"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
À Sokcho, petite ville portuaire proche de la frontière avec la Corée du Nord, une jeune Franco-coréenne qui n'a jamais mis les pieds en Europe rencontre un auteur de bandes dessinées venu chercher l'inspiration depuis sa Normandie natale. C'est l'hiver, le froid ralentit tout, la cuisine de poissons peut être dangereuse, les corps douloureux, les malentendus suspendus, et les coups de crayon danser sur le papier :
Une attirance fragile se noue entre ces deux êtres aux cultures si différentes.
Ce roman délicat comme la neige sur l'écume transporte le lecteur dans un univers d'une richesse et d'une originalité rares, à l'atmosphère puissante.
Première réaction à la découverte du titre : « C’est où Sokcho ? ». Et bien sachez qu’il s’agit d’une petite station balnéaire côté sud de la frontière entre les deux Corées. Cette ville portuaire populaire lors de la saison estivale est en revanche et déserte et glaciale en hiver. C’est justement dans ce décor que Elisa Shua Dusapin imagine une rencontre entre deux êtres que tout oppose ou presque, mais qui va s’avérer douce et sensuelle.
C’est le récit intime d’une franco-coréenne en quête d’identité, enfermée dans sa ville natale, Sokcho. L’arrivée d’un dessinateur français dans la pension où elle travaille va provoquer chez elle un réveil existentiel.
La communication n’est pas toujours facile entre les deux étrangers, les non-dits s’accumulent, les différences culturelles creusent l’écart et les vexations de la jeune fille. Malgré tout se tissent entre eux des liens à la fois improbables et précieux.
Le texte est très agréable à lire, aéré, joliment écrit, il faut se laisser porter par le rythme et la musique des mots toujours bien choisis.
L’ambiance du récit est froide, l’action tâtonne, les corps se frôlent, les sentiments se révèlent et se gomment aussitôt.
Tout est en retenu. La vie quotidienne est rythmée par les repas, les plats traditionnels, les préparations ancestrales.
Qu’on se le dise, « Hiver à Sokcho » est avant tout un roman d’atmosphère. C’est également un joli voyage à Sokcho, ville côtière proche de la frontière entre les deux Corée, voyage contemplatif mais aussi culinaire. un homme solitaire, errant de pays en pays.
Les odeurs, les saveurs, les bruits, les détails du paysage hivernal saisissent le lecteur, enchantée et plongée dans une Corée à l'écart de la mégalopole de Séoul et de son modernisme extrême à l'image des deux personnages en quête d'eux-mêmes ou de l'autre.
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Reste que la trame narrative et l’histoire d’amour en elle-meme manquent de consistance et souffrent surtout d’un format trop court (146 pages).
Un joli texte sans prétention. Sans être renversant, cela reste la découverte d’une jolie plume (Elisa Shua Dusapin) et d’un ailleurs (Sokcho).
Une jeune femme, employée dans une pension du côté de Sokcho, à la frontière de la Corée du Nord, s'ennuie dans son quotidien monotone. L'arrivée d'un touriste français, auteur de bandes dessinées, va bouleverser son quotidien. Le temps d'une parenthèse, leurs univers se confrontent dans une séduction aussi mutique que suggérée. Yan Kerrand parviendra-t-il à trouver l'inspiration qu'il recherche ?
Ce roman est une œuvre tout en finesse et délicatesse, où les personnages sont curieux de l'autre, de l'ailleurs et de la culture. Ils se scrutent, s'observent, s'interrogent, pris dans un tango à la fois sensuel et animal, qu'ils provoquent et réfutent malgré eux. Ce jeu de séduction est à la fois fascinant et déroutant, nous entraînant dans un voyage fantasmé, où chaque échange est marqué par des demi-mots et des silences éloquents.
À travers des formules échangées et des regards furtifs, deux mondes différents s'attirent et se repoussent comme des aimants contraires. Nous devenons les témoins d'une intimité subtile et évanescente, aux multiples facettes. L'auteure distille avec art l'érotisme, la latence et l'ambiguïté, ménageant habilement ses effets. Le temps semble suspendu, laissant place à une réflexion sur l'identité, l'inspiration, les peurs et les influences.
La Corée, scindée et contrariée, se dessine en toile de fond, apportant une dimension supplémentaire à cette rencontre troublante. Le charme opère de manière évanescente et troublante, nous submergeant dans une atmosphère où tout semble à la fois fragile et intense.
La narratrice est une jeune franco-coréenne. Elle a étudié les littératures française et coréenne à Séoul mais elle n’est jamais allée en France et n’a jamais connu son père. Elle travaille depuis peu dans une modeste pension à Sokcho, une ville portuaire proche de la frontière qui sépare les deux Corées. Elle y a rejoint sa vieille mère qui vend du poisson. Elle nous raconte l’arrivée d’un Français, Yan Kerrand, un auteur de bandes-dessinées qui va troubler son quotidien même s’il semble ne pas lui prêter attention : « Son regard m’a traversée sans me voir ». Elle, elle est attirée par lui dès le début, elle l’observe beaucoup, espionne son travail mais ne franchira jamais totalement la frontière qui les sépare. Elle lui parle en anglais et ne lui dit pas qu’elle maîtrise mieux le français. Elle ne lui avouera jamais rien d’ailleurs ni qu’elle est vexée qu’il ne goûte pas sa cuisine, ni ce qu’elle pense de ses dessins car c’est une histoire où règnent les non-dits. Les rues de Sokcho sont plutôt désertes au cœur de l’hiver. Tout semble blafard et glacé, même la communication. Mais la ville est emplie d’odeurs pas très agréables : mélange d’embruns, de poissons, de cuisine et d’égouts. Yan Kerrand est de passage. Sokcho est une étape dans son parcours d’artiste. Comme son héros, il parcourt le monde et dessine ses voyages dans un lavis d’encre sans couleurs. Il est taciturne et solitaire. Seul son héros est dessiné de manière nette, les êtres qui l’entourent semblent effacés, ils ne sont que des ombres, des formes indistinctes. L’écriture est douce et feutrée comme la neige qui tombe. Le style est dépouillé, très sobre, délicat. On a l’impression d’une écriture murmurée à l’oreille du lecteur. Le rythme est lent. Il ne se passe pas grand chose mais en même temps on est attentif à tous les détails car tout est suggéré. Les émotions semblent en sourdine mais c’est pourtant un roman très sensuel : les odeurs, le toucher, les jeux de regard sont bien là. J’ai aimé la mise en abîme finale : la narratrice lit la BD de Kerrand et semble se fondre dans le dessin mais j’avoue que j’aurais aimé rester plus longtemps avec ces deux personnages. C’est un premier roman très réussi. Je ne sais pas à quel moment de ma lecture le roman m’a fait penser au poème de Verlaine : « Colloque sentimental ». Le poème évoque la rencontre de deux êtres, dans un parc solitaire et glacé, deux formes qui passent et qui n’arrivent pas à bien communiquer. Je ne sais pas si cela vous arrive mais souvent j’ai l’impression que mes lectures se répondent. Pour conclure, je vous propose une citation : « Kerrand se reflétait dans la vitre, son paquet sur les genoux. Il avait fermé les yeux. Le nez se détachait comme un équerre. Des lèvres étroites naissait un delta de lignes qui deviendraient des rides. Il s’était rasé. En remontant à ses yeux j’ai réalisé que lui aussi me regardait dans le reflet de sa vitre. Du même regard qu’à son arrivée à la pension, cet air avenant mêlé d’ennui. »
Un auteur de bandes dessinées, français, séjourne le temps d’un hiver dans une pension de Sokcho, ville coréenne de bord de mer, abandonnée au froid glacial et vide de touristes.
Il y fait la connaissance d’une jeune femme, la narratrice, qui travaille à la pension et dont le père, qu’elle n’a jamais connu, était lui même français.
Ce roman court réussit le pari de faire très rapidement voyager le lecteur dans cette ville, proche de la frontière avec la Corée du Nord, par le biais d’anecdotes, de petits riens du quotidien décrits avec délicatesse.
La relation de la jeune femme à sa mère, aux traditions, à cette ville est complexe et intéressante.
Mais l’intérêt du roman réside aussi dans la relation, la tension d’une extrême sensualité, qui naît entre cet homme et cette jeune femme que tout sépare.
Je vous recommande ce court roman immersif et d’une grande sensibilité.
Pourquoi lire ?
Et bien exactement pour ça !
Cette histoire est une belle démonstration de ce qu'on recherche parfois dans les différentes lectures qu'on peut avoir .
Que chercher dans tous ces livres ....la distraction,l'enchantement,le savoir ?
J'avoue que je me suis dit au début,pourquoi autant de prix pour ce petit ouvrage ? Et bien je vais le lire !
Au fur et à mesure du récit je me suis laissé emportée dans la précision des mots .Rien de trop ,tout en subtilité et en nuance de sentiments non avoués.
Vraiment ce que j'aime dans un roman c'est cette manière qu'il a de bousculer les pré requis .
Après coup j'y ai pensé pendant quelques jours ....et c'est exactement ça que je recherche dans la Littérature.
La rencontre avec un monde nouveau .
Un bel ouvrage tout en dentelle !
Ce roman est l'histoire de la rencontre entre la narratrice, jeune femme franco-coréenne qui travaille dans la pension du vieux Park et d'un touriste français, auteur de BD, venu passer quelques jours à Sochko avec pour but de réaliser un nouvel album.
Ce roman est aussi la rencontre entre deux cultures, deux modes de fonctionnement et une éventuelle porte ouverte sur un histoire d'amour.
Cette histoire se passe dans le village de Sokcho, à la frontière avec la Corée du Nord dans une atmosphère humide et froide.
Ce roman est empreint d'une grande douceur où l'on s'intéresse à l'autre à distance afin de ne jamais empiéter sur l'espace de l'autre. Il évoque aussi la question de la relation mère fille et du soin que les enfants prodiguent à leurs ainés quand ceux ci vieillissent.
J'ai aimé cette atmosphère de douceur, de bienveillance mais aussi d'acceptation qui permet à la vie de s'écouler telle qu'elle le doit et ce malgré les obstacles.
C'est une très belle découverte proposée dans le cadre du café littéraire mensuel.
https://quandsylit.over-blog.com/2022/01/hiver-a-sokcho-elsa-shua-dusapin.html
Le froid, le vent, la bise soufflait…Sokcho, une petite ville portuaire et balnéaire proche de la frontière avec la Corée du Nord. Un homme, un français de Normandie, auteur de bandes dessinées, s’installe dans un hôtel « Le vieux Park » afin de trouver l’inspiration pour l’ultime et dixième tome d’une série consacrée à un archéologue parcourant le monde. Une jeune fille, née d’un père français et d’une mère coréenne, tient tous les postes de ce vieil établissement : elle s’occupe de la réception, de laver le linge, de faire à manger et de servir, bref compte tenu du peu de visiteurs, elle gère !
« Hiver à Sokcho » relate la rencontre de ses deux êtres, chacun perdu dans leur monde. Avec cependant, une certaine attirance qui les font s’approcher, s’observer, et converser, tout en maintenant une certaine distance. Chacun évitant de faire les premiers pas d’une relation amoureuse, qui semble-t-il pourrait exister entre eux. Mais c’est sans compter les non-dits, la timidité, et dans cette situation chacun garde ses secrets…Un texte empli de suggestions, de regards, de gestes commencés mais jamais terminés…D’où une certaine langueur monotone, que d’aucuns apprécieront.
Dans cette ville, où l’on ne faisait qu’attendre. Les touristes, les bateaux, les hommes, le retour du printemps. Yan Ferrand sera à l’aune de la température de cette ville, glacé, face au regard de la jeune fille, et se réfugiera dans l’élaboration de ses esquisses. Pour ne lui laisser que la trace de ses pas dans la neige.
Le style d’écriture ne me convient pas, trop laconique, à la manière d’un haïku, et si l’atmosphère de ce récit souffle le vent de la sensibilité, celui-ci ne parvient pas à atteindre mon empathie. Certes il s’agit du premier roman de Elisa Shua Dusapin, mais malgré tout je ne serais pas son laudateur.
C'est un très court roman, le premier d’Élisa Shua Dusapin, elle-même franco-coréenne, qui prend son temps et qui se déguste. Il prend le temps donc d'installer les deux personnages principaux. Chacun dans sa personnalité et dans sa solitude. Ils vont chercher à se rencontrer, maladroitement, lui par ses dessins : il tâtonne, cherche, hésite, jette beaucoup. Elle par sa cuisine qu'il ne goûte pas. Ils ne se rejoindront pas vraiment, mais un peu quand même, chacun prenant de l'autre pour avancer.
L'écriture est fine, précise, douce, un peu comme si quelqu'un nous murmurait le texte à l'oreille. Elle décrit brièvement les paysages pas très jolis de cette ville l'hiver. Elle est sensuelle également, parle des corps, des lignes, celles que cherche le dessinateur, celles de la jeune femme, de son amoureux mannequin qui n'hésitera pas à recourir à la chirurgie si on le lui demande, d'une cliente qui se remet doucement d'une opération esthétique... Élisa Shua Dusapin aborde les thèmes de la rencontre, de la solitude, de l'identité notamment lorsqu'on a une double culture.
Un très beau texte qu'il faut prendre le temps de découvrir, ne point trop se presser pour n'en rien rater. Il débute ainsi :
"Il est arrivé perdu dans un manteau de laine. Sa valise à mes pieds, il a retiré son bonnet. Visage occidental. Yeux sombres. Cheveux peignés sur le côté. Son regard m'a traversée sans me voir. L'air ennuyé, il a demandé en anglais s'il pouvait rester quelques jours, le temps de trouver autre chose. Je lui ai donné un formulaire. Il m'a tendu son passeport pour que je le remplisse moi-même. Yan Kerrand, 1968, de Granville." (p.5)
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