"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Au centre, il y a Philippe. Philippe qui vit dans une cité et passe ses journées à traîner, fumer et piquer des bières au centre commercial. Philippe, entouré d'une mère qui le déteste ouvertement, d'un père effacé qui a renoncé depuis longtemps et d'un frère aussi beau que bête.
À côté, il y a Bruno, son pote baroudeur et destroy. Bruno qui raconte qu'il a fait le tour du monde, a connu les plus belles femmes, qu'il n'est là que de passage, avant son prochain voyage.
Autour, il y a Gros Riton, P'tit Louis, Mme Piccini, La Vieille, Flora avec ses seins d'enfant et Anne, la plus moche des moches. Et puis il y a les canards du parc qui s'étouffent avec des bouts de plastique, les grues et les murs qui tiennent avec les dealers, les gamins qui crient trop fort aux pieds des barres d'immeubles.
Les petites violences du quotidien n'atteignent pas Philippe, tant qu'il y a de la bière et les histoires de Bruno pour inventer un autre horizon que celui des tours de béton.
Jusqu'à ce qu'un drame vienne pulvériser son équilibre de papier et déclenche la bombe à retardement...
Lire ce livre c'est comme recevoir un coup de poing dans le ventre : soyez averti !
Il y a une vraie, lourde intensité qui plane sur cette histoire.
C'est dur, froid, une lame…
Je l'ai lu en ces derniers jours de grisaille et il faut bien dire que ça n'a pas réchauffé l'atmosphère. J'ai même l'impression que l'air s'est raréfié.
C'est une lecture hypnotique qui m'a beaucoup fait penser au film La Haine…
Tu la sens la réalité, comme elle peut être brutale ?! Tu la sens la rage de ne pas vivre ce que tu devrais ? Les jours se suivent qui se ressemblent tous ou presque, la codéine, l'alcool, la dope pas trop coupée, les mecs qui se la racontent, les filles, la violence ordinaire… Il n'y a pas d'espoir?!
Philippe, c'est un mec ordinaire de la cité. La cité qui empoisonne, la cité qui emprisonne, la cité qui défigure, la cité qui emmure. Son pote Bruno a tout vu, tout fait, toujours en quête d'un auditoire avec ses tours du monde et ses aventures exotiques. Bruno parlerait à un tas de cailloux.
Entre une mère marâtre, qui le délaisse complètement au profit de son frère aîné, un bellâtre, coureur de jupons, un père totalement effacé et craintif, et toute une panoplie de relations plus ou moins toxiques, Philippe devra user de tout son courage, de toute son intelligence et de toutes ses convictions pour s'en sortir… Sans travail, sans but, sans bagage, il déambule, il glande, jusqu'au drame auquel il assiste et qui bouleverse tout… le compte à rebours a démarré jusqu'à l'inévitable.
« Les Yeux fumés » est un roman coup de poing, qu’on aime ou qu’on déteste. Sordide, glauque, dramatique…tellement banal en fait ! Entre crasse et béton, désespoir et perdition, violence et addiction, on s'englue dès les premiers chapitres dans la funeste existence d'un héros qui n'en a pas l'étoffe. Philippe n'est pas armé pour réussir dans la vie, malgré son envie et ses espoirs, et les parasites qui lui gravitent autour sapent sa moindre tentative de relever la tête. Ainsi se dévoile la vie quotidienne de la cité, souvent désolante et parfois violente.
L’histoire se déroule en deux parties avec un avant et un après le drame auquel il assiste impuissant, incrédule et qui le plonge dans un désarroi et la folie.
On peut dire que j’ai éprouvé de la sympathie et surtout de la compassion pour ce jeune adulte paumé qui ne demande qu’un peu d’amour et de considération. Attachant dans sa naïveté, sa solitude, son exclusion, ses rêves brisés.
Dans un style percutant, sobre, nerveux, réaliste, l’auteur livre un roman brut, sans fioriture, écrit à la première personne, ce qui permet une immersion totale dans le microcosme proposé et offre un premier rôle à un anonyme né pour le rester. Nathalie Sauvagnac y montre l’ennui, la débrouille, la peur, la violence, dans ces quartiers, fermés sur eux-mêmes. Le texte est vif, souvent cru, le regard est sans concession, mais toujours juste et bienveillant.
Une véritable pépite de noirceur, de plus en plus intense, jusqu’à l’implosion, d’une grande intensité psychologique et émotionnelle, mais compensée par l’humour du narrateur, que j'ai dévorée d'une traite. Le livre refermé, on en sort désemparé et pour ma part, il me hante encore. Pourtant, pour tout dire, à première vue, ce livre ne m’emballait pas vraiment mais le récit est très immersif, et une fois entré dans la cité, dans cet univers parallèle et pourtant si proche, impossible d’en sortir.
Nathalie Sauvagnac dépeint à la perfection cette difficulté de passer de l’enfance à l’âge adulte, et les conséquences dramatiques sur les plus faibles, les plus démunis, les « oubliés ».
Si vous êtes allergique aux romans noirs, âpres, rudes, passez votre chemin. Mais si vous recherchez le frisson, attendez-vous à être emporté par cette vague d’émotion de la misère à l’état brut.
La fumée.
Celle qui embrume le regard. Celle qui bouche des horizons. Celle qui voile tout.
Elle est partout dans ce roman.
Elle empêche de voir, de se voir. Elle salit tout autour d’elle. Elle embrume les cerveaux. Elle brûle dans les yeux de cette femme à genou …
A peine si on distingue Philippe, anti-héros malgré lui d’une fable cruelle et moderne. Perdu entre les tours de cette ville tentaculaire, de ces quartiers oubliés.
Philippe a dix-huit ans et à l’âge de tous les possibles, tout lui semble bouché. Il traîne en bas des tours, une certaine forme de désespoir mais une envie d’accomplir quelque chose. Même s’il ne sait pas exactement quoi.
Il traîne. Au fil des pages. Au milieu d’une galerie de personnages étranges et pourtant si quotidiens. Le lecteur s’arrête et regarde enfin vers ces endroits où il a plutôt l’habitude de détourner les yeux.
C’est dur. Lorsque personne ne semble tendre la main. Lorsque la famille tourne le dos. Que la société vous ignore. Le béton à en perdre la vue …
C’est un roman sur l’absurde ironie d’exister. Sur les détresses invisibles.
J’ai aimé ma lecture. Elle pique un peu. Elle étonne et détonne dans le paysage littéraire. Ni tout à fait roman noir, ni tout à fait critique sociale. Doux amer. Un roman désenchanté qui laisse un goût amer. Celui de l’échec d’une certaine humanité.
Nathalie Sauvagnac laisse entendre une voix originale, singulière et percutante, pleine de vérité. Un regard sur ceux qu’on ne voit pas, perdus dans les volutes de ces quartiers oubliés.
Un roman bien sombre que voilà ! L’auteure ne ménage pas son personnage, dont la vie ordinaire et sordide, ne lui laisse aucune porte de sortie. Ce n’est pas faute de vouloir s’en sortir, mais il a beau avoir une famille, personne ne fait attention à lui, ses amis n’en sont pas vraiment, avec lesquels il ne partage que les beuveries… Il est seul, sans travail, sans avenir, sans aucune lumière à l’horizon…
Philippe, va perdre pied… Il ne maîtrise plus rien. Alors que l’auteur maîtrise son intrigue, avec une symbiose déconcertante entre elle et son personnage qu’elle incarne à travers une violence, doublée d’une grande sensibilité. Le tragique côtoie la souffrance. Un roman sombre, qui perd de sa vigueur vers la fin, sans pouvoir mettre en valeur le final inattendu.
Un roman, qui porte un regard sombre sur les cités, sur ces jeunes qui tentent de trouver leur place sans parfois pouvoir atteindre leur rêves. Les bars d’immeuble, le béton servent de décor pour sublimer ce bouquin atypique.
C’est un mec ordinaire, qu’on remarque à peine. Encore moins dans la cité où il vivote, où seuls les caïds en BM ont droit de… cité. Il s’appelle Philippe, mais ça n’a pas d’importance. Il stagne dans l’ombre de son frère, et ses parents sont des cons qui pourraient le laisser passer l’arme à gauche au milieu du salon sans lever les yeux sur lui – ils se contenteraient de l’enjamber comme quelque chose qui gêne. Son pote Bruno, c’est l’inverse. Bruno a tout vu, tout fait, Bruno parlerait à un tas de cailloux, toujours en quête d’un auditoire à saouler avec ses tours du monde et ses aventures exotiques. Pas qu’on le prenne au sérieux, non, c’est un divertissement, un baba-beauf pas méchant. Mais il n’est pas très malin non plus, et il va vraiment se fourrer dans de beaux draps… Le cercle d’amis de chacun se limitant à l’autre, Philippe se sent obligé de lui venir en aide. Pour ça, il faudrait qu’il retrouve Bruno, qui s’est évaporé dans la nature. Qu’il le retrouve vite, parce que cette fois, c’est grave. Ce n’est ni un petit larcin ni une querelle entre gangs de pacotille dans laquelle il aurait fourré son nez. Cette fois, Bruno a balancé une grenade, et ça ne va pas tarder à péter.
Entre crasse et béton, désespoir et perdition, on s’englue dès les premiers chapitres dans la triste existence d’un héros qui n’en a pas l’étoffe. Philippe n’est pas armé pour réussir dans la vie, et les parasites qui lui gravitent autour sapent sa moindre tentative de relever la tête. J’ai éprouvé de la sympathie pour ce jeune homme paumé qui voudrait parfois mieux faire sans savoir comment. On sent d’emblée qu’on ne le tirera pas de ses galères, trop familières pour ne pas susciter un certain malaise, et l’on n’a pas d’autre choix que de le suivre, et d’accepter qu’il se recueille. La frontière entre auteur et personnage se fait de plus en plus ténue, jusqu’à ce que les deux se confondent et qu’on en oublie qui parle. Nathalie Sauvagnac m’a donné l’impression d’incarner Philippe, dans un style dépouillé, nerveux, réaliste, offrant un beau premier rôle à un anonyme né pour le rester. Un très bon point. Mais dans le dernier tiers de l’histoire, je me suis laissé gagner par son oisiveté, et je regrette que la tension n’ait pas continué de croître, que le potentiel pressenti n’ai pas été suffisamment exploité à mon sens, pour mettre en valeur le final inattendu.
Le mot de la fin : avis nuancé tendance « positif ». Un roman bien fichu tout de même, qui poisse les doigts.
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