Premières chroniques, premiers avis, et déjà des auteurs et des autrices à suivre...
Waouh !
Bibike, Ariyike, et leurs frères Peter et Andrew tombent dans la pauvreté du jour au lendemain. Pour ces quatre enfants de la classe moyenne aisée nigériane, ce qui hier semblait acquis devient l'enjeu d'une lutte constante. Abandonnés par leurs parents, ils se réfugient chez leur grand-mère et survivent comme ils le peuvent à Lagos, ville âpre et convulsive. Si la vie est difficile pour tous, elle est particulièrement cruelle pour les deux soeurs : être une femme au Nigeria, c'est avant tout être considérée comme une proie. Proie pour les hommes, la religion, la religion des hommes. Black Sunday fait une peinture sans fard d'une société nigériane gangrénée par la corruption et met en lumière son rapport brutal aux femmes. Une lueur d'espoir vacillante, mais bien présente, sourd pourtant au milieu des pages. Avec ce premier roman, Tola Rotimi Abraham entre de plain-pied en littérature d'une écriture tranchante, sans compromis.
Premières chroniques, premiers avis, et déjà des auteurs et des autrices à suivre...
Quatre frères et sœurs nigérians élevés jusque là dans une certaine aisance, à l’abri du besoin sont soudain projetés dans un univers de misère. Les voilà chez leur grand-mère et chacun tente de survivre dans un monde sans pitié. La vie sera encore plus difficile pour les filles.
Une écriture directe et sans fard, Tola Rotimi Abraham, nous entraine au sein de la société nigériane où la corruption semble être la normalité. Les femmes peinent à y trouver une place sans que les hommes profitent d’elles.
Le livre est dans la mouvance actuelle des auteurs africains : dénonciation de la corruption, de la misère, le combat des femmes, l’accès à l’éducation. Il est assez froid et il n’y a pas cet élan de sympathie que l’on pourrait ressentir pour ces quatre enfants que l’on voit grandir dans les difficultés. Un style d’écriture sans doute lié aux études de journalisme de l’auteur.
La fin un peu trop abrupte à mon goût laisse le lecteur sur sa faim.
Dans son premier roman, Black Sunday, la nigériane Tola Rotimi Abraham donne la parole aux quatre membres d'une fratrie abandonnée par des parents indifférents dans un Lagos sans pitié pour ceux qui n'ont pas d'argent. En alternance chacun d'eux se raconte avec simplicité, sans pathos. Des jumelles adolescentes, puis jeunes femmes, se démènent pour assurer leur subsistance et celle de leurs petits frères. On les suit des années 1995 à 2015 dans une ville qui ne fait pas de cadeau.
L'auteure dresse un constat froid, lucide, mais non dépourvu d'humour, de la société nigériane. Le carcan des traditions, l'indifférence du pouvoir, la corruption à tous les niveaux, l’hypocrisie de la religion, le machisme primaire de tous les hommes, l'inculture des femmes, régissent un quotidien où tout semble aller à vau l’eau.
Les femmes, à la merci de toutes sortes de prédateurs, sont celles qui souffrent le plus. Ce sont des femmes objets, hyper-sexualisées et conditionnées depuis toujours à travailler durement pour les hommes. Elles cherchent un soutien dans des congrégations religieuses plus ou moins fumeuses qui fleurissent dans ce pays. Les hommes n'y sont pas derniers à les écraser de leur autorité auto-proclamée.
J'ai plaint les personnages de ce roman, mais sans jamais vraiment m'y attacher. Ils me resteront cependant longtemps en mémoire. Je suis sortie assez démoralisée de ce récit africain dans lequel la morale serait-elle «Seuls les tricheurs arrivent à s'en sortir» ?
https://ffloladilettante.wordpress.com/2021/10/24/black-sunday-de-tola-rotimi-abraham/
Je rentre d’un voyage livresque à Lagos au Nigeria, avec des frissons, la chair de poule en fait. J’y ai côtoyé le chagrin des enfants abandonnés, la pauvreté, la peur, les abus sexuels, l’égoïsme, la manipulation des hommes d’Eglise, la corruption, les châtiments corporels des élèves. Mais aussi les légendes Yoruba. Et j’ai beaucoup appris sur un pays dont j’ignorais tout.
C’est toujours utile d’ouvrir un livre, et parfois primordial d’ouvrir les yeux sur la misère de ceux dont le destin n’intéresse à priori pas grand-monde ici.
L’autrice soulève une vraie question : les tricheurs gagnent-ils toujours à la fin ?
C’est l’histoire de quatre enfants (des jumelles et leurs deux petits frères) issus de la classe moyenne nigériane, pour qui la vie plutôt agréable va se transformer en un éclair en une survie, une lutte de chaque instant suite au départ-abandon de leurs parents. « Si la tristesse te retourne la tête quand tu es vieux, que peut-elle faire à un petit garçon ? »
Dans cette histoire hallucinante pour nous occidentaux mais somme toute assez banale au Nigeria, Tola Rotimi Abraham a choisi de donner à tour de rôle la parole à chacun des enfants. Ils donneront leur point de vue sur leurs expériences, leur ressenti, leur tentative de reconstruction entre 1996 et 2015.
« Notre cerveau était resté bloqué en mode survie, et cela nous poursuivrait toute notre vie ».
Comment une cellule familiale stable peut-elle exploser aussi facilement ? L’autrice nous livre froidement la réponse : une mère qui perd son emploi auprès du ministre suite au limogeage de celui-ci, un père beau-parleur sans le sou qui échoue dans toutes ses entreprises. Elle ajoute à ça un cruel égoïsme parental apparent –expliqué par de nombreuses blessures mais non pardonnable – et une lettre d’adieu déposée un matin sur la table du salon… et le tour est joué ! Les enfants se retrouvent sans rien, propulsés chez une grand-mère pauvre : la route toute tracée vers une vie agréable vient de laisser place à un chemin caillouteux, dangereux, plein de brigands…
Devant la pauvreté financière et affective qui les submerge, mieux vaut encore être né garçon. Andrew et Peter vont souffrir de maltraitance scolaire, d’humiliations et de coups, de colère, de manque d’affection.
« L’odeur du chagrin me collait à la peau ».
Mais pour leurs grandes sœurs Bibike et Ariyike, les choses prennent un tour encore plus affreux. Fini l’école ! Au boulot ! (petit boulot bien sûr). Elles n’auront de cesse que de gagner leur indépendance financière, chacune à sa manière, afin de nourrir la famille et de permettre des études aux garçons.
Mais la gente masculine rôde comme une bête féroce autour de tout ce qui ressemble à une fille. Le sexe est imposé, partout, dans TOUS les milieux, tout le temps. Une seule façon pour elles de s’en sortir, le monnayer plutôt que de le subir gratuitement.
« Toutes les femmes sont la propriété d’un homme, certaines de plusieurs……..J’avais attendu trop longtemps pour choisir mon propriétaire, j’avais tergiversé par ignorance, alors j’avais été choisie » (Bibike)
« Je ne peux pas oublier ce sentiment, l’impression d’être un vieux chiffon sale qu’on peut utiliser et jeter « (Ariyike)
Beaucoup se tournent vers l’Eglise néo-pentecôtiste, le christianisme « born again », les prétendus sauveurs, les révérends hautement charismatiques, prêcheurs éloquents qui se révèlent vite des manipulateurs, pervers, hypocrites, certains même de beaux escrocs. Le sens de l’entreprise est souvent plus présent que l’Esprit Saint …
Pourquoi alors ? Mais parce qu’elle promet la prospérité, la réussite, le bien-être matériel et spirituel… et plus si affinités !
L’autrice a choisi de mettre l’Eglise au cœur de son roman. Au cœur de la détresse, de la dépendance, de la maltraitance.
Un beau premier roman avec son intrigue, écrit dans un style direct, telle la dureté qui ne fait pas mille palabres et ne s’encombre pas de sentiments.
Je soulève une dernière question : à quand le permis de mettre des enfants au monde ?
« L’égoïsme est normal, il est humain. »
Avec une intimité étonnante et une douloureuse sagesse, Tola Rotimi Abraham dresse le tranchant portrait combiné d'une fratrie, d'une ville et d'une culture, toutes semblant inexorablement au bord de l'autodestruction.
Les jumelles Bibike et Ariyike, leurs petits frères Andrew et Peter sont forcés de se frayer un destin dans la chaotique Lagos, hantés par les fantômes de leurs parents qui les ont abandonnés. le récit alterne ces quatre voix en épisodes dispersés, de 1996 à 2015, sans rechercher un linéaire lisible. Les ellipses sont très réussies car elles laissent toute la place aux lecteurs pour reconstruire les trouées temporelles. Les années invisibles semblent avoir une présence, tant pis si des éclaircissements nets peuvent manquer pour suivre les évolutions des personnages. Chaque chapitre est comme l'instantané d'un journal intime, soulignant l'inconsistance du destin et combien la tragédie court, toujours.
C'est la voix des filles qui portent le plus. Et ce qu'elles disent est terrible sur la condition féminine au Nigeria et sans doute plus largement en Afrique subsaharienne. Des proies, soumises à une hypersexualisation permanente et précoce, à des agressions sexuelles quasi inévitables. Toutes destinées à être possédées, les plus belles auront le choix du propriétaire. le recours à la gémellité prend ici tout son sens car, en découplant Bibike et Ariyike, qui ont pourtant les mêmes aspirations à la sécurité, il permet à l'auteure de proposer deux chemins différents. Chacune trouvera sa propre résilience, sa propre résistance pour accéder à l'indépendance. Leurs frères d'ailleurs sont tout aussi victimes du patriarcat car la virilité toxique est sublimée par les institutions ( école, mariage, église ) et ils devront trouver eux aussi à en contourner les pièges.
Au-delà des personnages, c'est toute la société nigériane et le fonctionnement du pays qui est dans le viseur de l'auteure. La critique de la corruption généralisée et de la fatuité des élites est acerbe, la dénonciation de la l'hypocrisie de la religion ( quelle qu'elle soit, ici essentiellement le christinianisme pentecôtiste ) tout aussi violente, se déployant dans des scènes à la crudité saisissante. Sans fard, d'autant plus que la plume de Tola Rotimi Abraham, à la fois puissante et singulière avec ces touches d'oralité yoruba, se prête parfaitement à la tragédie, avec une touche d'humour froid très pertinente.
J'ai refermé glacée ce détonnant premier roman, à défaut d'être totalement touchée par le sort des personnages.
Une famille aisée, à Lagos, au Nigeria, tombe petit à petit dans la précarité.
Les quatre enfants de la fratrie, les jumelles : Bibike et Ariyike, et leurs deux jeunes frères : Peter et Andrew, racontent leur vie et leurs difficultés, des années 1996 à maintenant. Les parents les abandonnent et ils sont désormais chez la grand-mère maternelle.
Les adolescents, jusque là très unis, s’éloignent aussi les uns des autres, pour tenter de sortir de la misère : Ariyike « Ma famille s'est rapidement détricotée, pour ne laisser qu'un enchevêtrement de nœuds lâches, chacun de nous s'éloignant des autres, à la hâte, seuls et honteux, animaux solitaires blessés. »
C’est une peinture intéressante de la société nigériane, injuste, corrompue, hostile, violente, et encore plus difficile quand on est une jeune fille et une femme.
Tous les quatre n’ont qu’une seule volonté : s’en sortir.
Ce que j’ai aimé dans ce premier roman :
- La lucidité de chacun des narrateurs face à un monde patriarcal, violent, injuste et surtout très hypocrite. Chapeau bas pour la description de la sphère religieuse où seuls les apparences, le pouvoir et l’argent sont importants.
- Les portraits des jumelles déterminées à sortir de la pauvreté, à la recherche de sens pour leur vie, et en même temps, bien conscientes des compromis subis.
J’ai suivi le parcours de chacun, jusqu’au bout et cela correspond, hélas, aux dures réalités de nombreux pays africains. Mais j’ai été déçue par le ton linéaire du récit : quatre narrateurs et une seule expression d’écriture.
J’ai regretté cette platitude alors que le récit se tenait bien et que la situation dramatique était bien exprimée.
Un roman intéressant, qui se laisse lire facilement, sans originalité.
C’est un premier roman et on retrouvera sans doute Tola Rotimi Abraham dans quelque chose de plus abouti.
Explorateurs de la rentrée littéraire 2021, avis à la page 100.
Lagos, Nigéria... fin des années 90, début 2000. On suit le quotidien des enfants d'une fratrie.
Des instantanés de vie de 4 frères et soeurs.
Bibike, Ariyike et leurs frères Peter et Andrew nous racontent chacun leur tour un événement marquant.
Chacun à travers leur anecdote décrit la société nigériane dans laquelle ils vivent.
J'aime beaucoup pour l'instant le procédé utilisé par Tola Rotimi Abraham pour dénoncer les travers de la société nigériane.
Des tranches de vie qui dénoncent l'irréparable.
AVIS DEFINITIF
Lagos, Nigéria... fin des années 90, début des années 2000.
Dans le roman « Black Sunday » de Tola Rotimi Abraham, on suit le quotidien d’une fratrie nigériane abandonnée par les deux parents.
Des instantanés de vie de deux frères et deux sœurs jumelles plus âgées unis dans les difficultés d’un quotidien dur qui n’épargnera aucun des enfants.
Bibike, Ariyike et leurs frères Peter et Andrew nous racontent chacun leur tour un événement marquant. Chacun à travers leur anecdote décrit la société nigériane dans laquelle ils vivent.
Un témoignage nouveau venant enrichir celui qui le précède.
J'aime beaucoup le procédé utilisé par Tola Rotimi Abraham pour dénoncer les travers de la société nigériane, à savoir l’utilisation du vécu et du ressenti de chacun des enfants pour dire ce que les plus faibles, et plus particulièrement les femmes subissent dans une société patriarcale.
Un roman dur pour une histoire familiale tragique qui bouleverse et émeut son lecteur mais qui est pourtant teintée de lumière. En effet, à travers les témoignages emprunts parfois de la malice des enfants on y perçoit l’amour que se porte cette fratrie. Ces quatre frères et sœurs s’aiment et on ressent cet amour tout le long du roman.
Un roman écrit avec une plume vive, incisive et sans aucune concession. Le ton est juste, proche du lecteur et sert les faits dénoncés par le texte.
Des personnages centraux attachants que l’on cerne bien et qui prennent vie et grandissent sous nos yeux tant ils sont bien décrits.
Des scènes de la vie quotidienne nigériane dépaysantes qui prennent corps sous la jolie plume de Tola Rotimi Abraham.
Une lecture difficile certes mais nécessaire que l’on se doit de lire tant les thèmes s’y rapportant sont importants comme l’émancipation des femmes dans une société régie par les hommes.
Des tranches de vie qui dénoncent l’inacceptable et éclairent le monde sur une société inégalitaire et violente.
Un très bon premier roman sociétal que je recommande sur le désir d’émancipation des femmes. J’espère que ce roman va connaître le succès qu’il mérite.
la chronique puis l'escale à à la page 100
Black Sunday de Tola Rotimi Abraham nous fait donc découvrir à Lagos (Nigeria) les sœurs jumelles Bibike et Ariyike et leurs jeunes frères, Peter et Andrew, qui vivent avec leurs parents. Pas forcément riches, ils mènent une vie calme et heureuse. Cela change lorsque leur mère perd son emploi pour des raisons politiques. Leur père échoue dans toutes ses tentatives professionnelles ou financières et leur mère est obligée de prendre un emploi d'enseignante. D’échec en échec, la cellule familiale se désagrège avec la mère qui fuit le foyer et abandonne ses enfants pour partir à New-York puis le père qui, de faillite en escroquerie, les quitte à son tour, les laissant chez sa mère et disparaît à tout jamais.
Orphelins et pauvres, les quatre enfants sont obligés de faire face à tout ce que la vie leur réserve tout en essayant de gagner assez d'argent pour manger.
L'abandon façonne la fratrie. Nous entendons parler d'eux à intervalles, avec des années qui passent entre les chapitres - mais peu importe combien d'années passent, les fantômes de leurs parents et la douleur de leur désertion se profilent toujours. Ils doivent utiliser leur intelligence et leurs ruses pour survivre. Ils se réunissent par nécessité, se désagrègent par nécessité égale, mais leur destin est clairement scellé depuis le jour où ils sont livrés à eux-mêmes.
Dans des chapitres alternés, chaque enfant raconte sa vie au cours des vingt années qui vont suivre. Beaucoup ont des titres tels que Comment construire un poulailler (Andrew 2000) ou Comment porter les jeans de maman (Bibike 2002), indiquant les compétences essentielles de la vie que chaque enfant doit maîtriser pour survivre. D'autres, comme Il est arrivé quelque chose sur le chemin (Ariyike 2010) et Comment être le chouchou de sa prof (Peter 2006) illustrent les pièges émotionnels que chacun rencontre sur le chemin de l'âge adulte.
C'est un chemin âpre et violent que les filles apprennent à parcourir plus rapidement que les garçons, catapultées par le besoin de gagner de l'argent pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs jeunes frères.
Certaines pages sont des coups de poing au ventre mais heureusement, Tola Rotimi Abraham semble bien deviner que les lecteurs ne peuvent pas supporter tant d’horreurs par page, alors elle abandonne de temps en temps la violence du quotidien et nous offre d’émouvants moments d'amour et d'humour dont l'impact est amplifié par l'horreur qui les entoure.
Black Sunday est un roman qui saigne autour de l’abandon, l’abus, le chagrin ou la pauvreté mais qu’on referme sans ne jamais rien oublier car son histoire recèle aussi beaucoup d'amour, de beauté, de poésie et d'espoir.
Très belle découverte : un joyau, ce premier roman traduit !
Escale à à la page 100
Grand plongeon puissant sur une déjà inoubliable fratrie nigériane : les sœurs jumelles Bibike et Ariyike et leurs deux jeunes frères Andrew et Peter vivent à Lagos avec leurs parents mais les problèmes ne vont pas tarder à surgir.
A chaque chapitre, on change de narrateur mais on avance néanmoins dans cette histoire familiale. Très vite on comprend que la faillite parentale va amener les quatre jeunes héros à devoir se débrouiller par eux-mêmes.
Le ton est proche et poignant. Des relations vives et fortes les lient tous quatre et nous voguons au gré de leur quotidien.
Les réalités de la vie à Lagos vous empoignent illico et ne vous lâchent pas de sitôt ! Même le livre refermé à la page 100 !
La suite dare-dare ! c'est rude mais quel bonheur à lire !
L'histoire :
Du jour au lendemain, les jumelles Bibike et Ariyike et leurs frères Peter et Andrew tombent dans la pauvreté. Abandonnés par leurs parents, ils se réfugient chez leur grand-mère à Lagos. C'est là que les jumelles découvrent la difficulté de survivre dans une société gangrenée par la corruption et les violences envers les femmes.
Mon avis :
Ce livre est une pépite. Il est fortement féministe. Les deux héroïnes sont attachantes car responsables et courageuses. Elles assument pleinement le rôle traditionnel que la communauté nigérienne leur attribue : s'occuper des garçons de la fratrie, accepter que les hommes aient le pouvoir, plier l'échine sous le poids de la religion créé par et pour les hommes, survivre seule dans la pauvreté, écarter les cuisses en silence face à la force brute... tout en construisant avec finesse et subtilité les changements. Contraintes, elles acceptent leurs devoirs et obtiennent chèrement leurs droits : exister en tant qu'individu, être indépendantes et libres, avoir accès à l'éducation. Elles ont conscience que le chemin est actuellement quasiment impraticable. Elles savent qu'aucune aide extérieure n'est à envisager. Elles avancent, vaillamment, seules.
Cette non existence d'une sororité (même entre les jumelles) m'a fait penser au magnifique roman de Djaïli Amadou Amal “Les Impatientes ”. Là aussi l'auteure déplorait l'absence de solidarité organisée entre femmes. Mais si, au Cameroun, les femmes apprennent la patience face aux épreuves ou se suicident pour échapper à leur destinée, au Niger, elles combattent, armée de leur intelligence, la cupidité, la violence et la sottise des hommes. Ariyike se vengera. Bibike gagnera son indépendance financière. Leur mère s'échappera aux USA.
Mais les femmes du Lagos ne sont jamais sereines car elles gardent profondément en mémoire l'idée transmises sous forme de contes par les grands-mères : Le tricheur gagne à la fin.
La construction en chapitre chronologique de Tola Rotimi Abraham m'a transformé en lectrice captive. Le récit court de 1996 à 2015 et donne la parole successivement à chacun des enfants de la fratrie. Le regard de chacun est unique et complète l'histoire de la famille.
Dès le premier chapitre, je m'attache à Bibike. Une enfant merveilleuse. Elle m'entraîne dans un univers où les adultes se disputent, perdent leur travail et oublient leur progéniture.
Le second chapitre me donne l'opportunité de connaître la sœur jumelle de Bibike : Ariyike qui me fait découvrir les plats du Lagos, des chansons profanes et le business pas très catholique de la Nouvelle Eglise
Le troisième et le quatrième chapitre donnent successivement la parole à Andrew et Peter, les deux petits frères que les jumelles protègent et élèvent. La vision des garçons enrichit le témoignage des sœurs. Si la vie est difficile pour chacun, elle est cruelle pour les filles. Pour offrir un toit et nourrir leurs petits frères, les deux sœurs ainés vont travailler et subir l'exploitation des hommes.
Les chapitres se succèdent ainsi, donnant tour à tour la parole à chaque protagoniste de l'histoire. Ce choix narratif est parfait pour montrer la diversité et la richesse des univers intérieurs des êtres humains.
J'aime l'immersion progressive et totale dans l'univers intérieur de ces 4 enfants.
Je me régale des contes et histoires drôles qui transmettent de génération en génération la sagesse des Nigériens. Mais la vie romancée de ses deux jeunes jumelles souligne que la situation des enfants au Niger reste dramatique en terme de survie, de soin, d’éducation, de violence et d’abus. Depuis 1995, l’accroissement du nombre d’enfants mendiants, travaillants ou vivants dans la rue est constant. Ce roman permet d'entendre le chant des enfants qui survivent au Niger. Tola Rotimi Abraham crie aux lecteurs de ne pas les oublier.
Ce premier roman est une magistrale réussite.
Il n'y a pas encore de discussion sur ce livre
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !
Ce n'est pas parfait (loin de là) chez nous, mais au final nous y sommes tout de même mieux à être nées filles en France qu'au Nigéria !