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Véritable interface entre le monde de la guerre et celui des non-combattants, la presse est investie, en 1914, d'une mission essentielle, quand le public devient l'arrière. Les lecteurs impliqués affectivement, mais tenus physiquement éloignés du conflit, sont habités par une soif de savoir qui s'accroît au fil des semaines. Rapidement, ils veulent voir. Cette étude de la presse illustrée de l'époque révèle que les hebdomadaires traquent le scoop ou inventent de nouvelles formes de reportage pour immerger le lecteur dans la sensation d'une guerre vécue. Corps propulsés dans les arbres ou jambe abandonnée sur le No man's Land, paysages de forêts dévastées ou champs de bataille poubelles, soldats qui sautent le parapet. Contrairement à la vulgate, les thèmes que Le Miroir aborde sont particulièrement brûlants, les photographies qu'il publie, exceptionnellement parlantes, grâce en partie aux concours qu'il organise dès 1915. Les pires horreurs du conflit, le public les avait vues, tirées à un million d'exemplaires chaque semaine. Parce qu'il était la victime humiliée dans la chair de son territoire ruiné et dans la blessure ravivée de la défaite passée, l'arrière avait quand même consenti.
Joëlle Beurier est chercheure à l'institut universitaire de Florence, auteure d'une thèse sur la Grande Guerre, matrice des médias modernes.
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