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«Je crois que je n'aurais pas aimé être beau, c'est trop fragile, trop figé, en quelque sorte. On craint que ça s'abîme, que ça se gâche, toute cette beauté, alors on laisse son visage comme il est et on en oublie de faire des expériences avec sa tête. C'est plus créatif, les têtes de pitre et de bouffon.»Noé vient de perdre Beatriz, qu'il adorait. La disparition soudaine de celle qui vivait avec sa mère bouleverse son monde. Il rejette les adultes qui l'entourent et pense à son père, dont il vit l'abandon comme le voyage sans retour des cosmonautes. Les théories qu'il échafaude pour endiguer la violence qui le traverse ne suffisent pas, jusqu'à ce qu'il trouve enfin le moyen de dompter sa douleur.Porté par une écriture singulière, ce roman capture le mélange de tristesse et de lumière d'un gamin confronté aux fêlures du monde. Une exploration irrésistible de l'enfance dans ce qu'elle a de plus fragile, mais aussi de plus inventif et endurant.
Noé est triste, Beatriz n'est plus et sa mère est seule pour supporter le chagrin de l'absence. Beatriz, emportée par cette tâche qu'elle avait sur le poumon, à qui Noé voudrait tout donner pour qu'elle revive, pour que ce chagrin qui les submerge tous les deux, mère et fils, n'ait jamais existé. Mais chacun couve son chagrin dans son coin, car il est difficile parfois de partager, surtout lorsqu'il est impossible d'exprimer sa douleur, d'échanger, de se comprendre.
Comme Beatriz est enterrée en Espagne, il lui fallait une solution de substitution pour s'adresser à elle. Alors Noé a trouvé au cimetière une tombe qui lui sert de soupape pour faire partir tout ce chagrin qui le submerge, pour faire sortir toutes ces larmes. C'est là qu'il a rencontré Alexandre, lui-même confronté à son propre chagrin, sa douleur face à la tombe de cette mère qu'il n'a jamais aimée et qui a passé sa vie à courir après une ombre, celle de la poétesse russe Marina Tsvetaïeva.
Noé et Alexandre ont une faille en commun, ne pas savoir qui est leur père. Si pour Alexandre la déchirure est définitive, Noé peut nourrir l'espoir de rencontrer un jour celui qui a refusé de reconnaître son fils, lui préférant sa vraie famille. Une amitié va naître entre ces deux fils unis par le deuil.
Pour calmer son chagrin, Noé participe à un atelier de création cinématographique dans son quartier. Cette initiation à la créativité lui permet d'exprimer son chagrin et d'apprivoiser le deuil impossible, en réalisant un court film hommage à Beatriz et à Chabrol, qu'elle aimait passionnément et lui avait fait découvrir.
Un roman à hauteur d'enfance, au langage direct, vrai sans être caricatural, qui parle de mort, d'envies de suicide et de solitude, qui parle d'art salvateur, d'amitié protectrice, d'amour mais surtout qui célèbre la vie.
https://domiclire.wordpress.com/2022/09/14/ma-theorie-sur-les-peres-et-les-cosmonautes-pauline-desmurs/
Le film de sa vie
Ce premier roman de Pauline Desmurs raconte la difficulté à vivre d'un garçon sans père, vivant avec une mère trop absente et dont la mère de substitution est emportée par un cancer. C'est dans son imagination, et avec une petite caméra, qu'il va faire son deuil.
Noé est un solitaire. Un peu par la force des choses, parce que son père n'a jamais quitté sa femme, comme il l'avait promis, pour fonder une nouvelle famille. Il a préféré abandonner sa maîtresse avec son enfant, après lui avoir choisi son prénom. Sa mère, qui doit subvenir à leurs besoins, n'est guère présente. Et Beatriz, qui veillait sur lui et qui était quasiment sa mère de substitution, meurt d'un cancer foudroyant. Alors Noé trouve refuge dans son monde. Il préfère parler aux arbres qu'avec ses copains de classe et cherche à comprendre ce monde étrange, si difficile à appréhender. Un monde à hauteur d'enfant, où la naïveté le dispute à la poésie. Un monde que sa grand-mère, venue suppléer à l'absence de Beatriz, ne respecte pas – elle jette à la poubelle le petit mot écrit par Beatriz – et lui vaut l'inimitié de son petit-fils. Heureusement, trois personnes vont l'aider à relever la tête. Charlotte, la fille de la voisine, avec laquelle il peut partager sa peine. Alexandre, qui hante aussi les cimetières, et qui partage avec lui une quête d'un monde apaisé et Patrice, l'animateur de l'atelier de films, qui lui apprend à manier la caméra et voit en Noé un garçon plein d'idées. Il décide de lui confier une petite caméra. Dès lors, il va totalement s'investir dans son projet de film-hommage à Beatriz. Il oublie sa grand-mère, son père, même si ce dernier essaie de «rattraper l’irrattrapable» et madame-la-docteure-en-psychologie-de-l'enfance pour construire son scénario.
À 21 ans, Pauline Desmurs a su construire, en se mettant dans la tête d'un garçon d'une dizaine d'années, un univers protéiforme qui lui permet d’aborder différentes thématiques sur un ton allègre, avec beaucoup d'humour et ce, malgré le drame vécu. Il y a d'abord ce deuil, omniprésent, est qu'il est si difficile d'accepter. Il y a ensuite l'absence du père, un thème abordé par l'incompréhension, mais aussi la colère. Plus étonnant, la poésie et la littérature, à travers la figure tutélaire de Marina Tsvetaïeva dont les mots sont un baume pour tous ceux qui souffrent.
La langue poétique, c’est l’autre tour de force de ce roman. Pauline Desmurs a su trouver, entre les trouvailles de l’enfant et ce qui serait une écriture d’adulte, un style allègre, souvent drôle, qui emporte très vite le lecteur dans cet univers qui donne des couleurs au noir.
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Noé n’est pas un petit bonhomme ordinaire. Très affecté par le décès de Beatriz, la compagne de sa maman - d’autant plus qu’il est déjà psychologiquement fragilisé par un père fantôme et l’absence d’amis, excepté la fille de la voisine et un certain Alexandre, un vieux monsieur sibyllin qui hante les cimetières – il se noie dans l’imaginaire tout en gardant un pied sur terre. Une dichotomie confondante qui va porter le lecteur vers l’univers du jeune adolescent qui voit une lueur réelle apparaitre lorsqu’il rencontre Patrice pour un atelier cinéma. L’art va permettre de catalyser les idées du jeune garçon ; idées certes saugrenues mais délicieusement créatives. Avec l’aide indirecte de Claude Chabrol…
Un premier roman très prometteur pour la jeune Pauline Desmurs – 21 ans ! Elle s’immisce parfaitement dans l’esprit du garçon avec des mots choisis qui virevoltent sans cesse entre un monde abstrait et un monde concret. Tout ce qui tourne autour du deuil est évoqué avec beaucoup de tact et chaque réflexion est judicieusement amenée. Point d’orgue : le mode d’emploi pour une révolution avec le rire (page 100 s’il vous plait). Quant au cinéma, il fait partie de cette forme d’art qui peut mener vers la résilience grâce à son pouvoir créatif. Car créer c’est vivre.
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