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Un enjeu lexicologique : que la chouette habite le dictionnaire. Il y a un âge de l'abécédaire, quand le philosophe revient à sa langue pour imprimer sa marque au lexique. Pour cette recherche lexicologique sur le concept de permanence (ici : demeurance), nous nous sommes placés au coeur du paradigme temporel, afin de mobiliser les locutions et tournures de la langue pour enrichir le trésor de la langue philosophique. En philosophe du langage et du texte, j'ai tenté d'élucider les décisions de méthode qui forgent son lexique.
Les événements sont plus réels et les formes plus pérennes que les choses, les dispositions que les états de conscience, les processus que les structures. Il fallait restaurer l'épaisseur métaphysique, théologique, scientifique, poétique de la notion de permanence. Notre méthode est érotétique (on s'interroge), catégoriale (on rayonne autour du foyer catégorial permanence-pérennité-précarité) et textologique (on convoque le pluriel des types de textes).
C'est un impératif nouveau pour l'espèce : happée par le court terme, notre modernité est malade de précarité. J'ai voulu raviver le visage plus qu'à demi effacé de la permanence comme un défi : introduire son concept ; lui garder une fonction catégoriale dans la recherche. Sujet orphelin, moins exploré que l'histoire, la durée ou l'évolution, il concerne pourtant la survie de l'humain.
Soit à inaugurer une relation de demeurance au plus intime de la gouvernance humaine du temps. La nécessité de prendre pied dans la durée, le rapide changement de notre rapport au corps, à la mort, à la procréation, et surtout le sens johannique du demeurer en Dieu par l'amour sont recentrés contre la précarité du site humain, par la pérennité de l'espérance. Cela importe à la conception de la vérité. Les Septante avaient choisi de rendre le mot biblique qui signifie permanence, 'èmèt', par le grec 'alètheia', vérité. Refaisons donc nos permanences.
On commence par le paradoxe : seul le changement est permanent. On continue par l'aporie : l'être n'est-il pas détrôné par le flux du devenir ? Même si la sagesse orientale s'imprègne d'un principe d'impermanence : notre vie telle une bulle d'eau ou une chandelle. Mais sa méditation millénaire sur l'âtman est une descente en soi qui préserve une source de bonté ontologique. Au lieu de déplorer l'impermanence, nous lui substituons les non-permanences que l'Occident n'en finit pas de détailler.
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