Une librairie à notre époque. Recroquevillé dans une alcôve garnie de rayonnages, Marc ouvre un livre, feint de lire les premières pages. Il a l'esprit ailleurs : elle, Marguerite, est arrivée sans crier gare. Elle s'écarte. Elle est magnifique. Marc baisse les yeux. Il a l'impression d'avoir quinze ans, de resquiller. Ce n'est pas la première fois qu'il la croise devant ces étagères. Elle ne l'a pas remarqué pour autant.
Monsieur le bâtonnier Marc Faust broie du noir. Il aurait pu se marier, convenablement, ne pas rester le vieux jeune qu'il est devenu. Marc a longtemps été le plus jeune : le plus jeune à prêter serment, le plus jeune associé, le plus jeune à ne pas tenir ses promesses initiales. Marguerite, elle, a soif d'absolu, mais sa quête reste vaine. Manque un trait d'union. Tombé de nulle part, à deux pas de Marc, une sorte de faune, barbichette et regard perçant, lui sourit avec un air complice : Memphis Thot, l'ancien dentiste devenu psy.
Après s'être attaqué au mythe de Saturne et à la légende d'Orphée, l'auteur nous offre ici une version jubilatoire de Faust, où l'intrigue - certains y verront une parodie des thrillers ésotériques - mêle loufoque et analyse des travers de notre société. à un train d'enfer.
Dans une petite librairie, Marc Faust, avocat de profession, rencontre ici un personnage qui sera pour lui la possibilité de répondre à ses désirs. Il est épris de la belle Marguerite, de cette séduction musicale alors que, aidé des talents particuliers de Thot, il parvient à jouer tel un divin pianiste parvenant à toucher au-delà du coeur de son auditoire. Mais est-il sans danger de pactiser avec un être qui ne nous veut « que » du bien ?
Voici bien longtemps que je ne m'étais pas intéressée au mythe de Faust de Goethe. Pour tout dire, je ne l'ai jamais lu, ayant étudiée une partie de l'oeuvre durant ma scolarité, il est resté, comme « La Divine Comédie » de Dante Alighieri, dans la liste des oeuvres qui me semblaient inatteignables. Mais, ayant lu ce dernier, et redécouvrant le mythe au travers de cette version librement inspirée d'André Bercoff, ma curiosité me demande de m'y atteler. Férue de lecture, je vais essayer de ne pas laisser ce mythe trop longtemps sur l'étagère de ma bibliothèque.
Pour revenir à Marc Faust et à Thot, ce duo m'a vraiment plu. Tout d'abord par le rythme et l'improbable des situations, mais aussi par ce lien particulier qui remet tout en question. Se connait on vraiment bien soi même où alors sommes nous en attente perpétuelle de mieux nous cerner via l'avis d'autrui ? C'est une réflexion qui reste, car comment s'en remettre à la promesse de quelqu'un lorsque nous percevons uniquement ce que nous voulons voir ? La réalité n'est pas si « logique ».
Plonger dans ce livre, c'est tourner les pages avec un petit rictus en coin, car l'improbable se frotte à un comique de situation bien mis en scène par l'auteur. Loin d'une lecture que je dirai « sérieuse », je me suis plongée dans « Faust, juste une p'tite dent » avec curiosité, et légèreté. Une lecture qui fait du bien, car elle se résume à un sens du verbe qui permet de voir et comprendre le pourquoi de certains choix. Serions-nous prêts à mettre notre âme en jeu pour être sûr de vivre des plaisirs choisis ou un objectif précis ? Des interrogations émergent, sur le sens de notre vie, sur une projection de nous même à la place du personnage. Les dernières pages sont rythmées et laisse une ouverture à un possible…
En bref : ce livre m'a fait passer un bon moment, et suscite davantage ma curiosité pour le mythe de Goethe, ne serait-ce que pour y découvrir l'envers du décor de l'inspiration de l'auteur.
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