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Dans l'avant-propos de cet ouvrage, l'auteur écrit :
« Deux drames antiques, ou plutôt à l'antique. À force de fréquenter, scruter et commenter les tragédies grecques, il m'est venu l'idée, sans doute saugrenue, d'en écrire moi-même. » Il faut dire que Bernard Deforge s'y était déjà essayé puisque, en 2009, il avait publié un drame choral, L'Étoile du pôle (in Celui qu'Il aimait, Les Belles Lettres), écrit à la manière eschyléenne.
C'est aussi à la manière eschyléenne qu'il a conçu le premier drame de cet ouvrage, Artaxerxès ou Le Vase, tandis que le second, Jocaste ou La puissante voiture rouge du destin, serait plutôt d'une dramaturgie sophocléenne. Mais ces deux dramaturgies sont en harmonie avec les sujets traités.
Le titre-même de Jocaste et son sous-titre La puissante voiture rouge du destin nous disent d'emblée qu'y est traitée la légende d'OEdipe, archi-connue depuis l'OEdipe-Roi de Sophocle, tragédie du destin qui conduit OEdipe à tuer son père Laïos et à s'unir à sa mère, Jocaste. L'originalité du drame écrit par Bernard Deforge réside essentiellement dans le fait qu'il transpose dans le monde d'aujourd'hui la légende antique, tout en respectant ses moindres détails, y compris ceux qui concernent Créon, frère de Jocaste, mais aussi l'histoire de Pélops et de son fils Chrysippe à l'origine de l'enchaînement infernal. Il n'est pas jusqu'à Apollon, l'ami ambigu, qui ne soit présent. La famille royale de Thèbes devient ici la famille Detaibe, détentrice d'un consortium chimique international, et comme chez Sophocle il s'agit d'enquêter sur la mort brutale de Laïos dans un accident de voiture.
Artaxerxès ou Le Vase est un drame conçu en miroir des Perses d'Eschyle. En effet ce sont les vers 753 à 758 des Perses qui ont alerté Bernard Deforge et l'ont mis sur la voie de ce drame. Car ces vers nous suggèrent que Xerxès-Artaxerxès (= Assuérus) était un jeune homme dépressif (et mal entouré) avant son expédition contre la Grèce, état qui sera bien sûr amplifié par son échec, comme on le voit à la fin des Perses. Et pour connaître la raison de sa profonde dépression initiale, il faut lire les vers 31 à 38 d'Esther de Racine : la perte de son grand amour, la lumineuse Vashti, en est la cause, et le pire, par sa faute (l'histoire, plus que scabreuse, du vase...). S'appuyant sur la Bible (Livre d'Esther), sur la tradition rabbinique, mais aussi sur Flavius Josèphe, Bernard Deforge établit dans ce drame le lien manquant entre les Perses d'Eschyle et Esther de Racine, puisque le drame s'ouvre sur Xerxès en plein marasme à son retour de Grèce pour s'achever sur son bonheur retrouvé avec « la Juive gracieuse », Esther. Si l'on devait qualifier ce drame à l'image des dialogues de Platon, il conviendrait de l'appeler drame érotique.
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