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L'oeuvre - comme la vie - d'Avrom Sutzkever est exemplaire à plus d'un titre. Elle traverse le siècle et porte l'espoir paradoxal de la poésie qui, en plusieurs occasions, lui a littéralement sauvé la vie, quand, ayant dû traverser un champ de mines sous la neige dans la forêt de Narotch, il a accordé ses pas au rythme d'un poème récité à voix basse. C'est également avec la poésie qu'il affrontera la ville secrète des égouts de Wilno et la mort d'un enfant, et c'est avec la poésie qu'il renaîtra sur la terre spirituelle de sa langue, le yiddish, flammèche vacillante sur une bougie orpheline, qu'il gardera vissée au corps. Figurent dans cette anthologie des poèmes de tous ses ouvrages publiés, depuis Sibérie (1936) jusqu'à Murs effondrés (1996), et si une partie importante est consacrée à l'écriture quotidienne du ghetto et de sa résistance, l'ensemble de près de 400 poèmes en vers et prose, extraits de 22 recueils, résonne au-delà de la seule réalité politique à laquelle Sutzkever fut confronté. On peut parler alors d'un véritable engagement poétique visant à garder mémoire des visages et des mots de ceux que la barbarie a voulu effacer, les inscrivant en lettres plus éternelles que le temps dans le livre de la vie.
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