"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
« La loi sauvage » est une fable basée sur l’analyse des modes d’emploi d’appareil ménagers et les relations mère-fille; les animaux en peluche et les notices content les affres d’une mère célibataire, Sophie, à travers des pans d’histoires familiales passées et présentes.
Sous des scènes parfois délirantes, se cache un mal être doublé d’un grand amour maternel. Les questions essentielles foisonnent : l’absence du père, le manque de confiance en soi, l’antisémitisme. Qui n’a pas été confronté un jour à de telles angoisses sur le désamour, la solitude, l’incompréhension, l’humiliation ? Ce livre n’est pas triste même s’il est parfois difficile de s’identifier à cette mère névrosée et hystérique en état de confusion à la moindre critique de la maîtresse d’école de sa fille.
Nathalie Kuperman offre une comédie remuante et décalée, bousculant joyeusement toutes nos certitudes d’acceptation des systèmes en place et d’autocensure de notre propre existence.
« La loi sauvage » est un roman dérangeant qui ne laissera personne indifférent. D’une construction très éclatée et d’un imaginaire déjanté, on en sort, en se demandant si on a vraiment aimé et même si on a vraiment tout compris. Nathalie Kuperman a réussi à me déstabiliser comme lecteur et aussi, à me maintenir sur le qui-vive, jusqu’à la dernière page.
J’ai aimé ? Je ne le sais pas.
J’ai eu du plaisir à le lire ? Oui, très souvent.
Je le recommanderais ? Oui, mais pas à tout le monde.
Alors débutons par l’histoire.
Comme à chaque matin, maman reconduit sa fille à l’école. Elle rencontre la maitresse qui lui dit, tout de go, sans ménagement : « Votre fille, c’est une catastrophe. »
Dans l’esprit fragile de Sophie, cette phrase réveille de vieux démons qui hantaient silencieusement son esprit. Et des nouveaux qui profitent des circonstances pour squatter sa conscience : son rôle de mère, la fadeur de son travail, sa vie amoureuse et son enfance troublée. Cette phrase, jetée comme une insulte, comme un jugement sans appel, cette phrase bouleverse tous les aspects de sa vie. Et la pousse vers des réflexions, parfois saugrenues, souvent intenses et toujours remplies de culpabilité et de remords.
S’amorce alors un dialogue intérieur prenant forme autour de trois époques, ou plutôt trois éléments importants de la vie de Sophie : son rôle de mère et ses relations avec l’école (ces chapitres portent le tire de « La Maîtresse ») ; sa vie professionnelle et sa relation avec les objets et son rapport à la cuisine (ces chapitres portent le titre de « Mode d’emploi ») et enfin, son enfance et sa propre vie d’enfant rejetée à l’école (Sous le titre de « Sauvagerie »).
En ce qui me concerne, les chapitres sur « La Maîtresse » et sur la « Sauvagerie » m’ont beaucoup ému. Ce rappel de l’enfance de la mère donnait une charge émotive grandissante au développement de l’histoire avec la maîtresse d’école et plus tard avec la directrice. Cependant, j’ai parfois eu tendance à décrocher dans les chapitres traitent du mode d’emploi. J’ai tenté d’interpréter symboliquement ces longues digressions sur la cuisson d’un agneau au four, lui donnant la valeur de l’animal sacrifié pour expier les péchés du monde. J’ai parfois eu tendance à m’ennuyer un peu. Même la finale n’a pas réussi à racheter mon déplaisir.
Vous comprendrez donc mes hésitations à fournir une notre très satisfaisante à ce roman et à le recommander sans conditions. On y prend un certain plaisir mais à la longue, même si les légumes d’accompagnement étaient excellents, que le vin coulait à flots, même si le dessert clôturait de façon grandiose le repas, il aurait quand même fallu faire cuire l’agneau !