"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Avec Anonyme, Luc Fivet renoue avec un de ses genres de prédilection : le roman noir. Dans ce thriller social aux accents kafkaïens, un homme ordinaire, comptable de son état, découvre un autre homme en survêtement qui patiente devant la porte de sa maison. Celui-ci lui demande un euro pour le laisser rentrer chez lui. Juste un euro. Le prenant pour un clochard, le comptable lui tend une pièce et ouvre la porte. L'autre le suit dans le vestibule. La descente aux enfers a commencé. Mené à un rythme haletant, Anonyme décrit un monde où la chute peut frapper n'importe qui, à tout moment. Elle peut être rapide, parfois cocasse, mais les règles sont claires et les rôles bien définis. Chacun joue son jeu avec les cartes dont il dispose. Mais les dettes se paient cash. La mise de départ : un euro.
https://leslivresdejoelle.blogspot.com/2018/11/anonyme-de-luc-fivet.html
J'ai lu ce livre dans le cadre du prix Hors Concours dans lequel je suis engagée cette année, il fait partie des cinq finalistes.
Le narrateur, la quarantaine, est un homme ordinaire qui exerce le métier de comptable. Un jour, il découvre en rentrant chez lui un homme en survêtement qui patiente devant sa porte. Celui-ci lui demande un euro pour le laisser rentrer chez lui. Le prenant pour un clochard, le narrateur lui donne une pièce et rentre chez lui. Mais l'homme le suit et s'installe dans sa maison, lui réclamant un euro à chaque fois qu'il veut accéder à une pièce de la maison...
Ce roman raconte le huis-clos entre le narrateur et cet "anonyme". Le narrateur est un personnage solitaire, faible et sans ambition qui reste de marbre face à l'attitude machiavélique de l'inconnu qui s'incruste chez lui, un homme lâche qui va s'acquitter des droits de passage exigés pour sa "circulation domestique" ... Sa descente aux enfers commence. Bientôt l'inconnu va faire intervenir un ami bricoleur dans la maison et va l’entraîner dans des achats inconsidérés...
Ce roman est très surprenant, c'est une sorte de fable sociale, l'auteur manie l'absurde pour relater une impressionnante descente aux enfers. L'auteur dénonce une certaine société de consommation et une obsession sécuritaire car une fois qu'on a acquis des biens de valeur dans l'illusion qu'ils nous rendent heureux, il convient de se protéger des éventuels cambriolages pour protéger ces biens.
C'est une satire sociale surréaliste mais bien construite avec une certaine tension, l'écriture est vive, le récit est essentiellement constitué de dialogues. Ce roman très original m'a fait sortir de mes lectures habituelles. Je ne regrette absolument pas de l'avoir lu.
Étrange, c'est le mot. Ou aurais-je pu écrire : déconcertant, inattendu, insolite, abracadabrantesque, étonnant, saugrenu, extravagant, inhabituel, curieux. Sans doute, j'aurais pu ajouter : ubuesque, surréaliste. Parti d'une situation certes pas courante mais assez simple, le romancier construit un roman très original dans lequel la tension monte, le lecteur se demandant bien comment cet homme s'en sortira -ou pas. J'avais noté quelques passages à citer, mais je crains que les dévoiler ici n'en dise trop sur ce roman qu'il faut absolument découvrir. Luc Fivet parle de la société de consommation, de l'aliénation des foules par la consommation à outrance en leur faisant croire que posséder est l'ultime besoin du bonheur : acheter le dernier écran plat, la belle auto, le téléphone et l'ordinateur portables derniers cris... Ainsi les plus pauvres s'appauvrissent et les plus riches s'enrichissent. "On nous fait croire que le bonheur c'est d'avoir de l'avoir plein nos placards" disait Alain Souchon, tandis que quelques années auparavant Louis Chédid chantait Le cha cha de l'insécurité, car Luc Fivet centre aussi son roman sur la peur de l'autre, la peur de se faire cambrioler tous ces biens matériels achetés pour être heureux.
Dernièrement, j'ai encore envoyé paître un énième démarcheur pour une société de protection/surveillance des maisons qui ne comprenait pas que je ne veuille pas adhérer à son formidable contrat. "Rien de ce qui est dans ma maison n'a de valeur" lui dis-je. Il a fini par me dire : "Vous ne voulez pas parce que vous ne connaissez personne qui s'est fait cambrioler ? Mais lorsque vos voisins le seront, vous changerez d'avis." Si l'on n'a pas envie de consommer à outrance, de dire oui à tous les gogos qui se présentent, à sur-sécuriser sa maison, on est vu comme le dernier des crétins qui ne vit pas dans la réalité. Tant mieux, crétin je resterai ; de toutes façons, je reste persuadé que si je me fais cambrioler, les visiteurs n'emporteront pas ma bibliothèque. Alors, le principal est déjà sauvé.
Pour revenir à notre sujet du jour, l'excellent roman de Luc Fivet, je le conseille à tous ceux qui veulent sortir des lectures habituelles, à ceux qui veulent se poser des questions sur la société actuelle, sur la manière dont on y traite les gens. La chute peut survenir à n'importe quel moment, rapidement, et si personne n'est là dans l'entourage elle peut être rude. Joliment fait, joliment écrit, pas totalement noir, des lueurs d'espoir émaillent le texte. Vraiment une très belle découverte et un beau travail de l'auteur et de l'éditeur.
Attention pépite !!! Captivant, glaçant, une porte grinçant entre chaque ligne « Anonyme » est à l’instar de son incipit « L’homme était là, les mains au fond des poches de son survêtement. » Le lecteur, transi, le dos collé contre les murs sombres de ce huis-clos magnétique, assiste aux affres d’une satire psychologique. Menée d’une main de maître, digne d’un génie évident, l’histoire angoissante, prenante, douée, emmène le lecteur dans un « Anonyme » de haute voltige. Les dominos vont chuter les uns après les autres. Le narrateur est un personnage terne, gris, conformiste, rangé, sans aucune ambition. Lâche, faible, il va voir sa vie s’écrouler tel un château de cartes, par le passage en force chez lui de cet « Anonyme » machiavélique, sournois. Ce dernier, manipulateur aguerri, va mener notre comptable de métier à sa perte. « L’homme » est habile, malsain. L’absurde va œuvrer en tsunami. Cette fable ubuesque, dénonce les diktats sociétaux, les pouvoirs d’un fort contre un faible. La symbolique enclenche la chute de tout hédonisme. Ce récit habile, dénonce et pointe du doigt là où ça fait mal. Il dévoile les mécanismes de l’identité. Qui suis-je ? Qui est-il ? La personne en face de moi est –elle authentique, sincère ? Faut-il comme le dit si bien Prosper Mérimée « Apprendre à toujours se méfier ? » L’écriture est d’orfèvre, ciselée, précise, elle enclenche par sa maturité une lecture où rien n’est laissé au hasard. On entend, perçoit, et les émotions vives bousculent le lecteur. Le don est là. Ce thriller est aussi un outil. Les degrés de lecture sont des bénéfices. « Anonyme » est un emblème sociétal, sociologique, riche de sagacité. Perspicace, victorieux, subtil, surprenant, « Anonyme » de Luc Fivet publié par Les Editions Le Ver à Soie Virginie Symaniec, est en lice pour Le Prix Hors Concours 2018 et c’est une grande chance !.
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