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Le point de départ d'Adriana est l'idée étonnante de Théodora Dimova de prolonger l'oeuvre de son père, l'écrivain Dimitar Dimov (1909-1966), très connu dans la Bulgarie des années communistes. Mais alors que chez Dimov tout est concentré quasiment en une longue journée, Théodora Dimova a su bâtir son propre roman avec ses propres ressorts et son propre monde, et surtout son écriture, celle de ses précédents romans. Après avoir parlé de l'enfance et de la singularité d'un destin dans Eminé, de l'adolescence, de la maternité et du manque d'amour dans nos sociétés contemporaines dans Mères, c'est maintenant la vieillesse, dans ce qu'elle a de beau et d'admirable, mais aussi de déchéance physique et de solitude qu'elle aborde sans tabou. C'est aussi l'histoire d'une femme née dans une famille riche, blasée par l'argent et la haute société dans laquelle elle vit, poussée par l'ennui à la déchéance, à la débauche ; elle s'y vautre et s'en repaît jusqu'à commettre l'irréparable. Le narrateur principal, car Théodora maîtrise à merveille l'art de faire s'entremêler les voix, est un jeune écrivain, Teodor, qui voit un jour, non sans déplaisir, débouler chez lui sans tambour ni trompettes sa chère cousine Ioura. Toute excitée, celle-ci lui raconte ce qui lui est arrivé depuis qu'ils ne se sont pas vus, l'incitant à écrire un roman (ce qu'il fera, bien entendu). Elle a répondu à une petite annonce et est devenue l'accompagnatrice d'une vieille dame, Adriana, ce qui va bousculer sa vie. Les voix et les vies se mêlent, la vieille dame sait se raconter sans complaisance, évoquer ce qu'elle fut dans ses défauts, ses errances et la tragédie dont elle est coupable : dans sa profonde déchéance, elle causera la mort d'une jeune femme après avoir séduit l'ami de celle-ci. Si, dans Mères, le personnage de Yavora jouait en quelque sorte le rôle de Christ féminin, dans Adriana, face aux abîmes, la narratrice voit apparaître une vieille femme sur un sentier désert, en qui elle se reconnaît des années plus tard. Elle passera les épreuves de la vie et des années à attendre la rencontre avec Ioura afin de pouvoir enfin retrouver sa rédemption. On retrouve ici la perte de valeurs humaines, perte douloureuse toujours au centre de l'oeuvre de Théodora Dimova, au sein de la société post-communiste engluée dans ses problèmes et avide de consommation, dans le contexte de globalisation et de perte des repères. Entre Adriana et Ioura qui l'écoute, une amitié, une grande affection même naît, une admiration, qui rendront plus douce la mort d'Adriana, attendue par celle-ci, et qui fera le bien de Ioura : elle trouvera le bonheur dans son mariage avec Siméon, protégé d'Adriana. Bonheurs et malheurs de la vieillesse vécue dans l'esprit et dans le corps, retour sans complaisance sur une longue vie qui fut tout sauf linéaire, avec ses déchéances et ses ascensions, attente sereine de la mort, sont évoquées dans ce roman avec justesse, sans indécence ni fausse pudeur, laissant le lecteur touché et bouleversé. À l'instar de Mères, on retrouve dans ce magnifique roman la même écriture haletante, au rythme si particulier, effréné, qui bouscule le lecteur et l'emporte.
Théodora Dimova est une autrice bulgare dont j’ai déjà eu l’occasion de lire et apprécier deux romans.
La sortie en poche d’Adriana me permet de découvrir un nouveau texte, assez différent des autres, qui m’aura déroutée, parfois perdue mais aussi paradoxalement, charmée.
Tout commence avec un écrivain, Teodor, qui revoit la visite impromptue de sa cousine adorée, Ioura. Si les deux sont proches, voilà 6 mois, pourtant, que la jeune femme n’a pas donné de nouvelles.
Mais par un soir d’août caniculaire, la voilà qui débarque chez son cousin pour lui raconter ce qu’il lui est arrivé : un travail chez une vielle dame, une rencontre et l’impérieuse nécessité de tout raconter à son écrivain de cousin.
Car Adriana, la vieille femme, a connu une vie tumultueuse surtout dans sa jeunesse, l’ennui et le désœuvrement l’ayant conduite à être capricieuse, désœuvrée, déprimée. Les fils de son existence vont ainsi s’emmêler jusqu’à une rencontre, la plus importante de son existence…
Je n’en dirais pas plus car le roman n’est pas très long et il serait dommage de le gâcher par trop de révélations.
Ce roman est assez étrange, il reprend un roman inachevé du père de Theodora Dimova,
victime du stalinisme. Il dépeint des personnages complexes, presque des archétypes. La jeune Ioura innocente, marquée du sceau du bonheur, Adriana perdue dans son mal-être, les hommes qui semblent incapables de leur résister, les coups de foudre d’hier et d’aujourd’hui.
Mais impossible de lâcher ce roman grâce à son style. Pas de chapitres, un long souffle qui entraîne le lecteur jusqu’aux pages finales.
Ce n’est clairement pas le roman que je conseillerai pour débuter l’œuvre de Dimova mais pour celles et ceux qui la connaissent déjà, ce roman est une nouvelle occasion d’apprécier sa plume.
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