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En 1759, en Pologne, Jakob Frank se présenta comme la réincarnation de Sabbataï Tsvi, le faux messie : il assura être le nouveau Messie et se convertit au catholicisme.
Dix mille à vingt mille juifs le suivirent : clandestinité, transgression de la Loi juive, rejet du Talmud et de la Torah tout en restant fidèle, en secret, à la Kabbale et au Zohar. Ses successeurs connurent une ascension fulgurante, le mouvement se transforma en secte hérétique qui dévia vers le nationalisme et l'antisémitisme.
Qui fut vraiment Jacob Frank, l’initiateur du mouvement frankiste ? L’historien Heinrich Graetz (1817-1891) le qualifie de menteur, d’imposteur et de traitre et son mouvement de plus « nauséabond de toute l’histoire juive ». Le frankisme aurait fait du tort aux Juifs et même empêché leur émancipation. Gershom Sholem considère ses disciples comme des hérétiques qui ne s’intéressent qu’au côté obscur du judaïsme, la Kabbale. « C’est en violant la Torah qu’on l’accomplit », proclamait en effet Frank. Né en 1726 à Korolowka en Podolie, Frank voyage beaucoup. Sa famille s’installe d’abord en Bucovine, puis à Bucarest, à Smyrne et à Salonique. Frank a une vision de Sabbataï Svi, son grand inspirateur, Juif converti à l’Islam et fondateur des Dönmehs turcs, qui lui donne son prénom de Jacob. Il a ensuite une seconde vision, celle d’Elie et de Jésus qui lui ordonne de rentrer en Pologne. Il se déclare alors « Messie », commence à prêcher et à être suivi par de nombreux disciples. On dit qu’il aurait fait des miracles. Il annonce être venu pour « abolir toutes les lois et les religions et apporter la vie au monde et ainsi faire arriver la fin des temps, lorsque la société sera totalement dépravée. » La rédemption devra passer par le péché, le chaos et la destruction d'Edom. (Rome) « Je ne suis pas venu pour élever, je suis venu pour tout détruire », proclame-t-il.
« Jacob Frank, le faux Messie », se situe aux limites de l’essai historique et de la biographie. Ce volet de l’ouvrage laisse d’ailleurs assez à désirer. Le lecteur aurait aimé en apprendre nettement plus sur ce personnage vraiment hors du commun qui, pour mieux assumer son judaïsme, rejette toutes les obligations de la Torah, applique certains aspects sombres de la Kabbale au pied de la lettre, se convertit à l’Islam et organise des orgies sexuelles pour sauver les âmes. Ses adeptes se convertiront en masse au christianisme pour mieux accomplir une judéité intégrale. Ils seront protégés par les dignitaires religieux et les puissants et très souvent anoblis avant de s’enrichir assez rapidement et atteindre des postes clés. Toute la première partie du livre développe toutes sortes de thèses sur la déviance de la Kabbale et sur les théories du complot qui accompagnent ce mouvement, sans trancher dans un sens ou un autre, même si l’auteur semble assez compréhensif envers le frankisme. Le versant historique également aurait mérité de plus amples développements. Le lecteur reste sur sa faim en ce qui concerne la participation des Frankistes à la Révolution française, des diverses tentatives de sauver la famille royale, du rôle des Francs-Maçons et des Illuminatis et également de celui de Meyer Amshel Rothschild qui est présenté comme franc-maçon et financier de la secte. Juste deux phrases sur ce personnage-clé, difficile d’être plus discret. On aurait aussi aimé en apprendre plus sur les répercussions actuelles du mouvement. Mais là, rien. Au total, un ouvrage assez décevant, l’auteur ayant sans doute voulu trop étreindre sans choquer personne. Dommage.
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