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Le 11 septembre 1973, ils avaient des noms.
Ils s'appelaient Anselmo Radrigan, Vicente Garcia, Juan Aguirre, Alicia Herrera... La liste comporte au total 1198 noms. Beaucoup d'entre eux étaient des militants de la gauche chilienne. Arrêtés après le coup d'État, on ne les a plus revus. On suppose qu'ils ont été tués. On le suppose, on ne le sait pas avec certitude. Dans leurs foyers, le souvenir s'installe. Dans leurs foyers, père et mère, soeurs et frères peuvent préserver l'illusion que leurs êtres chers ne sont qu'absents.
La mort menace, cogne aux fenêtres, mais n'entre pas. Puisqu'on n'a pas vu. Puisqu'on ne peut constater qu'ils sont morts. Puisqu'on ne sait pas où ils sont. Sur la liste des 1198 noms figure un entête. Il y est écrit Disparus. Cet ouvrage porte son attention sur une modalité de l'assassinat politique où la mort brutale devient, paradoxalement, mort lente. Entre 1973 et 1989, les services de renseignements de la Junte Militaire chilienne ont fait disparaître 1198 prisonniers.
Depuis, le débat politique admet une question récurrente : "que faire des disparus ?" et une réponse implicite : "il faut les retrouver". Deux questions sont privilégiées dans le présent ouvrage Comment passe-t-on d'une politique du "faire disparaître" à une politique du "faire apparaître" ? Que veut dire "retrouver les disparus" ?
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