"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
«J'ai toujours cru que j'écrivais sur les hommes. Avant de m'apercevoir que je n'écris que sur les femmes. Sur le fait d'en être une. Écrire sur les putes, qui sont payées pour être des femmes, qui sont vraiment des femmes, qui ne sont que ça ; écrire sur la nudité absolue de cette condition, c'est comme examiner mon sexe sous un microscope. Et j'en éprouve la même fascination qu'un laborantin regardant des cellules essentielles à toute forme de vie.»
Que dire de cet ovni littéraire ?
Le sujet est connu, une écrivaine choisit d‘intégrer une maison close à Berlin, en devenant elle même une pute, oui je conserve le terme qu’Emma Becker préfère à prostituée. Beaucoup d’écrivains ont parlé de ces femmes qui exercent le plus vieux métier du monde, mais peu de femmes s’y sont risquées. Emma y va, de façon crue, directe « Ce n’est ni un caprice ni une fantaisie d’écrire sur les putes, c’est une nécessité. C’est le début de tout. Il faudrait écrire sur les putes avant que de pouvoir parler des femmes, ou d’amour, de vie ou de survie. » C’est étonnant, surprenant, au début totalement déstabilisant, voire dérangeant et puis on s’habitue à ces mots durs qui disent les choses sans tourner autour du pot : un con est un con.
On peut trouver à redire sur ce récit immersif, sur cette expérience de pute mais finalement on se prend à tenter de comprendre ces femmes qui pour certaines ont choisi d’être ce qu’elles sont, à temps plein ou de façon occasionnelle, qui plus est à la Maison où elles sont libres et indépendantes, ce qui est loin d’être le cas partout, et qu’Emma / Justine (son nom de scène) ne tente pas de dissimuler, loin s’en faut !
Les putes ne sont pas pour toutes les femmes des « héroïnes de notre imaginaire érotique », et il ne s’agit en aucun cas de faire l’apologie de la prostitution, mais Emma B. tente d’expliquer ce qui les pousse à en devenir une, ou ce qu’elles ressentent, ce qu’elles éprouvent au bordel et en dehors de ce dernier. Il y a beaucoup de tendresse dans ses propos, tant pour ses collègues que pour certains clients et de sensualité malgré le lieu et le contexte , enfin de ce que j’avais imaginé de ce que pouvait être ce métier. Car finalement n’est-ce pas un métier comme un autre (au moins quand il est encadré comme c’est le cas en Allemagne et plus précisément à la Maison) ? « Bien sûr que c’est moins tragique d’être à la Maison plutôt que chez Lidl à s’escrimer pour un salaire ridicule ; la seule supériorité de la caissière sur la pute, c’est de pouvoir dire sans rougir ce à quoi elle occupe ses journées. Quoique sans rougir ... »
Alors oui parfois on tourne en rond, il y a des redondances, on sent la recherche de justification sur un sujet qui divise, mais au moins le débat est ouvert et c’est une femme qui le mène et avec une grande sincérité ! C’est déjà un bon début non !?
Emma Becker nous propose son expérience dans les maisons closes allemandes. Pour écrire sur le sujet, elle a voulu elle-même se prostituer pour nous livrer son expérience. Elle nous livre un récit percutant sur le désir féminin, émouvant de part ses portraits de prostituées ou de clients et parfois déroutant sur ses expériences parfois difficiles. La plume est délicate et sensible, mais le manque de fil directeur, de structure du récit m'a considérablement gênée. J'ai peiné à terminer son livre et c'est dommage car je pense que nous découvrons une très grande écrivaine !
Un peu plus de deux ans d’immersion dans une maison close de Berlin... voilà le défi relevé par Emma Becker, qui, voulant écrire sur les prostituées, n’a trouvé meilleur moyen que de devenir l’une d’elles...
Démarche extrême ? Mais extrêmement honnête surtout... et édifiante, et instructive...
Les angles d’observation et de réflexions sont multiples, le rapport au corps et à la sexualité, le désir, le plaisir, l’argent, la féminité, les hommes, leurs attentes, les rapports de pouvoir et de séduction.... c’est riche et fourmillant, vivant, questionnant, parfois dérangeant...
C’est aussi (et surtout ?) un bel hommage à la Femme, aux femmes, à celles-là tout particulièrement, dont il est heureux que quelqu’un parle....
S’il avait titillé ma curiosité à sa sortie, je n’aurais pour autant probablement pas acheté ce livre...
Je remercie ma sœur pour ce cadeau, doublé d’une dédicace de l’auteure... ce livre va prochainement voyager et en pousser d’autres que moi à ces réflexions, ces sourires, ces découvertes...et à regarder un peu différemment les femmes qu’on croise...
Vraiment, une lecture que je recommande...
J'ai une tendresse pour cette jeune femme si belle et si gentille; quand je l'ai rencontré, je n'avais pas encore lu son dernier livre et n'en connaissais que le sujet qui m'intriguait : une immersion dans une maison close, elle s'y infiltrait incognito comme une journaliste et surtout l'intention de faire un livre sur cette expérience qui a duré deux ans.
Elle a maintenant un fils et un lit qui vient de la liquidation de la Maison. Dans sa vie, il y a eu Joseph à qui elle a offert une partie à trois pour ses 21 ans: fiasco total mais une drôle d'idée quand même qui augure bien de l'intérêt de la jeune femme pour la sexualité; puis il y a eu Stéphane, marié et plus âgé que son père, toujours jaloux d'Arthur: celui qui lui a dit qu'elle serait une excellente pute.
C'est un peu un défi qu'elle relève.
Cela se passe à Berlin où c'est légal; sa première expérience est négative au Manège qu'elle quitte avant de découvrir La Maison où elle se sentira vite bien. Jalousie et camaraderie entre les filles, diversité entre les clients. Cela ne m'a pas paru pornographique (contrairement à certains livres de Houellebecq ou Despente)et j'ai aimé l'écriture simple et l'analyse psychologique des personnages et d'elle-même. On voit aussi qu'elle aime lire et a de la culture .
Evidemment cela pose le problème de l'insertion, elle est un peu voyeuse et sait qu'elle arrêtera quand elle le voudra contrairement à la plupart des autres filles qui sont obligées d'en passer par là si elles veulent une vie aisée où elles peuvent se payer du luxe ou juste honorer les factures de la famille. Il n'y a pas de proxénète, pas de maffia. Cela me fait regretter l'interdiction de ces maisons qui évitent le racolage dans les rues et permettent à certains hommes d'éviter de plus gros problèmes. Certes les clients sont parfois déconcertants et il y a un certain humour dans le récit.
La maison d'Emma Becker chez Flammarion.
Un livre sur la prostitution! Une certaine forme de prostitution! La prostitution choisie d'Emma Becker! C'est intriguant! C'est la curiosité qui m'a poussée!
Une expérience audacieuse. C'est osé, c'est assumé, c'est courageux! Intéressant, mais au fil des pages, pour moi, un peu confus dans la chronologie et des longueurs qui ont fini par devenir pesantes.
Un sacré bout de femme! Une auteure à suivre!
Emma Becker fait pénétrer dans un univers interlope et peu connu : celui des maisons closes allemandes. Le sujet attise la curiosité pour son aspect inhabituel et fascinant, en particulier en France où la prostitution est prohibée. J’ai été intéressée par la plongée dans le quotidien des travailleuses du sexe, leurs états d’âme, leurs difficultés, les liens qu’elles tissent avec leurs consœurs et, parfois, leurs clients. Le roman est, de ce point de vue, touchant, mais aussi féministe. J’ai en effet apprécié le regard de l’auteure sur la situation de ces travailleuses ; le fait notamment qu’elle les introduit non pas comme victimes (un préjugé souvent admis) mais comme des salariées ayant choisi leur situation. Je n’y ai pas perçu de voyeurisme dérangeant, mais au contraire un regard empirique et empathique. J’ai aimé la manière dont l’auteure fait de son expérience un récit universel au sujet des prostituées dont on parle finalement peu, alors qu’elles sont partout (dans la rue, sur Internet, dans les salons de massages). En France, le sexe tarifé est tabou. Là, Emma Becker montre de façon engagée et décomplexée que les femmes peuvent prendre le pouvoir et décider de faire du sexe leur activité principale, sans honte.
A cet égard, le livre devient intéressant lorsqu’il s’agit des maisons closes. Son intérêt retombe, selon moi, lorsque l’auteure se livre sur ses passions passées. C’est le cas dans la première partie du livre qui m’a semblée longue et plus lourde, en particulier au niveau du style. Si celui-ci m’a paru quelque peu ampoulé et égocentré dans ces moments où l’auteure évoque son histoire personnelle, il semblait au contraire s’alléger et s’embellir au fil du récit relatif aux maisons closes berlinoises. Un autre aspect du roman m’a dérangée : une manière parfois concédante de considérer ses collègues prostituées de la part de l’auteure. Toutefois, la conscientisation de cette condescendance permet d’apprécier autrement la lecture.
Un avis mitigé pour ce roman / récit qui fera sans doute couler beaucoup d'encre. Difficile d'imaginer qu'une femme, belle et intelligente comme Emma Becker, choisisse d'exercer la profession de prostituée pour les besoins d'un livre, dans le seul but de maîtriser parfaitement le sujet, et puisse se prendre tellement au "jeu" qu'elle en sortira vidée à la fermeture de la Maison, au point de déclarer qu'elle y serait restée si la Maison n'avait pas fermé, parce qu'elle s'y sentait bien. Un récit très cru, qui peut choquer, mais qui fait aussi réfléchir sur la condition de ces femmes, et plus généralement des femmes. Un extrait qui à lui seul peut résumer cet ouvrage : "Bien sûr il est moins dramatique de baiser contre de l'argent que de rester assis dans la rue à tendre la main. J'attends avec impatience l'imbécile qui me soutiendra le contraire. Bien sûr que c'est moins tragique d'être à la Maison plutôt que chez Lidl à s'escrimer pour un salaire risible ; la seule supériorité de la caissière sur la pute, c'est de pouvoir dire sans rougir ce à quoi elle occupe ses journées. Quoique sans rougir ... Peut-être que le jour où on offrira aux femmes des boulots convenablement payés, elles n'auront plus l'idée de baisser leur culotte pour compléter leurs fins de mois - et le monde ira mieux alors, non ? Ou la morale ?"
Belle écriture, et même si j'ai été un peu "dérangée" par l'amoncellement de détails, cette lecture a le mérite de nous faire découvrir un monde qu'on a l'habitude de cacher.
Emma Becker, rencontrée grâce à la Librairie La Parenthèse, à Annonay (Ardèche), est forte d'un courage extraordinaire, courage qu'elle exprime au travers d'une écriture sensible, précise et sincère. La Maison, son troisième livre publié, est une autofiction, pas un roman et son récit n'est pas linéaire.
Pendant deux ans, elle a exercé le métier de pute, mot qu'elle revendique, même si, chez nous, il est complètement dévoyé. Ce mot qu'elle préfère, de loin, à prostituée, elle le trouve d'autant plus tendre qu'il inspire une certaine terreur aux hommes.
Dès le début, elle tresse des louanges à la Maison, ce bordel berlinois démoli depuis, où elle a trouvé un accueil, une compréhension, une humanité qui lui ont permis de vivre une expérience qu'elle nous fait partager avec talent. Elle se livre avec beaucoup de franchise, nommant tout par son nom, sans faux semblant. Ce qu'elle raconte est donc cru mais jamais vulgaire car elle détaille quantité d'aspects de notre nature humaine dont le sexe constitue une base souvent méprisée ou galvaudée mais pourtant essentielle.
Contrairement à ce que peuvent prétendre ceux qui n'ont pas lu son livre, La Maison n'est pas une apologie de la prostitution. Souvent, Emma Becker dénonce ses abus, ses déviations, l'exploitation de ces filles, tout juste majeures, amenée de gré ou de force depuis les pays de l'est : Ukraine, Bulgarie…
C'est dans le premier bordel où elle a travaillé, le Manège, qu'elle a vécu la terreur des filles, abusées par la perspective de gains mirobolants, se retrouvant prisonnières d'un système qui les écrase. Emma Becker parle aussi des putes qui travaillent dans la rue car elle les a observées longuement avant de sauter le pas. Elle détaille les tenues obligatoires, le froid, l'attente, le plaisir vendu à la sauvette, dans un recoin, une voiture ou une pièce sordide.
Puis, c'est le Manège et la terreur que lui inspirent les hommes qui en assurent la sécurité et pourraient la retrouver lorsqu'elle décide de partir. Avec infiniment de tendresse, elle parle des filles qui travaillent dans ce cadre légal en Allemagne, contrairement à la France. Elle précise d'ailleurs que le fisc y trouve son compte.
Enfin, il faut parler des hommes dont elle détaille les demandes, les perversions ou les exigences parfois dangereuses mais c'est toujours une solitude, une frustration sexuelle qui ressortent au fil de chapitres dont une chanson et le nom de l'interprète sert de titre mais je dois avouer ma quasi ignorance du monde musical anglo-saxon… Seuls Donovan, The Bee Gees, Janis Joplin, The Mamas and the Papas m'évoquent des souvenirs alors que Téléphone avec Au coeur de la nuit sauve l'honneur francophone. Par contre, l'auteure le précise plusieurs fois, les Françaises ont la cote dans les bordels berlinois.
Emma Becker ne veut pas être jugée mais, enrichie par l'expérience, elle rend hommage à la féminité, à la complexité du plaisir féminin et à sa richesse. Elle a ressenti au fond d'elle-même ce que la prostitution produit dans l'esprit d'une femme et j'admire la franchise dont elle fait preuve dans ce livre réussi aussi sur le plan littéraire.
Chronique à retrouver sur : http://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
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