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À la fin de l'été 1940, Bianca Tosoni-Pittoni (1904-1993) décide de s'installer à Saint-Denis-d'Oleron, grâce au travail qu'elle y a facilement trouvé : employée à la mairie pour assurer l'interprétariat avec la Kommandantur locale. De nationalité italienne, ayant longuement vécu en Autriche puis en France, elle parle les trois langues et est considérée par les Allemands comme une ressortissante d'un pays allié.
Mais, si Bianca a quitté l'Italie, c'est par antifascisme. D'où l'ambiguïté de son personnage : les Oleronnais la prennent pour une collabo, et les Allemands - surtout après la chute de Mussolini - pour une ennemie, à cause de son caractère indocile. Ce qui l'emporte chez elle, c'est sa révolte à fleur de peau, d'où les portraits pimentés qu'elle tire de ses contacts avec les officiers allemands, d'où surtout le titre qu'elle donne à son journal de guerre : Oleron, jours douloureux.
Elle ressent en effet la double ambiguïté dont elle est l'objet et sait qu'une grande partie du poids de l'occupation du bourg dépend des bonnes relations entre mairie et Kommandantur, donc d'elle-même. Jours douloureux, enfin, parce que sa vie figure un pan de l'histoire européenne, celui de ces réfugiés sociaux-démocrates chassés de leurs pays par le fascisme et le bolchevisme. C'est d'ailleurs pour cela qu'elle se trouve à Saint-Denis-d'Oleron, auprès d'émigrés russes.
Les mots d'Arthur Miller, le grand dramaturge américain, très au fait de ce foyer de réfugiés, s'appliquent avec justesse au journal de Bianca : " Un de ces récits que seule une femme peut avoir écrit. Elle se tient à l'endroit même où les verges des grands événements entrent en contact avec la chair humaine, la brûlent, la blessent, la marquent. C'est toujours aux femmes qu'il revient d'assurer ce qu'il reste de vie dans de tels cataclysmes. "
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