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Ce livre propose un choix d'essais dans l'oeuvre du grand écrivain italien, écrits dans les années soixante, traduits ici pour la première fois. Ce sont des textes incisifs, politiques et polémiques, qui donnent à voir l'écrivain qui lutte pour le développement, le progrès, la justice - et qui deviendra ensuite, dans les années soixante-dix, une des consciences de l'Italie, avec Moravia et Pasolini. Les analyses proposées incarnent la voix d'un combattant pour la vérité, d'un opposant, d'un hérétique, d'un sceptique et d'un pamphlétaire, d'un homme qui combat les pouvoirs, les abus de pouvoir - et d'un écrivain à la sobriété exemplaire, qui aime la concision et manie l'ironie.
On reconnaît dans ces textes le premier auteur italien à écrire un roman sur la mafia - contre la mafia - au début des années soixante, à un moment où son existence est encore souvent niée (Le jour de la chouette).
Celui qui met en garde contre la compromission des partis de gauche qui gouvernent avec la Démocratie Chrétienne, d'abord en Sicile puis à l'échelle de l'Italie. Celui qui voit venir le « compromis historique » avec le Parti communiste (À chacun son dû, Le contexte) et ses conséquences politiques désastreuses. On perçoit également dans ces courts essais l'admiration que Sciascia porte aux grands écrivains siciliens : Verga, De Roberto, Pirandello... jusqu'à son contemporain Vittorini, à qui il rend un bel hommage post-mortem. Mais aussi le rapport difficile qu'il entretient avec Le Guépard de Tomasi di Lampedusa, le fameux roman à succès, qu'il juge trop pessimiste et trop indulgent envers les aristocrates. On y voit son attachement de Sicilien au passé plus ou moins mythique de la Sicile arabe et normande au Moyen Âge - un modèle de civilisation, peut-être de tolérance. On y voit enfin un écrivain qui persévère, qui ne se laisse pas détourner ni corrompre - même s'il lui arrive de se décourager - alors que les campagnes se vident, que la Sicile se vide, que l'émigration des Siciliens est au plus haut. « J'écris seulement pour faire de la politique », écrit-il un jour au réalisateur Elio Petri, qui s'apprête à adapter au cinéma À chacun son dû. Les textes réunis ici le prouvent.
Auteur d'essais autant que de fictions, Leonardo Sciascia (1921-1989) est le plus grand écrivain sicilien du XXe siècle avec Pirandello, l'une des figures centrales de la littérature « engagée » en Italie, l'une de ses voix polémiques les plus lucides et précieuses - que l'on pense à L'Affaire Moro, pamphlet contre l'élite politique italienne après l'enlèvement et l'assassinat d'Aldo Moro, ou aux films tirés de ses romans, comme Cadavres exquis de Francesco Rosi.
La Rochelle librairie Les Saisons mardi 16 février après-midi. Il pleuviote et comme il n'y a pas beaucoup de visite à faire en ces temps de confinement nous nous rapatrions vers une librairie comme d'habitude. Les garçons sont dehors et nous fouillons parcourons feuilletons avec Maritomio. Pour finir par tomber (entre autre, évidemment nous avons pris plusieurs livres) sur ce livre de Leonardo Sciascia.
Auteur sicilien dont nous fêtons cette année le centenaire de sa naissance et qui a fait graver sur son tombeau à Racalmuto, une citation d'Auguste de Villiers de L'Isle-Adam («Nous nous en souviendrons de cette planète»).
Ce livre est un ensemble de chroniques parues dans différents supports dans les années 60 et traduit et présenté tout récemment par Frédéric Lefebvre.
J'y découvre un auteur, rude et sans complaisance, profondément attaché à sa terre natale, riche des apports de tant de civilisations successives mais gangrenée par l'incurie. Région où "... il me semble que les réunions de personnes intelligentes produisent, je ne sais pas pourquoi, une bêtise infinie."
Quand il décrit la Sicile d'Ibn Hamdis du Livre de Roger il me vient des envies d'y filer subitement.
"La Sicile était sa patrie comme elle est la nôtre. C'était la maison, la famille, l'enfance, la jeunesse, les amis ; c'était la campagne et la mer, le goût particulier du pain et des fruits, l'odeur du vin, les fêtes et les jeux, les douces habitudes, les rencontres amoureuses ; c'était la terre de ses morts."
Sur des sujets aussi variés que la question de l'eau, son métier d'écrivain, la mafia, sa critique du Guépard... il livre une analyse fine et synthétique de l'humanité dans ce contexte sicilien.
"Voici le visage de l'homme d'Antonello de Messine, l'antique visage de l'homme sicilien, refermé sur son astuce existentielle, secrète, victorieuse. Il vit comme un animal, mais il pense comme un homme. Avec la pensée, il réussit même à rendre la vie plus complexe, plus difficile, plus tragique. Et ainsi il survit. Épuisé, peu nourri, mais libre et vif par l'esprit."
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