"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Alain Pompidou nous fait revivre la passion de ses parents pour l'art. Georges et Claude Pompidou formaient un couple pétri de culture classique mais en avance sur son temps. Leur insatiable curiosité partagée, au-delà de la disparition du Président, apparaît donc doublement animée par l'amour de l'art. Un nouveau regard sur les Pompidou nourri par les témoignages inédits de Madeleine Malraux, Maïa Paulin, Pierre Soulages...
Au début des années trente, au Quartier latin, une rencontre inattendue réunit Georges Pompidou et Claude Cahour. Ils se marient quelques années plus tard et forment un couple uni partageant le goût de la littérature, de la musique, du cinéma. Très vite, ils fréquentent les galeries d'art et les artistes contemporains. Dès 1948, les Pompidou - comme on les appelle avec affection - font l'acquisition de leur première toile abstraite signée d'un peintre alors peu connu : Youla Chapoval.
Par la suite, au fil des rencontres, leur collection se construit en relation étroite avec les créateurs. En 1958, Claude offre à son mari un Nicolas de Staël. En 1962, l'accrochage d'un Soulages dans le bureau du Premier ministre surprend. Quand, en 1969, à l'Élysée, le Président et son épouse font appel à Pierre Paulin et à Yaacov Agam pour la rénovation et la décoration de leurs appartements privés, force est de constater que l'art représente pour eux une raison de vivre. Que la création du Centre Pompidou viendra couronner.
C'est cette fusion artistique, ce sens inné des oeuvres capables d'entrer dans l'Histoire, leurs rapports avec les artistes qu'Alain Pompidou et César Armand dévoilent dans cet ouvrage biographique et intime, riche de souvenirs, de témoignages et d'illustrations. À travers le récit de leur fils, les souvenirs de l'épouse de Jean Coural, directeur du Mobilier national, de Maïa Paulin, Pierre Soulages, Jack Lang et bien d'autres, ce livre révèle le parcours initiatique autant qu'affectif d'un couple pas comme les autres, mu par une insatiable curiosité.
Suite au très bel hommage envers sa mère l’an dernier, Alain Pompidou signe à nouveau un précieux document, cette fois coécrit avec le jeune journaliste César Armand, pour relater la passion de ses parents pour l’art sous toutes ses formes, de toutes les époques et de tous les avenirs.
Après une préface de Serge Lasvignes, président du Centre Pompidou, les auteurs remontent le parcours de l’ancien couple présidentiel uni par l’amour des lettres, de la musique, de la peinture. De l’art avant toute chose… art qui permettait de compenser la dureté du monde politique auquel l’un comme l’autre ont été confrontés.
Un livre à l’image d’un musée, un musée universel où tout se conjugue, à l’instar de cette citation de Paulo Coelho (p.43) cette « vie qui nous prend par surprise et nous ordonne d’avancer vers l’inconnu », on pourrait presque y ajouter ces vers de Werther « Quel trouble inconnu me pénètre »…
Il est rare que se côtoient en un seul ouvrage, la musique de Pierre Boulez, la peinture de Nicolas de Staël, les vers de Louis Aragon, la verve d’André Malraux, la magie de Maurice Béjart, puis découvrir avec le sourire une citation de Giuseppe Tomasi di Lampedusa…, le tout enveloppé de nombreuses anecdotes qui pimentent, parfois avec humour, la lecture. De nombreux paragraphes sont également consacrés à l’empreinte éternelle de Georges Pompidou : son Centre, qui ne fut hélas construit et inauguré qu’après le décès de son fondateur, mais qui a pu voir le jour grâce à la ténacité indéfectible de Claude Pompidou et de l’aide de quelques amis sincères.
Si l’ensemble n’est qu’un vaste et tendre enchantement, j’ai été subjuguée par le passage sur la fameuse fontaine Stravinsky, inaugurée en 1983, animée par les œuvres de Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely, ce dernier ayant illustré le poème visionnaire de Robert Desnos. C’est d’ailleurs par ces vers qu’Alain Pompidou a clôturé la présentation de son livre lors de la soirée de lancement au Centre Pompidou le 8 novembre dernier :
« D’une place de Paris jaillira une si claire fontaine
Que le sang des vierges et les ruisseaux des glaciers
Près d’elle paraîtront opaques.
Les étoiles sortiront en essaim de leurs ruches lointaines
Et s’aggloméreront pour se mirer dans les eaux près de la Tour Saint-Jacques »
S’ajoutent, de nombreuses annexes qui permettent de compléter ce voyage culturel et historique ainsi qu’un entretien d'Hervé Mikaeloff par Alain Pompidou, en épilogue, sur la création contemporaine et les nouveaux outils technologiques, où la pensée du Commissaire d'exposition d'art contemporian pourrait se résumer, entre autres, ainsi : la technologie au service de l’artiste et non l’artiste au service de la technologie, « l’artiste restant l’artisan d’une liberté absolue »
Celui qui a été bercé dans son enfance par Homère, ne pouvait qu’offrir une fresque, un chant sur la vision d’un monde de joyaux artistiques qui scellèrent un amour de deux êtres baignés dans une odyssée de contemplation. De l’art, splendeur immortelle…
« Ô muse, conte-moi l’aventure de l’inventif » (Homère)
http://squirelito.blogspot.fr/2017/11/une-noisette-un-livre-pour-lamour-de.html
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