profonde solitude, que la dureté et l'immensité des lieux rendent encore davantage difficile à supporter.
Pomoc, en plein Nevada. Un roman des fins fonds de cette Amérique profonde, qui s'ancre dans le désert étouffant de l'ouest, ses autochtones perdus au milieu de nulle part. Là, où les jours se succèdent impitoyablement, semblables les uns aux autres, entre ces diners qui se ressemblent toutes. L'une de ces atmosphères, perdue entre deux époques, comme dans ces séries des années quatre-vingt-dix qui ont mal vieilli. En forçant un peu l'imagination, on y verrait presque quelques forçats aux costumes rayés issus des westerns, des crânes de buffle trônant ici et là. Parmi les âmes qui peuplent ces villes du Nevada, il y a Cale Lambert : si la vie entre cet endroit hostile n'était pas suffisamment difficile dans ce milieu fait pour personne, Cale est orpheline, seulement accompagnée de cet ours rustre et peu causant néanmoins aimant qui lui tient de grand-père. Dès le début du roman, cette aridité, de vie, de sentiments - le sexe ou les unions dépossédées de la moindre trace de tendresse, est comme aveuglante : le soleil brûle tout sur son passage, végétation comme humains. Une ville où la seule activité à part l'attente de la fin de sa journée de travail, c'est les petits trafics de drogue, ou les repas au diner du coin.
En marge de tout cela, la disparition de Penny la serveuse, passe inaperçue, comme si elle n'avait jamais existé, comme si elle n'avait jamais été là. Personne ne s'en soucie guère, sauf Cale. Comme si la poussière du désert ensevelissait les mémoires sous une amnésie cuisante, d'une léthargie poisseuse et mortelle. Orpheline et solitaire, Cale reste peut-être l'une de ces rares sources de fraîcheur, celle qui donne encore un sens à la valeur de l'amitié et de la famille. L'auteure nous a composé un texte au parfait reflet de ce que révèle être le désert du Nevada : une chaleur à long terme épuisante et aliénante, prenant doucement au piège de sa chaleur l'esprit ainsi que le corps, ou la vie n'est plus qu'un mirage d’existence.
Le style rocailleux et rugueux de Ruchika Tomar est aussi dépourvu de fioriture, de remplissage inutile et futile, et laisse peu de place à un sentimentalisme, qui de toute façon ne pourrait prendre racine dans ce lieu assoiffé, brûlé, la chair à vif. Ici, l'amour filial et l'amitié se dévoilent à peine, avec pudeur et circonspection, juste le temps d'un regard ou d'un geste comme une vague fortuite et silencieuse qui disparaît aussitôt qu'elle est apparue. Ce n'est pas n'importe qui peut y vivre, et la peau de Cale s'est changée en un cuir grainé à la croûte épaisse mais souple, qui sans aucun doute fait d'elle une guerrière.
Pomoc est un lieu de passage, plus qu'un lieu de vie, et quel que soit le temps que prend ce passage dans la vie de chacun, seuls ceux qui savent s'en détacher s'en sortiront. Ce roman, encore une fois, ne laisse pas de marbre, j'ai été comme écrasée par la moiteur de cette atmosphère, et Cale, comme d'autres femmes des titres des Éditions La Croisée, est encore l'une de ces femmes finalement très ordinaire qui parvient à s'affranchir des obstacles et des limites qui étaient les siens. Pour vous faire une première impression ou vous imprégner encore un peu plus de l'atmosphère de ce roman, je vous invite à visiter son site internet ou plus directement son instagram, remplis d'images qui sortent directement du récit de Ruchika Tomar.
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