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«?Ils remplissent de foin la peau de l'ours et après avoir célébré leur victoire avec des chants de raillerie et d'insulte, après lui avoir craché dessus et l'avoir repoussé à coups de pied, ils dressent l'animal sur ses pattes arrière et alors, pendant un temps considérable, ils lui accordent toute la vénération due à un dieu protecteur.?» James G. Frazer, Le rameau d'or (1923?: 489) Les Ostiaks, chasseurs d'ours sibériens, traitaient la dépouille de leurs proies avec la plus grande considération. Cela ne les empêchait pas de projeter sur ces proies une agressivité tout aussi sincère. Contradictions de l'homme primitif?? Témoignages d'une époque révolue?? Peut-être pas. Masquée par des nouvelles rhétoriques, protégée par des nouvelles ritualités, cette ambivalence semble orienter encore aujourd'hui nos rapports aux «?non humains?». On en trouve des traces dans les espaces naturels, où le spectacle de la prédation, différemment commenté, excite chasseurs et non-chasseurs. Elle hante les ateliers des artistes et les salles des musées, où la mort de l'animal est à la fois pleurée et célébrée. Elle visite nos jardins et nos maisons sans épargner le monde végétal, des plantes d'intérieur aux sapin de Noël. En toile de fond, la «?Comédie de l'innocence?» dispositif psychologique et social permettant, par l'adoption d'un comportement stéréotypé, de sévir d'un côté et de se déculpabiliser de l'autre.
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