"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Mais qui est donc Emma Nizan, cette jeune femme qui cherche à rencontrer le maire fraîchement élu de Nevilly ? On ne le sait pas, puisque Maxime Ronet s'efforce, bien malgré lui, de reporter ce rendez-vous. Une fois, deux fois, trois fois... Le jeune Ronet espère faire de la politique autrement, il veut bouger les lignes, être disponible pour chacun de ses administrés... Mais la gestion quotidienne de sa commune de 59 629 habitants et de 86 millions d'euros de dépenses annuelles de fonctionnement va lui faire perdre de vue la raison de son engagement. La rencontre ratée avec Emma Nizan vient le rappeler à l'ordre...
Dans le style qui le caractérise depuis son premier roman (Rester Sage, Alma 2012) - chapitres aussi courts que ses phrases - et avec la légèreté de celui qui ne se prend pas au sérieux, Arnaud Dudek aborde des sujets au plus près du quotidien, et raconte les gens ordinaires avec tendresse et bienveillance par petites touches, le sourire en coin.
« Tout changer pour ne rien changer »
Toute ressemblance avec des personnages existants…. Vous connaissez la suite. Arnaud Dudek utilise notre actualité politique un peu comme un fil rouge, sans jamais nommer le parti concerné.
Maxime Ronet veut faire de la politique, « penser en actes. » Il doit l’opportunité de se faire connaître en écoutant un ponte du mouvement gémir sur son mal de dents, même pas pour ses aptitudes, non parce qu’il a su écouter Maurice Garaud ! L’ascension se fait un peu plus rapide et la descente sera à pic suite à une vidéo sur youtube ! C’est ça la politique !
La recette de Garaud :
« Pour réussir en politique jeune homme, il faut de la chatte » Non ce n’est pas ce que vous pensez au premier degré, même si cela sert, à condition de viser la bonne personne. Non, là il s’agit de « Curiosité, Hardiesse, Acharnement, Timing, Énergie ... Il manque un T… N’oubliez pas d’être un Tueur. »
Et...
« Le 29 mars 2020 à 20 heures, à l’issue d’une belle campagne, Maxime Ronet devient le trente-cinquième maire de Nevilly, 59 629 habitants et 86 millions d’euros de dépenses annuelles de fonctionnement. »
Maire et membre du Mouvement qui veut soit-disant faire du neuf « Même si les idées présentées comme nouvelles sont de simples réorchestrations d’idées volées aux autres camps, le jeu en vaut la chandelle. »
Pour les politiciens, de quel côté penche la balance, c’est ce que certains journalistes ont dit à propos de Chirac, a conquête du pouvoir. « Maxime se demande s’il ne préfère pas la conquête du pouvoir à son exercice. Il n’est pas le seul à se poser cette question. »
Maxime Ronet reste une bête politique, malgré certain revers. Il a fallu un grain de sable, le suicide d’Emma Nizan qui n’a jamais pu obtenir un rendez-vous avec lui. « Maxime mettra un certain temps à reprendre le contrôle de son esprit, de ses sens ; il ne les retrouvera pas intacts. » Cette mort le hante « Emma Nizan m‘a dévasté, moi qui ai refusé de la voir… Il faut beaucoup de courage pour se tuer, vous ne trouvez pas ? Moi j’aurais pu… je sais pas… J’aurais pu la convaincre de vivre. Je suis né pour ça, convaincre. »
Toute son vernis politique est parti, l’animal politique est mort, l’homme renaît. « Après ce suicide, reprend-il, je me suis dit que les combats que je menais, les mots que je prononçais, les victoires que j’obtenais ne servaient à rien, ou presque. Que je jouais un rôle ; Que je m’étais laissé un peu trop porter par le vent de l’ambition -la mienne, et celle qu’ont les autres pour moi. Que j’avais tourné le dos aux raisons de mon engagement politique. »
Arnaud Dudek raconte la difficulté d’être maire actuellement avec les Comcoms qui ont pris tout le sel ne laissant que le poivre et les embêtements.
« On a transféré presque toutes nos compétences à la communauté de communes. On ne décide plus car c »est l’intercommunalité qui pilote, mais c’est à nous de faire passer les décisions… Un maire ne fera plus trente ans de mandat parce qu’il va s’emmerder royalement. La fonction perd de sa saveur, de son sens. Bon, c’est mon point de vue de petit maire. »
« Quand j’ai été élu, je me rêvais en chef d’entreprise de ma ville. Or j’ai l’impression de n’être qu’un prestataire de services… Entre les citoyens et leur maire, on est de plus en plus dans une relations individualiste, consumériste… »
« Il oscille entre pouvoir et impuissance -s’étonnant chaque jour un peu plus que l’aiguille bascule aussi vouent du côté de l’impuissance. »
Pourtant, il en faut du courage, de la bonne volonté, voire de l’abnégation, pour être édile, surtout d’une petite commune où le maire peut-être à la fois, lorsque le besoin est là, shérif, éboueur, cantonnier, chauffeur… sans rien attendre en retour. Là, la politique ne joue pas, il n’y a que l’humain qui se bagarre contre les moulins à vent de la politique politicienne. C’est une des raisons qui font que beaucoup de maires ruraux ne désirent pas se représenter.
« Les partis traditionnels ont une image désastreuse. A force d’entretenir la confusion idéologique, faute d’avoir su mettre leur discours en cohérence avec la réalité de leur pratique du pouvoir, la gauche et la droite sont en lambeaux. J’ai cru que le Mouvement livrerait un logiciel politique plus moderne. Grossière erreur : c’est une plate mouture du même libéralisme qui sévit depuis bient quarante sur la planète, et qui ne fédère déjà plus…. Il faut tout réinventer, Maxime. C’est le moment ou jamais. Sinon, ce sera comme en Italie, l’extrême droite et les antisystèmes de L’union vont se coaliser et prendre le pouvoir. »
Démonstration est faite.
Merci Arnaud Dudek pour ce très bon bouquin livrant une analyse à laquelle j’adhère.
A l'heure où le jeu politique ressemble à un chamboule-tout, où les hommes politiques ne font pas vraiment le plein côté popularité, c'est pourtant bien à un jeune politicien qu'Arnaud Dudek décide d'offrir le premier rôle dans ce roman qui n'a rien de manichéen. Pas une once de cynisme mais un regard bienveillant. Aucune naïveté mais une vraie tendresse pour ce spécimen qui doit ressembler à tant de ceux qui pensent un jour avec sincérité qu'ils peuvent œuvrer efficacement au service du bien public. Avec un ton juste et un style aérien, Arnaud Dudek nous offre une plongée dans la complexité du quotidien d'un maire, tiraillé entre ses multiples responsabilités, ses ambitions politiques au sein d'un jeune mouvement en pleine ascension et la gestion de sa vie personnelle.
Les références et les clins d’œil sont loin du roman à clés, simplement destinés à ancrer des éléments de contexte familiers dans l'esprit du lecteur. Maxime Ronet a débuté sa carrière par hasard au Parti, avant de suivre son mentor lorsqu'il a rejoint le Mouvement emmené par un jeune politicien devenu depuis Président de la République. Suivant l'exemple de son aîné et sa dynamique, voici Maxime Ronet, en mars 2020, élu maire de Nevilly après une campagne enthousiaste et hyperactive. Très vite, le jeune homme se frotte aux limites de sa fonction face aux sollicitations ininterrompues et tous azimuts de ses administrés ; très vite affleure une question qu'il ne s'était jamais réellement posée : celle du sens de son engagement.
Arnaud Dudek parvient à faire sentir le quotidien trépidant de Maxime sans jamais devenir pesant, ni sérieux. Ce livre n'est pas un roman politique mais un roman sur un homme qui choisit de faire de la politique, sans trop savoir pourquoi au départ. On sourit souvent de ses tribulations, et même lorsque le drame pointe - parce que dans la vie, il y a forcément des drames - aucune chape de plomb ne s'abat sur le lecteur. Au contraire, le cheminement du héros prend une ampleur intéressante, à l'encontre des idées reçues. Et c'est cet équilibre, cette justesse de ton qui font tout le plaisir pris par le lecteur à la compagnie de Maxime Ronet, l'homme qui voulait laisser des traces.
"On démarre, on avance, on se tient droit, bien droit entre le sol et le ciel. On trouve sa cadence, sa foulée, son rythme, les obstacles on ne les voit pas - pire, on les piétine. On ne sent plus son corps, les tuyaux, les rouages, on plane, et le but que l'on s'était fixé, on se dit qu'on va bientôt l'atteindre. Au passage, on a abandonné un peu de soi, oh trois fois rien, un peu de conscience, un peu de candeur, deux ou trois gouttes d'humanité, on a troqué tout cela contre des yeux secs et un costume d'ambition. On se croit imperméable à tout. Mais voilà. Un jour. Un brouillard. Nous traverse."
(chronique publiée sur mon blog : www.motspourmots.fr)
Arnaud Dudek possède une grande facilité d’écriture. Simplement, avec humour et tendresse, il croque parfaitement les petits travers de l’air du temps. La simplicité des citoyens d’une petite ville de province devient alors le trésor de notre époque, bien plus lumineuse que l’hypocrisie de politiciens qui laisseront peut-être un nom à la postérité mais peu d’affect dans la mémoire des gens. Le mystère d’Emma Nizan guide un récit vif, moderne qui pousse le jeune Maxime Ronet à découvrir le véritable engagement d’une vie.
Maxime Ronet a toujours eu l’ambition de faire de la politique avec la volonté de se rendre utile. Un parcours rondement mené l’a conduit à la tête de Nevilly, une commune de près de soixante mille habitants, avec comme objectif de faire mieux que ses prédécesseurs. Depuis son élection, il n’a pas une minute pour lui entre les réunions, les inaugurations, les diverses demandes qu’il veut honorer. Ce jeune maire dynamique et plein d’entrain membre d’un nouveau parti politique s’investit corps et âme. Il se veut droit et serviable, et espère un jour qu’on se souviendra de lui avec reconnaissance.
Souriant avec le bon petit mot qui va bien, la poignée de main cordiale, il a tout pour réussir jusqu’à ce qu’il commette un faux pas. Une erreur ou un lapsus ? On ne sait pas trop d’ailleurs. Pour redorer son blason, Maxime met les bouchées doubles jusqu'à ce qu'un dramatique accident survienne. Profondément ébranlé, ce jeune loup de la politique abandonne ses rêves auréolés de vanité et renoue avec ses idéaux sans être naïf. Il nous apparaît plus humain. Plus modeste aussi.
Sans temps mort avec des pointes d’ironie caustique et cette tendresse infusée par petite touches au détour d’une phrase, ce roman doux-amer et réaliste se croque comme une petite friandise.
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