Les Explorateurs de la rentrée, cinquième édition !
« Comme le temps passe, disait, oui, chuchotait l'empereur au fil de son discours dans la pénombre : mais qu'il rampe, s'arrête, s'envole ou nous subjugue par l'une ou l'autre de ses innombrables variations de vitesse - cela dépend de nous, des instants de notre vie reliés les uns aux autres comme les maillons d'une même chaîne... » Écrivain à la langue somptueuse, Christoph Ransmayr est une voix exceptionnelle de la littérature autrichienne d'aujourd'hui. Après Atlas d'un homme inquiet (prix du Meilleur Livre étranger et prix Jean-Monnet de littérature européenne), il renoue avec le roman et, en grand voyageur, entraîne son lecteur loin de l'Europe et loin dans le temps.
Dans la Chine du XVIIIe siècle, l'empereur Qianlong règne en despote sur une cour résignée à la démesure de son souverain. Son dernier caprice est une série d'horloges conçues pour mesurer les variations de la course du temps : le temps fuyant, rampant ou suspendu d'une vie humaine, selon qu'il est ressenti par un enfant, un condamné à mort ou des amants. Venu de Londres à l'invitation du souverain, Alistair Cox, le plus célèbre des horlogers du monde occidental, saura-t-il exaucer les désirs de Qianlong et freiner la course des heures ?
Avec la précision d'un peintre, Christoph Ransmayr construit un récit singulier et virtuose, méditation sur la fugacité du temps et l'illusion d'en triompher par l'art.
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Comment parler de ce livre ? Je sens que je vais céder aux superlatifs, alors même qu’ils n’ont aucun sens ici. En réalité, j’ai l’impression de ne pas avoir lu ce livre, mais plutôt de l’avoir vécu. Vécu, avec Cox, avec Jacob Merlin, avec Joseph Kiang, leur interprète. Avec, parfois, la présence imposante, inquiétante de cet empereur omnipotent parfaitement imprévisible. Vécu, dans la peau de Cox, avec sa vision à lui, marquée de ses blessures – et en particulier celles liées à la mort de sa fille et au mutisme de sa femme –, et, du coup, dans l’incapacité de comprendre totalement les autres… comme chacun de nous ! Je l’ai vécu avec les yeux d’occidentaux de Cox, confronté au mode de vie quasi-incompréhensible de cette Cité interdite où les codes, les coutumes, les règlement sont aussi complexes que les erreurs sont sévèrement réprimées – jusqu’à la mort, pour un regard inapproprié, ou pour avoir laissé filtrer la rumeur que le Trés-Haut à la fièvre, marquant par là qu’il ne serait pas immortel ! -.
Construire une horloge, c’est faire du temps une matière, c’est faire de son écoulement un objet de mesure. Mais prendre la mesure du temps, n’est-ce pas en devenir le maître ? Pour Cox, le temps s’est déjà arrêté une fois, avec la mort d’Abigaïl, et c’est évidemment à elle qu’il pense lorsqu’il travaille à prendre le contrôle. L’empereur, lui, a une approche très différente du temps : il est le Seigneur des Dix Mille Ans, le Fils du Ciel, immortel. Les traditions chinoises veulent que le temps s’arrête véritablement à la mort d’un empereur : les unités sont renommées, les lois physiques doivent être ré-établies, c’est la fin d’un temps et le début d’un autre que la transition entre deux empereurs ! De l’affrontement de ces deux visions nait une réflexion sur le temps sous la plume de Christoph Ransmayr. Or qui peut dire que ce thème de l’écoulement du temps – vers notre fin ! – n’est pas au cœur de notre moi le plus intime ?
Le style de Christoph Ransmayr est indescriptible. Il parvient, par ses mots, à rendre ce qui est le plus difficile à exprimer. Il dit les sensations, il dit les sentiments, il dit les perceptions, il dit les couleurs et les odeurs, il dit les ressentis et les impressions. Et, encore plus fort peut être, il rend compréhensible le fait que ces perceptions sont des constructions individuelles. Pour essayer de faire comprendre ce que j’entends par là, je vais prendre l’exemple de cette concubine aperçue sur la jonque, An. Bien que l’empereur ait eu 41 épouses et quelques milliers de concubines, il est clair qu’il n’est, en la matière, pas prêteur. Pourtant, Cox ne peut s’empêcher de la voir, et de la regarder, lorsqu’il la croise – très épisodiquement -. Mais An, pour Cox, n’est pas An, la concubine du Fils du Ciel. Elle est, comme il la décrit, une incarnation d’Abigaïl et de Faye. Elle ne leur ressemble pas, mais elle leur « correspond« , une correspondance que Cox décrit dans la citation donnée au début de cette chronique.
L’expérience de lecture de ce livre, pour ceux qui la partageront, est assez unique. Forte, puissante, riche en émotions, exotique : j’ai le même sentiment, au moment de reposer ce livre, que lorsque vous retirez des lunettes 3d. Après quelques heures dans cet univers coloré, il est l’heure de revenir à la réalité. Il y a ce très léger décalage, le sentiment d’avoir été « un peu à côté« , exactement ce que j’attend d’un roman… Alors, merci Monsieur Ransmayr !
Une dernière précision. Le livre se termine avec un bref texte intitulé Pour finir, dans lequel l’auteur indique s’être inspiré librement de la vie de James Cox, horloger et constructeur d’automates du XVIIIe siècle, à Londres, dont un collaborateur s’appelait Joseph Merlin, et dont on retrouve des oeuvres dans les plus grands musées du monde (à L’Hermitage, à Saint-Pétersbourg ; au Met, à New-York…), mais aussi dans les pavillons de la Cité interdite de Beijing. S’ils n’ont jamais fait un tel voyage en Chine, ils ont effectivement travaillé à une horloge atmosphérique dont s’inspire le roman. L’empereur Qianlong, pour sa part, a bien existé, avait bien un goût affirmé pour les automates et les horloges, était féru de calligraphie et écrivait de la poésie. Il a renoncé au trône en faveur de son fils, uniquement pour ne pas régner plus longtemps que son grand-père… Ces éléments, je les avais cherchés et trouvés sur le web avant de lire ce passage. Et comme j’ai déjà eu l’occasion de l’écrire ailleurs, pouvoir démêler le vrai de l’hypothétique est pour moi un gage de qualité. Alors, à tous ceux qui aiment lire des romans historiques dont la base soit vérifiable, n’hésitez pas : Cox ou la course du temps ne vous décevra pas !
J'ai relu plusieurs fois certaines phrases parce qu'elles me faisaient vibrer... C'est la magie des mots écrits, qu'on rencontre souvent dans ce roman sur le temps qui file, qui va et qui vient, sur la vie et sur l'ailleurs.
Alister Cox un horloger constructeur d’automates et ses trois compagnons abordent les côtes chinoises le jour où l’empereur fait couper le nez à vingt-sept fonctionnaires des impôts.
Qianlong, fils du ciel et seigneur du temps suivit d’une cohorte de quarante et une épouses, cinq mille courtisans et trois mille concubines, entend tout,voit tout, même quand il dort, il peut décider de la vie ou de la mort de tout un chacun. L’égal des dieux demande à Cox de construire des horloges qui mesurent la course variable du temps, car le temps ne passe pas à la même vitesse, selon que l’on est un condamné à mort, ou un enfant.
Une horloge alimentée par le force variable du vent comme le mouvement du temps de l’enfance.
Une horloge mue par la braise pour indiquer l’heure de la vie d’un condamné qui part en fumée.
Mais surtout une horloge capable de mesurer l’éternité, un mouvement qui ne s’arreterait jamais, sans avoir besoin de le remonter, une horloge tirant son énergie de la variation de la pression atmosphérique avec un noyau fait de mercure. L’horloge des horloges.
Cox et ses compagnons se mettent à l’ouvrage sans se rendre compte que cette horloge risque de sonner leur dernière heure.
Même si tout est inventé, l’histoire, les personnages, on entre avec plaisir dans ce récit dont la fuite du temps est le thème central. L’auteur nous fait pénétrer derrière les murs infranchissables de la cité interdite la ville pourpre et à Jehol la résidence d’été de l’empereur. le Seigneur des Dix Mille Ans, qui détermine les saisons, qui possède tout sauf la maitrise du temps. Une écriture précise comme le mouvement de l’horloge pour décrire les fastes de la cour impériale, les tortures que subissent ceux qui ont osé porter un regard sur le Très-Haut, la beauté de la nature enneigée et le désespoir d’un homme brisé par la mort de sa fille unique. Une parabole sur le temps qui représente la vie et le désir fou d’un homme d’atteindre l’éternité.
Avis de la page 100 explorateurs 2017
Alistair Cox, le plus grand horloger de son temps est invité par l’empereur de Chine Qianlong afin de lui construire des horloges capables non pas de mesurer le temps qui passe au fil des heures mais de mesurer le temps qui passe à travers les yeux d’un mourant, d’un bébé, d’un condamné à mort …en fait le temps comme on le ressent.
C’est un empereur despotique, tyrannique et totalitaire et j’ai eu beaucoup de mal au début à entrer dans l’histoire car le livre s’ouvre sur une scène de tortures assez spectaculaire de part sa description mais encouragée par mes pairs explorateurs, j’ai persévéré dans ma lecture.
Le style se délie peu à peu et semble devenir moins confus…donc je retourne en Chine aider Alistair Cox à construire ses horloges hors du temps…
Chronique finale « Cox ou la course du temps » de Christoph Ransmayr
Alistair Cox, le plus grand horloger de son temps se rend en Chine chez l’empereur Qianlong pour lui construire une horloge hors du temps, capable de mesurer le temps indéfiniment, non seulement le temps mesurable mais le temps ressenti. Il s’attèle à la tache avec ses associés. Arrivés en Chine ils se retrouvent devant un empereur exigeant, despotique, dictateur et sanguinaire. Alistair Cox transporte un lourd passé, il a perdu sa fille de 5 ans tragiquement et sa femme depuis le drame s’est terrée dans le silence. Son séjour en chine sera troublé par la présence d’une femme qu’il aperçoit à plusieurs reprises et qui ne le laisse pas indifférent.
Le temps est l’élément central de ce roman, mais le temps peut-il être maitrisé, quantifié, figé et emprisonné, a -t-on le droit de suspendre celui –ci même si on est empereur et qu’on se donne le droit de l’arrêter pour prolonger l’été , même quand les premières neiges nous indiquent que l’on fait fausse route ? Cox sera-t-il capable de mener à bien ce projet et surtout le pourra-t-il à temps et ainsi livrer cette horloge exceptionnelle et hors du temps capable de mesurer le temps indéfiniment, sans s’interrompre jamais, dépasser le temps de la vie …
Au début j’ai eu du mal à entrer dans l’histoire, le style était compliqué, les phrases longues et de construction complexe, on avait l’impression de s’empêtrer dans les rouages du temps. Heureusement à l’instar du temps qui passe, le style s’est radoucit, la compréhension est devenue plus facile et la poursuite de la lecture plus aisée.
Il y a de nombreuses descriptions dans ce roman, on est plongé au cœur de l’histoire de la Chine, une Chine aussi attirante que repoussante, une chine mystique et mystérieuse. Mais le temps qui peut être notre allié quand il est pleinement à notre disposition peut nous desservir surtout s’il vient à manquer. C’est cette expérience et ce dilemme autour du temps qui s’impose à Cox. De son côté, l’Empereur Qianlong devra affronter la question de la légitimité ou de la vanité d’une maîtrise entêtée du temps et ce qui se cache sous cette volonté de toute-puissance.
Avis de la page 100 (Cox ou la course du temps)
Alistair Cox, le plus grand horloger anglais de son temps (18è siècle), grand inventeur et amateur d’automates, part, suite au décès de sa fille adorée, en Chine auprès de l'empereur Qianlong, pour lui construire une horloge particulière.
J'ai mis du temps à rentrer dans l'histoire car le style de l'auteur (ou celui du traducteur, car le texte original est écrit en allemand) n'est pas facile: les phrases sont très longues, pleines de descriptions précises, de références…Et le premier chapitre, qui décrit notamment les tortures infligées aux opposants de l’empereur, est un peu indigeste.
Le coup de foudre n’a donc pas été immédiat, heureusement, mes amies des #explorateursdelarentrée m'ont donné envie d'en savoir plus… Le style devient plus fluide au fil des chapitres et on est peu à peu pris par l’intrigue...
Chronique d'exploratrice de la rentrée:
Un roman particulier sur la Chine du 18e siècle. Un horloger anglais célèbre et vivant un deuil très douloureux est invité par l’empereur Qianlong à Beijing pour lui construire une, puis une deuxième et enfin une troisième horloge dont le mouvement perpétuel serait un défi au temps. Véritable réflexion sur le temps qui passe, ce livre rend bien compte des désirs totalement extravagants d’un empereur despotique, véritable tyran pour tous les humains qui l’entourent.
J’ai mis du temps à rentrer dans l’histoire car le style est un peu difficile au premier abord : les phrases sont un peu longues et très détaillées, la ponctuation inattendue ; mais lorsque l’on entre dans le cœur de l’histoire, on est pris par la poésie du texte et par la réflexion philosophique qui en émane. Un roman intéressant, qui pose des questions qui sont toujours actuelles sur la « course du temps ».
Chronique #Explolecteur :
XVIIIe siècle, Alister Cox est le plus célèbre horloger de son temps. Si doué que l’Empereur de Chine Qianlong requiert ses talents pour une série de création d’horloges unique au monde. Il accepte la mission alors qu’il n’a pas touché à une horloge depuis des mois, depuis la mort de sa fille Abigaïl. Une blessure vive qui a arrêté le cours de sa vie. Entouré de ses fidèles partenaires, Cox va découvrir un pays aux coutumes bien éloignées de celles d’Occident et un empereur à la hauteur de sa démesure : despotique, collectionneur de femmes dont une en particulier qui rappellera à Cox le souvenir de sa fille et de Faye, sa femme, devenue muette depuis la mort de leur enfant.
Après ces horloges qui rendent compte des instantanées de vie, cet homme qui règne avec une main de fer sur la Chine souhaite que l’horloger-joailler lui construise un objet unique, l’horloge éternelle. Cox imagine alors une horloge fonctionnant sans aucune assistance. Une horloge qui continuera à écouler le temps, siècle après siècle.
Cox ou la course du temps est tout simplement un voyage au cœur de l’imaginaire. Dès la lecture du titre, on sait que l’on plongera dans un univers hors du commun.
Si Christoph Ransmayr se base sur un empereur ayant réellement existé et un horloger mi-réel, mi-fictif, le dépaysement est total. J’étais d’abord sceptique, car ce n’est pas vraiment mon genre ni mon époque préférés en littérature mais finalement l’auteur a réussi à m’embarquer dans un monde où le temps était comme suspendu. J’avais la sensation que les minutes s’étaient arrêtées, seules les pages tournées me rappelaient au temps. J’ai été happée par l’aventure, par la minutie des détails apportés à l’art et la technique mais aussi par les descriptions à la fois cruelles du despotisme et incroyablement belles des costumes et des paysages. Moi qui ne suis pas franchement attirée par la Chine, j’aurai presque envie de m’y rendre grâce au talent dans la plume de Christoph Ransmayr.
Ce roman est une véritable contemplation d’une époque, d’un métier et du temps, thème central avec lequel les personnages vont tenter de jouer mais aussi de l’appréhender. Et le temps comme outil deviendra également un pansement pour Cox, avant de devenir un questionnement pour le lecteur. Quelle interprétation donner au temps ? Les heures, jours, saisons suffisent-ils à définir le temps ? Moult questions auxquelles je n’ai pas trouvé de réponses, certes, mais qui m’ont en tout cas ouvert l’esprit.
Tout cela s’accompagne d’une plume d’une précision comme j’en ai rarement vu. Il est vrai qu’il faut parfois s’accrocher car les phrases sont longues, ponctuées de multiples virgules mais malgré cela l’écriture est tellement maîtrisée et poétique que je me suis laissée porter, voguer dans l’espace-temps de ce roman. Ce n’est pas un roman qui se dévore, c’est un roman qui se déguste, comme il convient de déguster le temps qui passe.
Mention spéciale au traducteur Bernard Kreiss, qui a fait un travail remarquable sur ce roman pour permettre au lecteur de s’imprégner totalement de l’univers de Ransmayr.
Avis à la page 100
Transportée dès les premières pages grâce à l'écriture délicate et précise de l'auteur, me voilà partie pour un voyage vers la Chine sous le règne de l'empereur Qianlong.
Cox, un célèbre horloger et créateur d'automates anglais est alors invité par l'empereur afin de lui construire des horloges uniques à la hauteur de sa démesure. A peine arrivé dans ce pays, une femme-enfant aperçue à plusieurs reprises va peu à peu intriguer notre héros. Mais dans un pays où un regard non autorisé posé sur une chose ou une personne est passible de mort, Cox va devoir apprendre à refréner sa curiosité. Alors quels types d'objets fous seront créés pour ce dirigeant despotique ? Qui est cette femme ? Ce voyage ne sera-t-il que source de richesses ou sera-t-il pour Cox un moyen également de guérir de la mort de sa fille et du silence de sa femme ?
Si j'étais sceptique en démarrant ce roman, me voilà désormais conquise au bout de 100 pages. J'ai hâte de connaître la suite des aventures de cet inventeur du temps et hâte de savoir ce que me réserve encore l'écriture de Christoph Ransmayr.
En digne Exploratrice 2017, ma mission première concernant ce roman – outre le fait de le lire, bien évidemment ! – est de donner mes premières impressions une fois parvenue à la page 100… Pour le coup ce sera à l'issue de la page 103, car je n'aime définitivement pas m'arrêter en plein milieu d'un chapitre ! ^^
Quelques mots pour résumer le propos du roman : Tandis qu'il tente de se remettre de la mort de sa fille Abigaïl, disparue à l'âge de cinq ans, Alistair Cox, un anglais considéré comme étant le plus grand horloger du monde, est invité par le terrible Empereur Qianlong dans cette Chine du XVIIIème siècle encore méconnue, afin d'y réaliser toute une série d'horloges susceptibles de mesurer les variations du temps, de le mesurer non comme il passe mais comme il est ressenti...
C'est un roman prenant mais aussi exigeant, qu'il faut prendre le temps de lire pour en mesurer toute l'étendue du propos, ce que je m'attelle à faire, cela va sans dire. Fort d'une plume d'une incroyable poésie, l'auteur nous fait découvrir la Chine du XVIIIème siècle, un pays fascinant autant qu'il est inquiétant. La notion de danger nous prend à la gorge d'emblée puisqu'il ouvre sur une scène de tortures infligées à des autochtones pour on ne sait quel motif, incitant notre horloger à prendre toutes ses précautions. Mais l'auteur nous offre avant tout un voyage presque philosophique et poétique au coeur même du temps, tel qu'il s'envisage, tel qu'il défile et nous glisse entre les doigts, inéluctablement, une réflexion sur notre rapport au temps et notre volonté de vouloir le retenir ou le prolonger. Et l'auteur quant à lui prend le temps d'accorder au temps les mots qu'il faut pour en faire l'éloge tandis qu'il nous en met plein les yeux au travers d'époustouflantes descriptions. Dès lors je ne m'accorde plus de temps pour me replonger dans cet envoûtant roman...
Avis final...
Le pitch : Tandis qu'il tente de se remettre de la mort de sa fille Abigaïl, disparue à l'âge de cinq ans, Alistair Cox, un Anglais considéré comme étant le plus grand horloger du monde, est invité par le terrible Empereur Qianlong dans la Chine du XVIIIème siècle encore méconnue, afin d'y réaliser toute une série d'horloges susceptibles de mesurer les variations du temps, de le mesurer non comme il passe mais comme il est ressenti, avant de réaliser l'horloge éternelle...
Ne croyez pas à un mauvais jeu de mots si je vous dis qu'il m'a fallu du temps pour ingérer et digérer cet impressionnant roman qui nous propose un véritable voyage dans le temps pour évoquer la course du temps. C'est un roman prenant mais aussi exigeant, qu'il faut prendre le temps de lire pour en mesurer toute l'étendue du propos. Un roman dont je tiens en préambule à saluer l'admirable traduction de Bernard Kreiss qui a su retranscrire toute la poésie et la signification des termes employés par l'auteur.
Il m’est difficile de vous parler de cette lecture qui m’a littéralement soufflée. Fort d'une plume d'une incroyable poésie, l'auteur nous entraîne ainsi dans différents voyages au travers d'un seul écrit.
Parce qu'il nous transporte d'abord loin de nos terres et de notre époque, l'auteur nous fait découvrir la Chine du XVIIIème siècle, un pays fascinant autant qu'il est inquiétant. La notion de danger nous prend à la gorge d'emblée puisqu'il ouvre sur une scène de tortures infligées à des autochtones pour on ne sait quel motif, incitant notre horloger à prendre toutes les précautions pour ne pas défier ce terrible Empereur dont il faut craindre le courroux.
Parce qu'il nous invite aussi à une sorte de voyage initiatique, un voyage en quête de reconstruction pour cet inconsolable anglais qui n'a plus touché une horloge depuis la mort de sa fille à seulement cinq ans. Lui qui pourrait se targuer de jouer avec le temps n'a su en triompher pour sauver sa fille ; il refuse ainsi ce deuil qui lui étreint le coeur et lui ravit sa jeune épouse restée en Angleterre, emmurée depuis cette perte dans un mutisme protecteur.
Parce qu'il nous offre avant tout un voyage presque philosophique et poétique au cœur même du temps, tel qu'il s'envisage, tel qu'il défile et nous glisse entre les doigts, inéluctablement, une réflexion sur notre rapport au temps et notre volonté de vouloir le retenir ou le prolonger. Seulement par quoi peut bien se distinguer une horloge d'une autre ? "Par le regard de celui qui la contemple, par le regard de celui qui cherche à y lire son temps, le temps qui lui reste à vivre", dixit Cox au travers de ces pages.
Car c'est bel et bien la mesure du temps qui animent nos deux personnages principaux : Bien évidemment l'Empereur, un Dieu vivant qu'on ne voit pratiquement jamais mais dont on parle tout le temps, considéré lui-même comme immortel et seul Maître du Temps ; mais aussi Alistair Cox, le célèbre horloger qui s'échine à exaucer tous les vœux les plus fous de l'Empereur, au risque de s'exposer à une mort certaine en "défiant" inconsciemment ce dernier : parvenir à réaliser l'horloge ultime, l'horloge éternelle que l’Empereur lui demande, ferait de lui l’égal de celui qu’on considère le Maître du Temps...
En incontestable Maître des Mots, l'auteur quant à lui prend le temps d'accorder au Temps les mots qu'il faut pour en faire l'éloge tout en nous épatant au travers d'époustouflantes descriptions. Le texte est à la fois beau et brutal, poétique et cruel, doux et terrible, tendre et violent. C'est à ce point hypnotique que j'en suis restée scotchée de la première à la dernière page sans pouvoir le lâcher avant de prendre conscience de toute sa dimension.
En bref, c'est un roman peu banal que voici, mais un roman imposant et sensationnel, à la hauteur du délicat sujet qu'il traite : le temps qui passe.
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Superbe commentaire, Amandine! Grâce à toi, j'ai effectivement poursuivi malecture et pu éprouver la poésie de ce texte! Merci!