"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Dès que je passai le seuil de la maison, je sus que quelque chose n'allait pas. 1981. Dans la campagne beaujolaise, Grâce Marie Bataille, 33 ans, vit avec ses enfants au rythme des allées et venues de son mari, représentant de commerce. Quand elle engage une jeune fille au pair polonaise, cette existence bien rangée vole en éclats. 2010. Nathan, son fils, vient la retrouver pour fêter Noël en famille. Mais cette année, tout est différent. Tandis que d'étranges incidents surviennent dans la maison, des secrets du passé menacent de ressurgir...
Paru comme ses précédents romans aux éditions JC Lattès en 2012, Grâce a eu l'honneur en 2013 d'une réédition au format poche auréolée de surcroît d'une nomination au Prix des Lecteurs Livre de Poche. Si le quatrième livre de Delphine Bertholon n'a pas su détrôner L'île des oubliés de Victoria Hislop dans le cœur des jurés responsables de cette distinction, Grâce ne manquait toutefois pas d'arguments à commencer par l'ambiance si particulière dans laquelle nous plonge la romancière.
Étouffant, suffocant, ce séjour familial en compagnie de la famille Bresson ne laisse personne intact. Conscient très tôt que derrière cette succession de faits à la limite du surnaturel se cache un secret enfoui pour de bonnes raisons, le lecteur navigue à vue, décontenancé par la mélancolie que dégagent ces personnages marqués par le deuil et l'abandon.
Ce n'est pourtant qu'en arrivant au second tiers de Grâce que le charme opère réellement et que l'on se laisse envoûter par ces deux histoires forcément emmêlées bien que racontées à deux époques différentes. Il y a de la tragédie, du drame dans ce roman qui flirte avec le fantastique, une dimension ésotérique effleurée, savamment dosée pour bien signifier au lecteur que l'essentiel n'est pas là.
Figures de proue antithétiques mais fusionnelles de cette histoire, Grâce Bataille et son fils Nathan tissent ensemble une toile solide de laquelle aucun des protagonistes ne pourra réellement s'extirper. Comme un écho crescendo, le secret que Grâce a enfoui au plus profond d'elle va resurgir progressivement et donner à ces êtres broyés les pièces d'un puzzle qu'ils pensaient irrémédiablement "incomplétables". Ce n'est qu'en acceptant les conséquences de cette macabre découverte que chacun pourra à nouveau avancer, se raccrocher à ce soupçon d'espoir renouvelé.
Deux sources pour ce récit :
-le carnet intime de Grâce, mère de Lise et Nathan, épouse abandonnée de Thomas
-le récit que fait Nathan à Cora, sa femme, morte il y a cinq ans en donnant naissance à leurs jumeaux, Colin et Soline
Pour Noël le frère et la sœur se retrouvent dans la maison de leur mère, avec les jumeaux.
Un personnage à part entière cette maison où il se passe d’étranges phénomènes.
Et voici que trente ans après, le père fait sa réapparition.
Tout est amour, colère, rage désenchantement dans le journal de Grâce
Tout est douceur, fragilité, incompréhension dans le récit de Nathan
J’aime beaucoup ces romans qui se lisent comme on regarde un film
L’intrigue est extrêmement bien menée, les éléments s’enchaînent avec justesse. Suspense et émotion font tourner les pages avec impatience.
Jusqu’au bout, on a des surprises, et de révélations en révélations, on comprend mieux cette famille blessée.
Chaque personnage est savoureux
Un livre passionnant sur le couple, la famille, les non-dits, les secrets inavouables.
Quand le passé vient hanter le présent, afin que les secrets de famille soient découverts! Delphine Bertholon manie le suspens avec justesse, j'aime beaucoup sa plume.
Le ton est actuel.
L'histoire est racontée à deux voix, le fils Nathan aujourd'hui et la mère Grâce par le biais de son journal intime 30 ans avant, avec pour toile de fond la maison familiale!
Un livre à découvrir, une auteure à suivre.
histoires et secrets de famille sont la trame de ce roman. Un univers glauque, un vrai séisme familial raconté à deux voix, celle du fils et celle de la mère par le biais de son journal intime.
Delphine BERTHOLON, j'ai découvert son écriture avec "L'effet Larsen" en novembre dernier et ce roman est gravé à jamais dans ma mémoire pour m'avoir accompagnée les jours suivant les terribles attentats de Paris, il résonne encore aujourd'hui !
J'étais particulièrement tentée de poursuivre la découverte des oeuvres de cette écrivaine et "Grâce" m'a tendu les bras...
Tout commence avec une lettre dactylographiée, dont on ne comprend pas bien son contexte, qui est son destinataire, et ce qu'elle pourra bien induire dans ce roman, mais ce que l'on mesure dans les premières lignes, c'est le manque incommensurable liée à l'absence d'un être cher.
Et puis, il y a aussi un chapitre qui commence ainsi : "Dès que je passai le seuil de la maison, je sus que quelque chose n'allait pas. "
Et enfin, il y a ce que l'on peut appréhender comme un journal intime signé de Grâce Marie Bataille, 7 mars 1981... : "Ce matin, j'ai eu trente quatre ans. Trente quatre ans, et deux gosses."
Vous l'aurez compris, le talent de Delphine BERTHOLON est de tracer l'itinéraire de 3 personnages et de faire en sorte que leurs parcours se croisent très naturellement. Depuis la fille au pair venue de Roumanie, en passant par Nathan, père de 2 jeunes enfants, des faux jumeaux dont la mère est décédée lors de leur naissance, jusqu'à Grâce, la mère de Nathan, cette vieille femme dont les fragilités s'accroissent. Aujourd'hui, nous sommes le 24 décembre, il neige, et les festivités vont bientôt commencer !
Mais ce n'est pas tout, elle va le faire en vous prenant à la gorge dès les premières pages sans jamais pouvoir vous lâcher d'ici la page 356. Thriller psychologique, ce roman se lit en apnée totale. Si vous avez envie de quitter un temps votre environnement familial, professionnel... évasion cérébrale assurée ! Avec du recul, je me dis que la couverture est en totale adéquation avec l'histoire, c'est suffisamment rare pour le signaler. Toute noire, une maison en perspective vue à travers le pare brise d'une voiture... Je vous livre ces quelques détails comme autant d'énigmes à résoudre !
Delphine BERTHOLON a cette capacité à se fondre dans l'intimité de personnages meurtris, des hommes et des femmes anti-héros oppressés par des souffrances terrifiantes, des souffrances liées à des secrets de famille, des non-dits... à des décisions prises à un instant T mais avec des effets dévastateurs susceptibles de se transmettre de génération en génération :
"La vie est une suite de choix plus ou moins réfléchis, de hasards heureux ou malheureux, rencontres, bifurcations, prendre à droite, prendre à gauche, mille destins différents à chaque carrefour, et puis des évidences." P. 170
Elle conclut ce très beau roman avec cette dernière ligne
"[...] je réintègre, enfin, l'humanité." P. 356
Tout est dit dans la démarche d'écriture de Delphine BERTHOLON !
Lire un roman de cette auteure, c'est être sûr.e d'en garder l'empreinte !
n roman écrit à deux voix, celle de Grâce femme blessée, par la vie et par son mari infidèle, qui ira jusqu’à tuer la maîtresse de son mari, consumée par un amour exclusif et dévastateur et celle de Nathan, son fils, lui-même atteint par la vie, en ayant perdu sa femme, lors de la naissance de leurs jumeaux. Deux époques qui se chevauchent, nous entraînant dans une histoire familiale douloureuse, où des phénomènes surnaturels, survienne au fur et à mesure que le lecteur progresse entre les fils tortueux de cette intrigue familiale. Le style simple et très actuel fait de ce livre un moment de lecture très agréable, rythmé et prenant à souhait, on a beaucoup de difficulté à interrompre sa lecture. Pour ma part, je ne l’ai interrompu qu’une seule fois, et l’ai lu quasiment d’une traite, tant le secret de Grâce, que l’on devine, m’a interpellé, me laissant entrevoir deux versions possibles et surtout l’envie irrépressible d’en connaître la véritable issue.
Ce récit est particulier comme une ombre, un clair obscur qui raconte les histoires et les secrets d’une famille. Son titre est le prénom de la mère de famille Grâce.
Grâce Bataille née Boisson, fille d’un illustre résistant qui habite la maison de ses parents et s’est marié à un représentant d’électroménager toujours en voyage Thomas Bataille. Elle a 2 enfants une fille Lise devenue une jeune femme étrange qui a du mal à réussir sa vie et Nathan.
Nathan est architecte, il est veuf et à des jumeaux Colin et Soline de 6 ans, il a perdu son grand amour leur mère Cora le jour de l’accouchement. Il s’est toujours senti seul, à part dans la famille sans savoir pourquoi. Le seul moment où il a eu l’impression de revivre c’est quand il a rencontré la mère de ses enfants puis au travers du regard de ses enfants.
Le récit a une construction particulière, on a d’un côte des lettres, des écrits de la mère Grâce qui nous replonge dans le passé des années 1980. Elle raconte son couple avec Thomas et la présence d’une intrus Christina, une jeune fille d’une vingtaine d’années polonaise qui s’occupe des enfants. Ces lettres montrent bien l’évolution du couple, de la famille et des tensions qui s’accumulent au fil des jours.
En parallèle à ce récit, on a la narration de Nathan le plus jeune enfant venu avec ses jumeaux pour les vacances de Noël, qui n’a pas le même rapport au passé, à son père que le reste de sa famille. Il ne vit que pour ses enfants et dans le présent, en essayant de gérer au mieux le quotidien depuis la mort de sa femme. Mais une série d’évènements au cours de son séjour va ranimer sa mémoire et faire ressurgir le passé comme des fantômes.
On alterne les points de vue féminin et masculin entre Grâce qui nous replonge en 1981, son rôle de femme au foyer et le point de vue actuel de Nathan lors de ce retour aux sources. L’auteur retranscrit les émotions d’une manière terriblement précise, tantôt délicate, tantôt brûlante. On retrouve sa « patte » dans le décorticage des émotions et de l’âme humaine, « le détricotage » de Grâce notamment pour reprendre une expression du livre est particulièrement réussie. Toute la gamme des sentiments, de l’intime, est dévoilée à travers les personnages cabossés, tordus, victimes de leurs passés, de leurs fêlures et de leurs non dits.
L’écriture de Delphine Bertholon est une fois de plus subtile, elle arrive à nous faire rentrer dans la tête et la psychologie de ses personnages, principaux et secondaires. On est tour à tour la mère, la sœur, le frère, les enfants, le père et la jeune fille au pair du passé Christina. Ces passages comme des incarnations par moments de chaque personnage, sont accentués par le caractère étrange presque fantastique du récit. Elle bouleverse les codes de la logique, l’ordre du temps, les points de vues pour nous faire ressentir les mêmes angoisses, questionnements que Nathan au fil du récit. J’avoue j’ai été particulièrement fasciné par le personnage de Nathan, blessé par la vie, qui reconstitue par bribes l’histoire de sa famille et apprend à mieux comprendre sa mère, sa sœur. Il remet en cause ses choix, sa vision de la vie en restant à l’écoute des autres. Le personnage de Grâce est aussi très intéressant dans son basculement, son oscillation entre fragilité, et dans ces moments là j’ai éprouvé de la compassion pour elle et par moments cette dureté, froideur, folie qui nous fait questionner sur nos actes, nos souhaits, nos désirs et notre responsabilité.
J’ai apprécié cette atmosphère étrange, ce rôle à part entière de la maison comme dans les films fantastiques ou d’horreur, cette idée qu’il y a une mémoire des murs, les cauchemars étranges de Nathan, les signes qu’il croit voir. Ce choix a facilité pour moi l’empathie et a libéré mon imaginaire autour du jardin, de la maison de poupée, il nous rappelle nos vieilles peurs d’enfance, les vieilles légendes.
Le récit de Grâce évoque aussi les grands évènements historiques avec l’arrivée de Mitterrand, les crises en Europe de l’Est, le bouleversement de la société avec l’électroménager et le début du culte du corps des années 1980. On retrouve aussi une réflexion plus sociétale, sur la place de la femme, son rapport au corps, sur la vieillesse, la place de la mort aujourd’hui. Les personnages recherchent à être en paix avec eux même, à faire le deuil de leur passé, notamment pour celui qui va évoluer le plus Nathan, mais Lise, Grâce aussi change et modifie leurs comportements dans la dernière partie du récit.
Le récit fait ressortir une impression de nostalgie, de solitude qui transpire dans les personnages, avec l’omniprésence aussi du deuil et de l’absence. Le départ du mari pour Grâce qui se retrouve seule pour élever ses enfants, le départ d’abord de sa sœur adorée pour Nathan puis de la mort de son épouse. La solitude de Christina dans cette famille loin de son pays.On a aussi une ambiance particulière, angoissante qui se diffuse au fil du récit.
Mais ce récit n’est pas que cela comme toujours chez l’auteur il y a aussi des passages lumineux, des personnages qui aident et réconfortent. Les personnages des jumeaux et leurs relations avec leur père, la figure protectrice et tutélaire de Cora qui protège Nathan, la rencontre avec Claire qui met en route un bouleversement. La reconstruction du passé, de son histoire intime qui libère peu à peu cette famille dysfonctionnelle. La fin est particulièrement réussie et donne une autre dimension aux personnages
C’est donc un récit aussi sur la reconstruction, la vengeance, l’abandon, le non dit, les dysfonctionnements familiaux et dans le couple. La force de l’écriture de l’auteur est de faire de cette mosaïque de sensation, de personnages un récit cohérent et diablement bien construit. On assiste à la reconstruction et à l’acceptation de leur histoire commune et pourtant si personnelle.
Récit riche foisonnant, poétique, tortueux, triste et gai, nostalgique, angoissant. Et pourtant avec de l’espoir, un beau voyage dans l’âme humaine du plus sordide au sublime, de l’amour fou à la vengeance, de la famille à la solitude. Un récit une fois de plus qui interpelle, exigeant, dérangeant, intelligent et profondément vivant. Si vous n’avez pas découvert l’écriture magique de Delphine Bertholon il est largement temps, prenez ce livre et laissez vous porter par ces mots.
Delphine Bertholon nous enferme dès les premières pages dans l'atmosphère sombre d'une maison retirée du Beaujolais, où tous les membres d'une famille se retrouvent chaque année pour Noël, plus par habitude que par véritable envie. Tous ces personnages interagissent machinalement et il règne tout au long de ces échanges comme un malaise inexplicable.
Le récit navigue alors entre le présent, marqué par le deuil du fils Nathan et le passé de la mère Grâce, qui semble chargé d'un très lourd secret. Le retour du père, jusque là absent et l'apparition de phénomènes étranges, vont faire ressortir les vieux démons et les souvenirs d'un drame enfoui entre les murs de cette bâtisse familiale.
L'auteur utilise une belle écriture pleine de finesse pour nous cerner et nous lier malgré nous, aux dissimulations et au destin de cette triste lignée. J'ai été séduit par ce conte de Noël plutôt noir et dérangeant, d'autant plus que l'action se déroule dans ma région d'origine. La lecture d'un autre "Delphine Bertholon" est donc fortement envisagée, voire programmée.
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