"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
«C'est une part de la grandeur de Jouve et de son importance pour l'avenir de l'esprit : qu'il a désigné allégoriquement, comme aucun poète de notre temps, l'origine de la religion de l'Art, et qu'il a su que cette origine est la violence. Sa croyance au rôle sanctificateur de l'Art n'a donc jamais cessé de se heurter au doute, au sentiment de la faute, à la difficulté du travail créateur - autant de témoignages d'un autre besoin, en lui, que celui qu'il nommait religieux, et de son intuition d'un autre devoir, éthique celui-ci, à accomplir, sinon à attendre de la poésie. D'où ce fait, en 1960, qu'il en vient à publier le recueil Proses - quand l'oeuvre est intérieurement finie -, dans lequel il se détache non seulement d'Hélène, mais encore de la forme versifiée, comme si la prose, comme telle, pouvait dire quelque chose que le vers n'aurait pas dite. On lira dans le poème Abîmes, de Proses, ce désenchantement à l'égard des sacrifices ayant rendu possible l'oeuvre antérieure : Il faut retirer sa foi de l'abîme. On surprendra, dans Le Prince, auprès de la mélancolie toujours orgueilleuse du célébrant de la forme, l'aveu soudain d'un souci censuré, celui de la compassion pour toute personne réelle, et de l'amour le plus simple donné au passant quelconque. Et on rencontrera, avec Trésor - adressé à Blanche Reverchon -, peut-être le seul poème authentiquement d'amour que Jouve ait écrit, après tant de poèmes qui auront été ceux du désir.» Jérôme Thélot.
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