"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Yannick Le Marec poursuit avec Le Grand Pillage sa réflexion sur le récit colonial (dans la continuité de la Constellation du tigre qui relate notre rapport aux animaux sauvages) ; il interroge cette fois notre relation au lointain où la guerre, l'art et la littérature sont parfois intimement liés.
Pour ce faire, il suit deux écrivains militaires qui ont accompagné la marche impériale de leurs récits ou de leurs correspondances : Pierre Loti et Victor Segalen.
C'est par Pierre Loti que s'affine notre connaissance des pillages du XIXe siècle, à l'île de Pâques, au Tonkin ou à Pékin en 1900 pendant la guerre des Boxers. L'objet pillé est d'abord un trophée avant de prendre le statut d'oeuvre d'art.
À travers les lettres quasi quotidiennes de Segalen à sa femme Yvonne, ou ses photographies, on se retrouve dans les mers du sud ou en Chine - entre chevauchées et rencontres, grands paysages et imaginaire. Mais Segalen, médecin humaniste, tente d'échapper au quotidien et au local, feignant d'ignorer qu'il marche dans les pas de ses gens, souvent irrité de devoir faire allégeance aux autorités - attentif à tout. Il est à la fois poète et le représentant d'un Occident impérial et hautain, capable lui aussi, malgré tout, d'un geste sacrilège, qu'il excusera par la création littéraire.
Ce cortège des violences fonde la richesse de nos collections privées et publiques.
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