La bataille suprême est engagée :
Il y a quatre-vingts ans, le général de Gaulle déclare, au matin du 6 juin 1944, sur la radio de Londres, que les Alliés ont engagé « la bataille suprême », ce « choc décisif » pour la libération de la France. Américains, Britanniques, Canadiens, Australiens, Néo-Zélandais, mais aussi dautres soldats issus de nationalités européennes et quelques militaires français, débarquent en Normandie pour libérer le territoire national du joug nazi et se débarrasser du régime de Vichy, « dont la défaite, écrivait le philosophe Vladimir Jankélévitch, est non seulement lorigine, mais la raison dêtre et la gloire ». La résistance intérieure, qui a contribué par le renseignement et les sabotages au succès du Débarquement, sengage alors aux côtés des Alliés dans la lente reconquête du territoire national.
Il y a quatre-vingts ans, la seconde guerre mondiale entre dans une nouvelle phase, celle de la reddition inconditionnelle du IIIe Reich, qui interviendra onze mois plus tard, le 8 mai 1945. Prise en étau entre le rouleau compresseur soviétique dans lest de lEurope et larmada anglo-américaine à louest, lAllemagne nazie, qui na pas encore dit son dernier mot, étouffe lentement et entame son inévitable agonie.
Il y a quatre-vingts ans, le débarquement du 6 juin ou les débarquements en France, les Alliés ayant aussi libéré la France par le sud, lors de la reconquête de la Provence durant lété 1944 fait son entrée dans lhistoire et marque pour toujours les consciences, jusquà devenir une source inépuisable dinspiration pour la création artistique et littéraire, toujours vive huit décennies après les faits. Lhistoire du D-Day est désormais connue dans ses moindres détails. Les historiens sen sont saisis pour relater, décrire et raconter dans sa réalité la plus crue les préparatifs du Débarquement, les opérations tactiques et le sacrifice de ces jeunes soldats qui, pour la plupart, ne connaissaient rien de la France quils venaient libérer. Pour la recherche constante de vérité, le travail scientifique ne se limite pas à lhistoire militaire. Il soulève aussi des questions douloureuses, comme les bombardements alliés des villes françaises ou les exactions commises par les troupes allemandes et la Milice française aux abois.
Avec ce hors-série, Le Monde revient sur cette opération « Overlord », point de départ de la longue marche vers la victoire finale, totale et durable. Car le débarquement du 6 juin, ce nest pas uniquement le déploiement exceptionnel dune force militaire inégalée dans le temps ; ce nest pas uniquement une tête de pont qui, le soir du 6 juin, ouvre la voie à la bataille de Normandie. Cest aussi une mémoire, un hommage et un héritage. Cest une mémoire portée par les militaires rescapés du D-Day et dont la lecture a évolué, selon les pouvoirs se succédant en France et létat de la paix dans le monde. Cest un hommage rendu aux héros tombés sur les plages de la Manche ou dans le bocage normand, un souvenir que leurs frères darmes et les peuples libérés cultivent avec gravité et dignité. Cest enfin un héritage, car si la guerre divise par nature, le Débarquement rassemble les peuples. De Moscou à Washington, de Londres à Rome, de la mer du Nord aux côtes de la Méditerranée, le débarquement du 6 juin, qui marque le retour de la paix sur ce continent défiguré par les guerres, est avant tout une victoire contre la barbarie. Aux lecteurs et lectrices du Monde de semparer de ce numéro spécial pour célébrer la paix et la liberté.
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