"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Quel roman intelligent ! Une seule date (1979), quelques jours, et c'est toute un petite société que l'on voit défiler, commentant, chacune à sa manière, l'affaire des diamants sous VGE. Un régal d'ironie, avec une structure narrative singulière où chaque chapitre ne se clôt par aucun signe de ponctuation mais enchaîne habilement avec le point de vue d'un autre personnage. Un manège enchanté ! Car l'ironie n'est jamais une charge contre les personnages, avec lesquels le lecteur est en empathie, d'Infancia, la femme de ménage portugaise (sa télévision !) à l'inspecteur des renseignements généraux alcoolique...
Un livre tonique !
Le Président se tait... mais le tout-Paris bruisse de mille mots.
Nous sommes fin 1979 et le septennat de Valérie Giscard d'Estaing est bousculé par l'affaire des diamants de Bokassa. Cadeau bien encombrant pour ce Président jamais nommé, cadeau qui délie les langues et alimente toutes les spéculations
Le Président se tait, mais "plus il se tait, plus on parle de lui. Plus on attend de lui des explications et plus il reste silencieux". La France est comme "un mari cocu: elle voudrait obtenir des informations et on les lui refuse".
Dans cette satire désopilante, Pauline Dreyfus nous fait vivre ces 49 jours de silence en les incarnant dans une galerie de personnages ancrés dans ces années 70: de la bonne portugaise au châtelain ruiné, de la journaliste en panne d'inspiration à la petite Pauline de 10 ans observatrice affutée (l'auteur elle même?), du chef de protocole guindé à la bourgeoise "décrispée", tous livrent leur analyse et leurs questionnement sur l'Affaire. Mention particulière pour le rédacteur de lettres de dénonciation pour divorces pour faute: savoureux!
J'ai beaucoup aimé ce roman qui m'a replongée dans cette époque pourtant pas si lointaine. C'est la chronique d'une décennie un peu oubliée qui fut le berceau du droit à l'avortement, de la réflexion sur l'abolition de la peine de mort, de la fin de la censure, de l'avènement du divorce par consentement mutuel, autant d'avancées sociétales impensables quelques années avant et qui ont façonné nos modes de vie. Une décennie qui en votant pour VGE, rêvait de Kennedy et se retrouvait avec Louis XIV, "un technocrate qui vénérait le progrès, l'Amérique et les ordinateurs, et qui finalement se révélait gentleman farmer". Une époque épargnée par l'emballement médiatique mais où déjà les errances de nos politiques défrayaient la chronique
C'est jubilatoire de suivre les effets de ce silence ravageur, d'alterner les points de vue, les milieux sociaux .
Une lecture délicieuse, portée par une plume acérée, emplie de dérision, d'ironie et de cynisme. Un regard caustique et impertinent qui nous délivre une dose d'humour qui fait beaucoup de bien. A lire sans tarder!
Après son Goncourt de la biographie obtenu l’an dernier, Pauline Dreyfus propose une analyse sévère de la sociologie politique en plongeant son nouveau roman Le Président se tait au cœur du silence de Valéry Giscard d’Estaing mis en cause par l’affaire des diamants dits de Bokassa.
Pendant sept semaines, le Président se tait ! Mais, pendant tous ces jours, Pauline Dreyfus met en scène douze personnages qui vont à leur manière commenter ce silence.
Juste un petit rappel des faits : Le Canard Enchaîné révèle en octobre 1979 que le Président en poste depuis sept ans aurait reçu, ainsi que des membres de sa famille et à plusieurs reprises, des diamants de grande valeur alors qu’il était Ministre de l’Économie et des Finances.
Ces cadeaux auraient été faits par Jean-Bebel Bokassa, venant d’être renversé par les troupes françaises. Valéry Giscard d’Estaing ne prendra la parole que quarante-neuf jours plus tard et? encore, pour ne pas s’expliquer réellement.
Pauline Dreyfus bâtit son roman entre la révélation et la prise de parole en racontant la sidération, la colère, l’indifférence et même l’acquiescement au travers de douze réactions revendiquées de français ordinaires.
La suite ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2022/09/02/pauline-dreyfus/
https://leslivresdejoelle.blogspot.com/2022/08/le-president-se-tait-de-pauline-dreyfus.html
Octobre 1979, révélation tonitruante de la presse : le Président a accepté en cadeau des diamants d’un dictateur africain. Alors que tout le monde attend qu’il parle, le président se tait. Il va rester dans ce silence pendant 49 jours.
Pauline Dreyfus met en scène, pendant cette période de temps suspendu de 49 jours, une ronde de personnages fictifs, une immigrée portugaise, une militante féministe, un inspecteur des RG, un couple de danseurs dissidents russes, une journaliste ambitieuse, un châtelain ruiné, une ancienne conquête du président, un chômeur devenu pilier de bar, le chef du Protocole du président ... tous, bousculés par cette affaire nous racontent cette époque.
L'opinion publique s'enflamme avec cette affaire, l'absence de démenti du président avive les doutes, crée incompréhension et malaise. Ce silence est-il le signe de l'embarras, de l'indifférence ou du mépris du président ?
J'aime beaucoup les romans de Pauline Dreyfus, j'aime retrouver sa plume pleine d'ironie pour décrire avec précision une époque dans le contexte d'un scandale politique que personne n'a oublié.
C'est avec juste ce qu'il faut de causticité qu'elle décrit le milieu journalistique avide de scandales, le snobisme d'une maîtresse de maison qui organise des dîners mondains, l'obsession du chef du Protocole du Président pour son mur de photos des grands-de-ce monde et la fébrilité dans les couloirs de l'Elysée. Tout un petit monde qui, comme tous les français, s'interroge sur le silence présidentiel, sujet de conversation inévitable pendant sept longues semaines. Personne ne comprend le comportement de ce président sympathique qui " défaisait un à un les nœuds d'une société congestionnée" dont le porte-parole affirme qu'il prend de la hauteur et qu'il parlera "le moment venu".
Depuis l'élection de ce président (jamais nommé dans le récit) perçu comme jeune, moderne, plus décrispé que ses prédécesseurs, les évolutions sociétales ont été nombreuses, majorité à 18 ans, loi Veil sur l'IVG, le divorce par consentement mutuel, certaines ont des répercussions sur les différents personnages mis en scène par Pauline Dreyfus. L'actualité de cette période est aussi faite de la mort de Robert Boulin, de l'errance du Shah d'Iran devenu indésirable partout, de la prise d'otages à l'ambassade américaine de Téhéran...
Une écriture vive avec des chapitres habilement reliés. Une satire sociale vivante, bien rythmée, savoureuse par sa délicieuse impertinence. Un humour et une légèreté qui font du bien.
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