Entre la source et l'estuaire, les fleuves sont souvent semés d'écluses, ponctués de lourds vantaux d'acier qui en régulent le flux et dictent la hauteur. Parfois, entre la naissance et la mort, les hommes décident d'ouvrir leur mémoire à double battant pour libérer le flot des mots et lâcher le flux des souvenirs pour n'en être pas submergés.
Dans ce roman l'auteur recueille la confession de Lazare, un charpentier du village, devenant, sous le regard complaisant du mari, l'amant fougueux de sa femme, venue des steppes du Kazakhstan. S'écoule ainsi, au bord d'un fleuve et à bord d'une péniche, dans une narration à la fois orageuse et fluide, un récit surprenant charriant plaisir, perversité et malignité.
Ce qui n'est au départ qu'une sorte de marivaudage ludique tourne à la rivalité démente et à la conflagration érotique, qui entraîne le village dans sa trombe. Passé la crue, ce petit monde fluvial retrouve son étiage moral et son cours tranquille, mais le fleuve garde, lui, un goût saumâtre et une saveur amère.
Sous l'invocation de Simenon et de Jean Vigo, se déploient l'histoire et le destin d'un homme, entre chutes et rapides dans un récit magistralement mené.
Un jeune homme et son père naviguent sur les canaux pour acheminer des bateaux et font une halte sur le Doubs, dans le port d'un petit village. A la faveur de cet arrêt dans un café du bourg, notre narrateur va découvrir un drôle de personnage, Lazare. Celui-ci est marqué à jamais, son visage porte les stigmates d'un passé douloureux. La curiosité du jeune homme est piquée, il veut connaître son histoire. Lazare se confie une dernière fois et conte sa vie.
Dans ce coin perdu de Franche-Comté, débarquent, Endrich Fornblung, un homme riche et vieux, et son épouse Ouliana, une femme très belle et beaucoup plus jeune, d'origine russe du Kazakhstan. Sa fortune fait vivre ce village. Homme à tout faire, menusier, Lazare est vite embauché par le mari. Une triangulaire se forme, entre amitié pour Endrich et amour que ressent Lazare pour Ouliana. Lazare étant lui-même mariée à Juliette et père d'une petite fille. Lazare va-t-il résister à ses sentiments envers Ouliana ? A quel jeu joue Endrich ? Qui est vraiment Ouliana ? Que se passe-t-il dans ce couple ?
Le récit se lit d'une seule traite, presque d'un seul bloc. L'histoire délivrée par Lazare est captivante mais attendue. quelques phrases nous font revenir dans le présent. Ce livre court, 160 pages, nous emmène dans un autre espace temps, d'abord féérie romanesque autour d'une triangulaire amoureuse, puis à la manière d'un conte, la morale de l'histoire arrive pour clore le drame sous-jacent qui va faire basculer l'histoire.
J'ai pris du plaisir à lire ce roman mais je m'attendais tellement à cette fin. Je remarque une très belle plume, un peu intemporelle, qui évoque des choses tristes de la vie.
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