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Selon l'auteure, l'homme moderne assiste à l'éclatement de sa vie et à la fragmentation de sa personne : production d'enfants en laboratoire, marchandisation des cellules, des tissus et des organes du corps humain... Une réflexion sur la dignité de la personne, le respect du corps féminin et sur l'usage des mères porteuses.
"Corps en miette", de Sylviane AGACINSKI a été publié en 2009. La nouvelle édition que je viens de lire (Flammarion, 2013), a été revue, complétée et actualisée par l'auteure.
Le propos reste le même. Quel sens éthique peut-on donner à l'enfantement par une mère porteuse ? Quel est le baby business qui se cache derrière cette pratique rebaptisée, pudiquement ‘GPA’ pour ‘gestation pour autrui’ ?
Dans la foulée d'une kyrielle de grands penseurs de l'humanité mais avec des termes simples, des mots et des phrases à la portée des citoyens que sont les lecteurs, Sylviane AGACINSKI, philosophe, dénonce la violence extrême qui prévaut dans cette pratique de ‘location d’un corps, usine biotechnologique à bébés !'
Avec justesse, elle démonte les manigances des lobbies qui tirent les ficelles et des bénéfices juteux, en invitant les femmes ‘au grand cœur’ à donner ‘un peu de leur personne’ pour ‘sauver de la détresse les pauvres couples vivant l’horreur de ne pouvoir avoir d’enfant’ ! Avec brio, pour qui accepte de la suivre, elle démontre les énormes erreurs qui entachent ces raisonnements faussement altruistes. Les mères porteuses, partout dans le monde sont les pauvres, les couples qui passent commande sont les riches. L’incapacité pour une femme à être enceinte est un problème médical qui n’est en rien guéri par le fait qu’une autre se prive de son corps, de sa vie affective, de son identité fondamentale de mère et de l’enfant - le sien ! – qu’elle doit ‘livrer’ dès la naissance. ...
Replaçant toute son analyse dans une approche très documentée, avec de nombreuses références et commentaires en bas de page, l’auteure resitue le saisissement actuel du Corps par l’Economie. Elle montre combien la servitude des femmes de jadis a évolué sans pour autant, peut-être, vraiment régresser. Plus spécifiquement, elle s’attache à montrer combien, de nos jours, il existe trop de possibilités favorisant la production d'enfants ‘fabriqués’ au cœur même d’un marché du corps qui pousse l’homme, la femme, à se séparer de son ‘insubstituable corps’.
Aller dans le sens de l’apologie mystificatrice de la GPA, c’est perdre la dignité de l’Être.
En conséquence, l’auteure appelle au maintien de la Loi française interdisant toute pratique commerciale du corps, interdisant donc la gestation pour autrui. Elle appelle notre société à laisser prévaloir la suprématie de la dignité sur celle de la liberté individuelle.
Alors que le débat refait surface au cœur du monde politique français et européen (voir JT de ce 3 juillet 2015), ce livre a, pour moi, l’excellent mérite de replacer la GPA dans un cadre éthiquement plus large que celui habituellement souligné par ses partisans. Une vraie réflexion morale, éthique, profondément humaine...
Mon coup de coeur, pour ce livre, trouve son origine dans ma satisfaction d'avoir pu, grâce à la fluidité étayée de pensée de l'auteure, mettre des mots et un cadre conceptuel à ce qui était mon ressenti à propos du sujet traité !
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