"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Erwan est en prison à Rennes depuis deux ans.
Pourquoi ?
On ne le saura qu'en fin de livre.
Avant, il travaillait à l'abattoir d'Angers.
Boulot épuisant, éprouvant, sans répit.
Dans le sang et les odeurs.
Des cadences difficiles à suivre.
Clac
clac
clac
le bruit de la chaîne qui continue et ne s'arrête pas.
Clac
clac
clac
Même quand on est rentré chez soi.
Heureusement, il y a Laetitia, la jeune saisonnière, un rayon de soleil dans ce monde inhumain.
Même chez les plus jeunes, un seul espoir, un seul objectif, la retraite.
Pour sortir de cet enfer.
Un livre aussi magnifique qu'il est noir et plombant.
Pas de chapitres.
Tout s'enchaîne
Clac
clac
clac
une écriture qui ne laisse pas de répit, comme cette chaîne obsédante.
Qui nous plonge au cœur de cette vie automatisée, inhumaine.
Cette vie qui sent le sang du bétail qu'on tue, qu'on dépèce, qu'on trie, qu'on transporte......
Une écriture qui nous emmène au sein de l'abattoir.
Une écriture qui dénonce les conditions de vie inacceptables de tant de gens qui travaillent dans toutes ces chaînes, ou autres emplois difficiles, pour un salaire misérable qui leur laisse juste de quoi vivre.
Quel autre espoir que la retraite ?
Mais dans quel état physique et psychique seront-ils ?
Auront-ils encore la force d'en profiter ?
Ce sujet de la condition au travail est peu traité en littérature.
A part dans le très beau livre de Joseph Ponthus : A la ligne : feuillets d'usine.
Ça va mal finir…On le sait dès le début.
Depuis la prison de Rennes-Vezin où il est incarcéré depuis deux ans, Erwan raconte ce qui était son quotidien avant d’arriver là.
A 17 ans, il décroche un boulot dans un abattoir d'Angers. Le sang, les viscères, les carcasses, le froid, les cadences infernales, l’odeur, les blagues graveleuses des collègues, l’ennui, le mépris des petits chefs, la résignation, et toujours le bruit, et toujours le clac des chaines qui rend fou.
Dans dans ce milieu qui n’a de considération ni pour l’Homme ni pour la bête, on attend la retraite dès la trentaine.
Heureusement pour Erwan, il y a Laëtitia, étudiante intérimaire, il y a son frère, sa belle sœur et leurs enfants. Des moments de douceur dans l’enfer. Mais cela n’évitera pas « l’événement ». Et des clacs de la chaîne jusqu’aux clacs des portes de la prison, Erwan déroule sa vie.
L’écriture alterne entre phrases courtes et envolées, entre la rtymique de l’usine et les pensées diffuses du narrateur.
Extrêmement noir, poisseux, tendu, anxiogène et particulièrement réussi, ce roman inaugure merveilleusement la collection poche des éditions Asphalte
Une fois commencé, impossible de lâcher ce roman. Erwan nous raconte sa vie, son travail à l’abattoir d’Angers et surtout nous tient en haleine jusqu’au bout pour savoir pourquoi il se trouve en prison. Ce qu’il appelle « l’événement » ne sera révélé qu’à la toute fin du livre.
L’écriture de Timothée Demeillers est puissante et rythmée. Il arrive à faire ressentir les odeurs, les bruits de l’usine et le sang. La cadence également, avec les « clacs » de la chaîne qui reviennent régulièrement dans le texte. Erwan est affecté au poste des frigos. Il tri les demi-carcasses de viandes qui arrivent par la chaîne. Et on lui demande d’en trier de plus en plus. La cadence augmente encore et toujours. Le maître mot est la rentabilité.
C’est un roman notamment sur la condition sociale, le mépris d’une classe pour une autre, les cols blancs vis-à-vis des ouvriers. La déshumanisation et les nouvelles techniques managériales sont pointées. La pénibilité du travail et les corps usés sont aussi au cœur de ce roman. Et cela résonne tout particulièrement en cette période où l’augmentation de l’âge du départ à la retraite est au cœur des débats.
On ressent un milieu assez dur, très masculin et macho, avec des blagues poussives. Erwan est lassé de tout cela. Il est en souffrance. Sa famille est une bouffée d’air, tout comme sa rencontre avec Laetitia, une saisonnière.
Timothée Demeillers s’est inspiré de son expérience personnelle. Il a travaillé pendant 4 mois dans un abattoir, en été, lorsqu’il était étudiant. Il a rencontré les personnages que l’on croise dans le livre.
On pense forcément à Joseph Ponthus et son roman « A la ligne » où le narrateur est aussi un ouvrier mais dans une usine de poissons, un abattoir de Bretagne.
Vous aurez peut-être envie d’arrêter ou de réduire votre consommation de viande après cette lecture. Mais Timothée Demeillers ne porte aucun jugement. Ce n’est pas un livre militant. En tout cas on en apprend beaucoup sur le métier et le milieu des abattoirs, tout en réfléchissant à notre rapport à l’animal.
A la fin du livre, vous trouverez une playlist pour rester dans l’ambiance du roman.
Il a été multi-sélectionné pour des prix. L’auteur a d’ailleurs eu le prix Hors Concours en 2021 pour son roman « Demain la brume ».
« Jusqu’à la bête » vient de sortir dans la toute nouvelle collection poche d’Asphalte, l’occasion de se faire plaisir à petit prix et de plonger dans une atmosphère particulière ! Foncez chez votre libraire et ne manquez surtout pas cette pépite !
Quant à moi, j’ai hâte de lire son prochain roman qui aura pour thème les Sudètes.
Alors 7m2 de superficie qui n’appartiennent à personne en bordure de Danube entre la Croatie et la Serbie, une terra nullius ça vous tente ?
C’est l’idée folle que Jirí propose à son jeune et ambitieux ami Vít Jedlička en 2015 ! Vit se nomme rapidement président de ce no mans land qui devient le Liberland !
Créer un pays avec internet et les réseaux sociaux et le faire reconnaître sur la scène internationale !
Utopie ?
C’est sans compter les nombreux internautes, aventuriers et anarchistes de partout dans le monde qui le contact voyant une opportunité de rentrer dans l’histoire pour certains, d’investir pour d’autres mais aussi d’évasion fiscale…..et surtout de liberté !
Très entouré, notre nouveau président tente par tous les moyens de faire reconnaître son nouveau pays !
Il faut communiquer, trouver de l’argent, des investisseurs, des volontaires, juristes mais aussi gardes du corps…. Car la Croatie et la Serbie voient ce projet d’un très mauvais œil et empêchent l’accès aux 7m2 !
C’est fou ! C’est parfaitement documenté et très bien écrit !
Alors on peut penser au premier abord que les deux auteurs ont un sens de l’imagination très développé, qu’ils sont même un peu dingues ! Mais chers lecteurs c’est une histoire vraie !
Alors c’est fou et terrifiant mais qu’est ce que c’est bien ! Passionnant !
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