"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Être femme d'éducation musulmane et écrire, c'est déjà braver les interdits du regard et du savoir, mais qui plus est dans la langue de l'Autre, le français, c'est risquer de casser le lien avec la lignée des femmes.
Assia Djebar, qui a écrit son premier roman à vingt ans, en pleine guerre d'indépendance, explore ici ce qui a nourri son oeuvre et la nourrit toujours, toutes ces voix de femmes en arabe dialectal et en berbère qu'elle ramène à la vie dans son français à elle, tissé de toutes ces langues, de ce marmonnement multilingue, de ce chant qui ne doit pas être d'oubli. Elle évoque son enfance, sa jeunesse, ses quatre premiers romans, suivis d'un long silence de dix ans, et puis, à quarante ans, l'impérieuse nécessité de l'acte autobiographique avec L'amour, la fantasia, premier tome du quatuor d'Alger qui marque son nouveau départ.
Ces voix qui m'assiègent témoigne du parcours d'une femme en écriture, pour qui l'identité n'est pas seulement d'hérédité mais de langue. Mosaïque autant que polyphonie, on y sent, par ce devoir impérieux de transmission, ce qui se joue dans l'acte d'écrire de grave et de léger, de sensuel. et de tragique, de l'histoire collective et de l'histoire individuelle, du rapport obscur entre le " devoir dire "et le " ne jamais pouvoir dire ".
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