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«Dans Coeur des ténèbres, Conrad parle de la fin des grandes explorations et de l'avènement de la gestion capitaliste dans les colonies; il parle de la supériorité technologique des Européens; il parle de la distance entre l'idée colonialiste fondée sur le Progrès et la réalité des formes de la domination coloniale au Congo. Tout cela constituait l'actualité coloniale de 1898. De cette actualité, Conrad ne tire aucune conséquence politique explicite. Coeur des ténèbres, de ce point de vue, n'est pas un pamphlet anticolonialiste. Conrad n'y demande pas, pour l'«État indépendant du Congo», une véritable indépendance. Il n'y suppose pas que les Européens aient à reconnaître aux Africains une quelconque dignité. La dignité des Africains est d'ailleurs ambiguë dans cette nouvelle. Paradoxalement, là résident sans doute la grandeur de Conrad et la puissante actualité de son texte. Coeur des ténèbres parlait aux Européens de 1898 de ce que c'était que le Congo, et de ce qu'ils croyaient que c'était. Mais de cette double réalité Conrad a tiré une aventure de portée bien plus générale, peut-être universelle, d'une portée qui est, en tout cas, sans aucun doute, aujourd'hui encore, d'une immense valeur.» Sylvain Venayre.
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