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Je m'appelle Philippe Jaenada, je suis né dans les Yvelines, je vis depuis quelques années à Paris avec ma fiancée la belle Anne-Catherine, j'aime les bars, les livres, les gens et les courses de chevaux, j'ai du mal à dormir, je fume beaucoup, ; je trouve que je grossis trop ces temps-ci, j'ai trente-cinq ans et je travaille dans une agence de détectives.
Mais je vais peut-être me mettre à mon compte. [...] J'ai mes avantages et mes inconvénients, je peux tenter le coup et me confronter aux privés. Même s'il faut reconnaître que l'aventure palpitante, épouvantable et profondément désespérante qui m'est arrivée le printemps dernier ne m'incite pas réellement, en fin de compte, à me mettre au mien. De compte. Car il est temps d'avouer, avant de donner de faux espoirs, que ça ne s'est pas très bien passé.
Il s'appelle Philippe Jaenada et il est détective privé. Il aime bien raconter sa vie et ça nous plaît bien aussi parce qu'il le fait avec un humour ébouriffant et qu'il en laisse profiter plein de lecteurs dont moi qui suis une lectrice.
Quand on dit "détective privé" l'imaginaire collectif (qui n'en rate pas une) fait surgir les images mythiques de Boggie, Mitchum, Pacino, du côté masculin, et de Lauren Bacall, Rita Hayworth ou Gene Tierney du côté féminin. entre Faucon maltais, Grand Sommeil et autres enquêtes carabinées, parsemées de voluptueuses suspectes ou victimes.
Et, finalement, il ne se trompe pas tellement, l'imaginaire collectif...
Certes, notre héros avoue être gaulé comme une poêle à frire. Certes, ses investigations le conduisent plus souvent dans le secret des alcôves qu'à la poursuite du Maudit M. Certes la jeune femme séquestrée, qu'il se donne pour mission de sauver, est plutôt dodue. Certes, P.J. fréquente davantage le P.M.U du coin que les casinos de Las Vegas. Et certes, enfin, il a le chic pour nous raconter ses désagréments domestiques juste au moment où le suspense est à son acmé.
Mais quoi ? Revêtant le costume scintillant du redresseur de tort, Philippe détective n'hésite pas à franchir la frontière du périphérique pour aller de Romans à Veules les Roses puis jusqu'à New-York à la poursuite de la femme en vert, Laura... Gilda... euh non Fabienne.
Le roman joue sans cesse de cette démythification comme si ce Philippe Jaenada, qui s'accapare une large part de la biographie de l'auteur, brouillait les codes du roman noir et replaçait celui-ci dans un contexte où le prosaïque le dispute à la fantaisie la plus extravagante.
Quoi qu'il en soit, j'ai été piégée par cette histoire et par le perpétuel mouvement que lui impulse l'écriture. J'aime que les gros méchants soient délicieusement cruels et que l'arme fatale du détective soit un passage dans l'ascenseur. Cette grande à bouche molle n'a, en définitive, pas grand-chose à envier aux grandes à bouche charnue qui évoluent sur l'écran des vieux films noirs !
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