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'Faire la paix avec les Tchétchènes, ils ne seraient pas contre non plus. Une très longue paix... Les Tchétchènes sont des gens comme les autres. Les soldats pourraient aller à la pêche. Il paraît qu'il y a beaucoup de poisson dans les rivières de montagne, du bon poisson, pas bien gros, il est vrai.
Malgré tout, l'opinion générale penche du côté de la guerre.' Alexandre Jiline est commandant de l'armée russe en Tchétchénie, chargé de l'approvisionnement des troupes en essence. Un poste stratégique, qui lui permet de se livrer à un trafic de barils avec l'ennemi tchétchène. Mais Jiline a aussi bon coeur, et les villageois l'apprécient pour cela. En signe de respect, ils transforment alors son prénom en Assan : dans le folklore tchétchène, Assan est une idole de la période préislamique du Caucase qui incarne la vengeance. Mais son histoire personnelle prend un tournant décisif quand il décide de prendre sous son aile deux jeunes soldats devenus inaptes au service en les planquant dans un de ses dépôts de carburants...
Assan évoque avec brio la sale guerre de la Russie en Tchétchénie, mais ce cadre contemporain, très précis, contient aussi un roman universel qui dépeint avec force les contradictions de tout être humain dans des situations extrêmes.
Nous appelons cela de la corruption, du détournement. Le commandant Jiline préfère parler d’organisation. Mais comment éviter le chaos ? Quelle solution pour sauver sa peau dans ce bourbier où se trouve le commandant lâché par ses supérieurs ?
Quelle est cette guerre ? Les ennemis peuvent devenir les « amis », les alliés, tomber dans le camp adverse. Où est l’armée russe, où est le commandement suprême ?
Les premières pages sont édifiantes, cocasses avec ce convoi de troufions ivres qu’aucun officier n’accompagne ni ne réceptionne. Les voici montant dans les camions, s’interpellant, au premier barrage, montrant leurs culs !!! et c’est tout l’équilibre précaire des marchés et autres arrangements qui risque de tomber, surtout qu’un tchéchène est tué.
Jiline, commandant de l’armée russe, est chargé de l’approvisionnement, sur son secteur, les troupes russes en essence. Il gère ce stock d’une façon drastique et équilibrée. Dans ce pays en guerre, le commandant Alexandre Jiline, encore appelé Sacha, Sachik, Assan Sergueitch, ou Assan tout court, selon ses interlocuteurs se fait respecter. Ses interlocuteurs, plutôt ses « clients » tiennent leurs paroles, enfin presque. Il détourne un baril sur dix qu’il revend aux Tchétchènes. Cette monnaie d’échange permet à ses convois de passer sans trop de perte. Il en vend également de temps à autres, aux paysans pour les travaux agricoles.
Oui Assan est un homme d’honneur. Ils ne violent pas les femmes. (Certaines pages concernant des mères parties à la recherche de leur fils prisonniers des Tchètes sont édifiantes), ne fait par de marchés avec les armes. Lorsque des soldats russes ont échappé par miracle à une embuscade où tous ont été tués, il les prend avec lui. Bien sûr, ils doivent travailler pour lui quelques temps, mais, respectant sa parole, il recherche leurs régiments.
C’est ainsi qu’il s’est pris d’une certaine amitié pour deux jeunes gars traumatisés suite à un guet-apens.
Dans ce livre, Vladimir Makanine dénonce cette guerre où les jeunes appelés servent de chair à canons pendant que le commandement fait des affaires loin des fronts. Ces chefs peuvent même vendre un des leurs (un général inoffensif en l'occurrence) pour soulager la vindicte de Tchéchènes sans aucun remords. Là-bas, l’autorité ne respecte pas les lois, elle les arrange à sa sauce. Une guerre où les lois commerciales ne sont aucunement entravée par la guerre, où l’on tue et commerce sans aucun problème des deux côtés.
Vladimir Makanine nous offre un livre fort et dense, où l’humour est présent. Beaucoup phrases non terminées, ponctuées par des points de suspension donnent du nerf à l’écriture. C’est une lecture exigeante. L’auteur a un style direct, sans fioriture, très fort. Bref, il ne tourne pas autour du pot et cela m’a beaucoup plu. Je pense que la traduction de Christine Zeytounian-Beloüs y est pour beaucoup. Une lecture qui restera longtemps entre mes deux oreilles.
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